Le recours à la pilule comme moyen de contraception ne cesse de chuter dans les statistiques officielles. Ses méfaits – de sa conception à ses retombées sur la santé des femmes – remettent en cause l’un des dogmes du féminisme et font l’objet d’une enquête intitulée J’arrête la pilule de Sabrina Debusquat.
Si la pilule a été, pendant de longues années, le symbole de la libération sexuelle, son abandon au profit d’autres méthodes contraceptives pourrait bien devenir le nouveau credo du féminisme. Il faut dire que les temps sont durs pour la pilule depuis les scandales qui ont éclaté en 2012 et 2013, lorsque plusieurs femmes ont été victimes d’AVC ou d’embolies pulmonaires après avoir pris des pilules de troisième et quatrième générations. Depuis, la parole a commencé à se libérer sur d’autres effets secondaires de ce petit cocktail aux hormones dont se sont gavées des milliers de femmes qui n’étaient même pas malades. Baisse de la libido, prise de poids, migraines, insatisfaction de devoir penser chaque jour à prendre son comprimé et de porter seule, pour le couple, le poids de la contraception…
Des témoignages
Ici et là, sur Internet, sur les forums ou en vidéos, des femmes racontent comment leur médecin leur a prescrit la pilule sans autre forme de procès, en mettant parfois leur santé en danger, en refusant, surtout, d’écouter la moindre objection. Et celles qui ont fini par arrêter la pilule, en affrontant souvent, sinon le mépris, au moins l’incompréhension de leur entourage, expliquent comment ce choix a été libérateur pour elles. Les chiffres publiés par l’agence sanitaire Santé publique France le 25 septembre dernier sont d’ailleurs éloquents : en 2010, 45 % des femmes utilisaient la pilule comme moyen de contraception, elles n’étaient plus que 40,5 % en 2013, et 36,5 % en 2016. Les femmes l’ont délaissée au profit du stérilet (+ 6,9 % par rapport à 2010), du préservatif (+4,7 %), de l’implant (+1,9 %).
En septembre dernier, encore, la journaliste indépendante Sabrina Debusquat jetait un pavé dans la mare en publiant J’arrête la pilule (1). L’auteur, qui a elle-même arrêté la pilule après dix ans d’utilisation, a mené une enquête auprès de 3 600 femmes concernées par ce contraceptif. Elle a surtout fouillé l’histoire de la pilule… On lit donc avec étonnement, sous la plume d’une femme qui se revendique féministe, la dénonciation sans ambages des convictions eugénistes de Margaret Sanger ou des mensonges et de la cupidité qui, dans l’ombre, ont accompagné les recherches et la mise sur le marché de la pilule. Oh, bien sûr, il y avait déjà eu nombre de catholiques pour aller fouiller le passé trouble de Margaret Sanger, fondatrice du Planning Familial (2) et les nombreux scandales sanitaires et conflits d’intérêts dont s’est rendue coupable l’industrie pharmaceutique sont régulièrement dévoilés. Et puis, la mode étant à l’écologie, les graves conséquences pour la santé et l’environnement du rejet massif dans les eaux usées de ces perturbateurs endocriniens étaient de plus en plus souvent dénoncées.
S’affranchir du dogme…
Reste donc à inverser la tendance et le propos de Sabrina Debusquat est, à ce titre, passionnant. Il veut prouver qu’être féministe, c’est précisément s’affranchir du dogme de la sacro-sainte pilule, créée et mise sur le marché essentiellement par des hommes qui se souciaient très peu de la santé des femmes. Prouver que la pilule est un asservissement puisqu’elle contraint la femme à porter à assumer seule la contraception du couple. Montrer, enfin, que les femmes doivent pouvoir choisir en connaissance de cause. L’auteur propose donc une explication très claire des différents moyens de contraception connus aujourd’hui, en donnant aussi leurs possibles effets secondaires indésirables et leur taux de fiabilité. Et, surprise, les méthodes naturelles y sont présentées sur le même plan que les autres et leur fiabilité (qui n’a pas grand-chose à envier à celle de la pilule pourvu qu’elles soient bien appliquées) couchée noir sur blanc. Plus encore, Sabrina Debusquat ne cache pas l’avantage évident qu’il y a à connaître son corps, à partager avec son conjoint la responsabilité de la planification des naissances et à utiliser une contraception qui n’a aucun effet secondaire. Mais voilà, Sabrina Debusquat a si bien mené son enquête qu’elle sait bien que les catholiques ont longtemps été les seuls à critiquer la pilule et la contraception en général, qu’ils refusent de voir la maternité comme une maladie ou l’enfantement comme un instrument de soumission. Elle sait aussi qu’ils sont nombreux à voir dans les méthodes de régulation naturelle la seule manière de concilier ouverture à la vie et paternité responsable. Sabrina Debusquat prévient donc son lecteur : il ne faudrait surtout pas, sous prétexte de critique de la pilule, se laisser embarquer sur les chemins de l’obscurantisme. Oui, donc, aux méthodes naturelles, pourvu que, couplées éventuellement à une autre contraception, elles ne forcent pas à des périodes d’abstinence. Oui aux méthodes naturelles, pourvu qu’elles ne laissent pas croire que les femmes soient « forcées d’enchaîner grossesse sur grossesse », comme, d’après l’auteur, le pensent les « croyants ».
C’est cela, le nouveau graal du féminisme : une contraception assumée, choisie, efficace, mais surtout, qui soit partagée avec l’homme et respectueuse de l’environnement. Une contraception « verte », « écocertifiée » et paritaire.
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1. Sabrina Debusquat, J’arrête la pilule, Éditions Les Liens qui Libèrent, 298 p., 19,50 e.
2. J’ai voulu avorter, enquête au Planning Familial, hors-série n° 3, Éditions de L’Homme Nouveau, 56 p., 6 e.