L’avortement est d’abord le fait de tuer un enfant

Publié le 16 Jan 2015
L’avortement est d’abord le fait de tuer un enfant L'Homme Nouveau

Quarante ans après la loi Veil, la menace de la mise en place de l’euthanasie se profile. Face à ce problème politique et moral, le collectif « La Marche pour la vie » appelle à une mobilisation le 25 janvier. Rappel des conséquences de l’avortement, matrice de biens des maux, par Jean-Marie Le Méné, président de la Fondation Lejeune, co-organisatrice de la Marche. 

Pourquoi marcher pour la vie le 25 janvier ?

La Marche pour la vie (MPLV) est le seul rendez-vous politique depuis dix ans qui ose aborder frontalement la question de l’avortement. En effet ce « crime abominable », source systématique de toutes les autres dérives que nous connaissons, ne fait plus l’objet de contestation ou de remise en cause, y compris chez beaucoup des chrétiens. Cela me paraît dramatique car c’est une complicité avec un déni de réalité qui condamne à ne rien comprendre faute de regarder le diagnostic en face. Se contenter de dire que l’avortement est un problème moral difficile ou une souffrance pour les femmes est insuffisant. L’avortement est d’abord le fait de tuer un enfant avant sa naissance. Cacher l’horreur de ce geste serait destiné, paraît-il, à ne pas culpabiliser, stigmatiser, donner mauvaise conscience à ceux qui procurent l’avortement ou qui y ont recours. Mais pourquoi ­faudrait-il dire que ce n’est pas une faute ? Veut-on que cela continue au rythme de 220 000 avortements par an depuis quarante ans ? Dans l’indifférence générale, comme si ce n’était plus un crime parce qu’une alliance de trahison et d’inconscience a bouleversé le sens du bien et du mal ? On sait que, pour les idéologues qui font l’opinion et qui nous gouvernent, la réalité de la nature est fasciste et qu’ils s’emploient à la réformer. Mais nous avons le devoir de dire les choses comme elles sont et non pas comme nous voudrions qu’elles soient.

En outre, l’avortement est un problème politique très grave en plus d’être un problème moral. L’avortement est en effet un suicide démographique dont nous commençons seulement à mesurer les conséquences catastrophiques en ne pouvant plus payer les retraites aujourd’hui.?Pas d’enfants, pas de retraite par répartition. Il manque 10 millions de Français.

Avortement de masse et immigration de masse : le compte n’est pas bon. Pierre Chaunu, Jean Foyer, Jérôme Lejeune et leurs confrères de l’Académie des Sciences morales et

politiques l’avaient prédit il y a quarante ans. Pas un seul homme politique n’a la lucidité et le courage de saisir la dimension géostratégique de la corrélation entre avortement et démographie. Les gouvernants, de droite ou de gauche, préfèrent écouter des voix comme celle de Jacques Attali : avortement, euthanasie et faire croire que l’immigration va pallier le vieillissement.

Quels sont les axes de mobilisation de cette marche pour la vie ?

Cette année est le quarantième anniversaire de la loi Giscard-Chirac-Veil. Il n’est pas totalement fortuit qu’un livre à succès soit sous-titré « Les quarante années qui ont défait la France ». La coïncidence n’est pas troublante. En effet, il n’est pas un seul « progrès sociétal » qui ne s’appuie explicitement sur l’autorisation, sans cesse plus libéralisée, de l’avortement. L’avortement est devenu le passeport de toutes les transgressions au motif qu’après avoir osé la mort de l’enfant avant sa naissance, le droit peut tout. Ce raisonnement produit un effet de cliquet (pas de retour en arrière) et une surenchère maîtrisée (on reste en deçà de la ­transgression-étalon). Ainsi, au nom de l’avortement, on a légalisé en quelques années l’industrie procréatique et l’eugénisme, le diagnostic préimplantatoire, le tri des embryons humains, leur congélation, leur utilisation comme matériau de recherche et leur destruction. L’engouement pour le clonage et l’exploitation de cellules souches embryonnaires ont invoqué l’avortement.

