Ne pas oublier le jugement dernier

Publié le 16 Nov 2022

Traditionnellement, le mois de novembre est consacré aux défunts, avec pour point culminant la journée du 2 novembre. Ce jour, le Pape célèbre une messe de suffrage pour les cardinaux et évêques défunts. Cette année, le pape François a rappelé l’importance du jugement dernier.

En 998, selon la Chronique de Sigebert de Gembloux, l’abbé de Cluny, saint Odilon, en instituait la pratique dans tous les monastères de sa dépendance, pour être célébrée à perpétuité au lendemain même de la Toussaint. C’était sa réponse aux récriminations de l’enfer le dénonçant, lui et ses moines, comme les plus intrépides secoureurs d’âmes qu’eussent à redouter, au lieu d’expiation, les puissances de l’abîme. Le monde applaudit alors au décret de saint Odilon, Rome l’adopta, et il devint la loi de toute l’Église latine. Le pape Benoît XV, aux lendemains de la Première Guerre mondiale, permit à chaque prêtre de célébrer ce jour-là trois messes dont une réservée à tous les fidèles défunts. Avec la fête de la Toussaint, la commémoraison des morts et la fête de la Dédicace de toutes les églises, le mois de novembre est donc consacré aux fins dernières. Le calendrier de 1969 a même accentué ce mouvement en plaçant la fête du Christ Roi de l’univers au dernier dimanche de l’année liturgique. Or, paradoxalement, les dogmes concernant les fins dernières sont parmi les plus méconnus de nos jours.

C’est bien un paradoxe, car nous cherchons tous à être heureux et nous avons reçu de Dieu non seulement une fin, mais encore les moyens. Souvenons-nous de l’Évangile des Béatitudes lu à la messe de la Toussaint. Nous devons donc, comme le rappelle le Pape, désirer aller au ciel. Alors, examinons nos désirs. Ont-ils un rapport avec le Ciel ? Perdre de vue le seul bonheur possible, pour ne songer qu’à des désirs futiles, serait assurément faire fausse route. Or, et c’est là le paradoxe, si jusqu’à une époque encore très récente, la considération des fins dernières était fréquente – que l’on se rappelle le sermon du Curé de Cucugnan –, de nos jours, c’est souvent le silence complet. Or, se détourner de la perspective des fins dernières, c’est pour l’homme une véritable aliénation. Nous ne le constatons que trop aujourd’hui à travers des progrès matériels qui ne peuvent apporter que des jouissances immédiates, sans procurer aucun remède pour la faim profonde de l’âme. D’où le nombre impressionnant de suicides, spécialement chez les jeunes. Cette chute de tension spirituelle affectant l’humanité affecte aussi les chrétiens et l’on constate chez beaucoup un désintérêt inquiétant vis-à-vis de ces questions fondamentales. On ne parle plus des fins dernières dans l’enseignement chrétien. Jean-Paul II le regrettait dans Entrez dans l’espérance.

Le pape François commente l’épisode du jugement dernier qui nous place dans l’attente si désirable de pouvoir entendre un jour de la bouche de Jésus : « Venez les bénis de mon Père ». Le festin des noces de l’Agneau nous attend. Mais attention : il faut revêtir la robe nuptiale pour y être admis Quand nous serons au Ciel, Dieu séchera toutes nos larmes et ce sera la Béatitude. Nous louerons Dieu tout au long du sabbat éternel, si bien chanté par saint Augustin à la fin de La Cité de Dieu. Relisons la page du jugement dernier bien commentée par le Pape. Nous serons surpris lors de la sentence. Puisse-t-elle être la bonne ! Pour cela soyons miséricordieux et charitables. À la suite de Marie, allons dès ici-bas à la rencontre de Dieu dans la personne des démunis, des affamés, de ceux qui n’ont pas de visite. Faisons ce que nous dit l’Évangile pour être jugés dignes du Royaume des cieux. Souvenons-nous qu’au tribunal divin, le seul chef d’accusation ou de mérite sera la miséricorde que nous aurons eue ou non envers lui, à travers les petits et les plus démunis de ce monde.

Un moine de Triors

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