La légalisation de l’avorte­ment est la matrice de toutes les audaces. Il n’est pas jusqu’au mariage entre personnes de même sexe qui ne se réfugie derrière la légalisation de l’avortement. La gestation pour autrui est bien obligée de s’en référer au dogme de la grossesse choisie. L’euthanasie n’échappe pas à la règle : n’est-ce pas au moins aussi rationnel de donner la mort en fin qu’en début de vie ? Comme pour l’avortement, on parlera d’un dispositif d’exception, strict, encadré, à réévaluer. Et la peine de mort en fin de vie sera établie, définitive et marquée au coin d’une fallacieuse bienveillance. L’euthanasie est donc la prochaine menace contre la vie. Elle sera au cœur de l’actualité dès le début janvier. C’est la raison pour laquelle la Marche pour la vie se mobilise cette année sur deux thèmes : l’avortement et l’euthanasie.

La question actuelle de l’euthanasie est-elle prise autant à cœur que celle de l’IVG dans la démarche de la MPLV de cette année ?

Il est frappant de constater que les arguments en faveur de l’euthanasie sont exactement les mêmes que ceux en faveur de l’avortement. La vie n’est pas un don mais un dû ; nous la créons et la détruisons à notre guise. L’État garantit cet individualisme forcené. La médecine, en rupture avec toute sa tradition, a accepté d’être chargée par l’État de l’exécution de ses basses œuvres, c’est-à-dire de mettre un terme à certaines vies humaines fragiles.

Le 12 décembre, les députés Jean Leonetti et Alain Claeys ont rendu leur rapport sur la fin de vie au Président de la République. Les Verts sont en embuscade : une proposition de loi réclamant l’euthanasie et le suicide assisté va être débattue à l’Assemblée le 29 janvier. Les radicaux de gauche, partisans eux aussi du suicide assisté et de l’euthanasie, ont négocié leur maintien dans la majorité contre la main mise sur le texte relatif à la fin de vie.

Le rapport Claeys-Leonetti utilise des contorsions linguistiques de nature à faire passer la pilule d’une euthanasie politiquement correcte :

– Créer un « droit à la sédation profonde » qui conduit à la mort. Même sans injection d’un produit létal, il s’agit là d’un geste euthanasique, dont le marqueur est la volonté de provoquer la mort (par le recours à des doses excessives de sédatif antidouleur et anesthésiant, plus importantes que celles nécessaires à un endormissement destiné à soulager la souffrance).

– Rendre contraignantes les directives anticipées. Il s’agit là d’une dénaturation de l’acte médical qui par essence ne peut pas être un acte qui tue et qui serait indûment imposé aux professionnels. Et d’une fausse liberté : présentée comme l’avènement de l’autonomie des patients, cette évolution va au contraire les rendre otages d’une société qui n’a plus les moyens de faire face au vieillissement et choisit la violence radicale.

Le scénario est tellement connu que l’angélisme n’est pas raisonnable. Ce qui sera présenté comme l’exception deviendra la règle, puis la transgression finira par être brandie comme un « droit fondamental ». Les bouleversements que cette démarche systématique implique s’enchaînent comme des dominos et font tomber les uns après les autres les repères structurant de la société protecteurs des vies humaines fragiles.

La loi Veil est du 17 janvier 1975. Le 21 janvier 2015 s’ouvre à l’Assemblée nationale un débat qui va conduire à la légalisation de l’euthanasie. En quarante ans, la boucle est bouclée, la vie humaine est cernée. Alors bien sûr, le 25 janvier et à la veille du 29 janvier où un texte sera examiné pour réclamer l’euthanasie et le suicide assisté, nous marcherons avec autant de cœur contre l’avortement que contre l’euthanasie, cette dernière étape du dérèglement bioéthique.

Quelle est la place de la question du transhumanisme dans cette mobilisation ?

Je me méfie des Cassandres qui brandissent le spectre d’une inhumanité de demain et sont complices en même temps de l’inhumanité d’aujourd’hui. Ceux qui nous font frissonner à bon compte avec la transformation inévitable de l’homme en machine, doté d’une intelligence artificielle, sont les mêmes qui font la promotion de l’avortement, de l’euthanasie et de l’industrie procréatique qui fait des ravages ici et maintenant. L’humanisme ne risque pas de disparaître demain, il a déjà disparu aujourd’hui avec la chosification de l’embryon humain, la marchandisation du vivant et la police des ventres. Le transhumanisme est un créneau porteur qui agit comme une entreprise de démobilisation et de désarmement moral. Or, nous avons tous les moyens de ne pas devenir demain les robots du transhumanisme à condition de commencer par ne pas être les robots de la pensée dominante aujourd’hui.

Quelle est l’importance et la gravité de la récente résolution sur l’avortement comme droit fondamental et la suppression de la notion de détresse ?

La suppression de la notion de détresse qui a été votée il y a un an banalise ce qui n’apparaît plus comme une dérogation exceptionnelle au principe du respect de la vie mais comme un geste médical anodin.

La résolution présentant l’avortement comme un droit fondamental n’a aucune portée normative mais est lourde de symbole. Elle situe le droit de tuer au-dessus du droit de vivre.

Le plus grave réside dans le fait qu’il n’y a eu que sept députés à s’opposer à cette infamie. En revanche, un certain nombre de députés de l’opposition ont même voté pour cette résolution. Tandis que d’autres erraient à l’Assemblée pour pouvoir dire à leurs électeurs qu’ils étaient là mais sans prendre part au vote.

L’inintelligence et le manque de courage du personnel politique semblent sans limite.

Comment aborder tous ces problèmes alors que le gouvernement semble tout faire pour ficeler et « immobiliser » toute mobilisation (IVG comme droit fondamental donc incontestable, droit à mourir dans la dignité…)

Résister c’est s’accrocher au réel. Il faut dire et montrer la réalité de l’avortement et ce qu’il entraîne dans la destruction de la famille et de la société. Tout ce que la bien-pensance nous a conseillé de faire depuis quarante ans, c’est-à-dire de nous taire, de ne pas montrer d’embryons ni de fœtus, pour ne pas choquer ceux qui avortent, doit être absolument repensé. La seule chose que craignent les pro-choix, c’est que la vérité sur l’avortement soit exprimée et visualisée. C’est donc cela qu’il faut faire.

Le salut viendra quand les femmes oseront sortir du silence pour raconter ce qu’elles ont vécu et témoigner personnellement. Alors, rien ne leur résistera.

Quant aux hommes, on attend qu’ils se réveillent de leur mise à l’écart par un féminisme hystérique. Le propre de l’homme c’est de protéger ses enfants. Quand ils retrouveront leur vocation, la famille ira mieux et la société aussi.

Que proclamerons-nous et demanderons-nous ce 25 janvier ?

Non à l’avortement et à l’euthanasie !

Nous demanderons aux responsables politiques de faire en sorte :

– Qu’en attendant de pouvoir l’abroger, la diminution de l’avortement – et non sa promotion éhontée – devienne un objectif de santé publique (sensibilisation à la réalité de l’acte, études du syndrome post-abortif, déremboursement de l’avortement, la collectivité n’ayant aucune raison, autre qu’idéologique de le financer).

– De refuser la légalisation de toute sédation destinée à provoquer la mort ainsi que toutes directives anticipées contraignantes.

– De considérer l’hydratation et la nutrition comme des soins qui sont toujours dus, ce qui n’est malheureusement pas le cas avec la loi Leonetti qui permet déjà l’euthanasie.

Pour connaître le lieu et l’heure de la manifestation, commander des tracts et des affiches, connaître les cars de Province, s’engager comme bénévoles : www.enmarchepourlavie.fr

Cet entretien a paru dans le numéro 1581 en vente sur ce site en cliquant sur le lien ci-dessous.

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