PMA « pour toutes », l’arbre qui cache la forêt des transgressions

Publié le 04 Juil 2019
PMA « pour toutes », l’arbre  qui cache la forêt des transgressions L'Homme Nouveau

Le projet de loi de bioéthique, qui doit être présenté au Conseil des ministres le 26 juillet prochain, ouvre, sans surprise, la procréation médicalement assistée aux femmes seules ou en couple homosexuel. On aurait tort de ne s’arrêter qu’à cela car le texte comprend d’autres mesures et cache mal ce qu’est l’éthique aujourd’hui : un label pour trafiquer l’être humain en toute bonne conscience.

Le texte du projet de loi bioéthique, dévoilé le 23 juin dernier, sera présenté en Conseil des ministres le 26 juillet prochain. Que nul ne s’inquiète, le ministre de la Santé Agnès Buzyn « entend les oppositions et les respecte », c’est-à-dire, pour être parfaitement clair, qu’elle n’en a que faire mais a au moins la chance de ne pas être sourde et la politesse ne pas cracher au visage de ses adversaires. Des 32 articles que contient le projet gouvernemental, on retient surtout la légalisation de la procréation médicalement assistée (PMA) « pour toutes » mais le texte présente d’autres mesures importantes, notamment l’allégement des contraintes liées à la recherche sur l’embryon ou la congélation des ovocytes pour des raisons de convenances.

Cinq mesures phares

  1. L’ouverture de la procréation médicalement assistée aux femmes en couple homosexuel ou aux femmes seules, remboursée par la Sécurité sociale. Cette disposition supprime donc le critère de l’infertilité qui prévalait jusque-là dans l’accès à la PMA. 
  2. La possibilité de congeler ses ovocytes pour un motif de convenance et pas seulement médical.
  3. La filiation, pour les enfants nés d’une PMA, sera établie par « déclaration anticipée de volonté » avec mention du recours à un tiers donneur au moins pour les couples de femmes. Reste à savoir – et c’est le Conseil d’État qui doit trancher –, quelle option choisir pour les couples hétérosexuels qui ont recours à une PMA avec donneur. Faut-il garder, pour ces couples hétérosexuels, le régime qui prévaut pour l’instant de « mimétisme biologique » dans lequel les parents d’intentions sont considérés comme les parents biologiques sans mention du donneur dans l’acte de naissance, ou faut-il une unique procédure pour tous les cas de PMA ?
  4. L’accès aux données non identifiantes du donneur à la majorité de la personne née par PMA, voire l’accès à l’identité du donneur sous réserve du consentement de celui-ci, « soit au moment du don, soit au moment où l’adulte en fait la demande », là encore c’est au Conseil d’État de trancher.
  5. Le maintien d’un régime d’autorisation (qui a remplacé le régime d’exception) pour la recherche sur l’embryon mais avec un allégement des contraintes ainsi que la possibilité de détruire les embryons ne faisant plus l’objet d’un projet parental et non utilisés par des chercheurs « après un délai de cinq ans ».

De la technique avant tout

bioethique Calendrier 1

C’est bien entendu la forme juridique qui veut cela mais, dans le cas précis de ce projet de loi, on peine à admettre qu’un tel langage puisse être utilisé pour parler de procréation. Cette PMA « pour toutes », que l’on nous a vendue comme une histoire d’amour et d’égalité avant tout (« Être parent, ce n’est pas des gamètes mais de l’amour », expliquait Agnès Buzyn le 23 juin dernier) apparaît pour ce qu’elle est vraiment : la pérennisation et le développement de l’industrie procréatique avec ce qu’elle implique de « procédés », d’« efficacité », de « contrôle », de « test ». Ainsi, les couples peuvent bénéficier d’une nouvelle tentative de fécondation in vitro avant le transfert « si un problème de qualité affecte ses embryons »

Le projet de loi tente maladroitement de donner le change avec, pour la partie concernant la PMA, le titre suivant : « Élargir l’accès aux techniques disponibles sans s’affranchir de nos principes éthiques ». La seule restriction morale qui apparaisse véritablement est l’interdiction de payer les couples ou les femmes seules qui choisiraient de « donner » un embryon sur lequel ils n’ont plus de projet parental. En revanche, et c’est révélateur, le titre du chapitre concernant la recherche sur l’embryon ne fait nullement mention de l’éthique mais d’une « recherche libre responsable », un peu comme le tri des déchets… Pourtant, le sujet, on le sent bien, reste délicat, ne serait-ce que parce que si l’embryon n’est qu’un matériau de laboratoire comme le laisse entendre la loi en vigueur et celle qui la remplacera, on comprend mal pourquoi subsistent encore quelques restrictions à ces recherches. Alors, de la même manière que l’avortement est pudiquement appelé « interruption volontaire de grossesse », le projet de loi préfère parler de « cessation de conservation des embryons » plutôt que de destruction.

Vers le pire ?

Ce n’est d’ailleurs pas, loin s’en faut, la seule contradiction de ce texte. 

La suppression du critère médical ­signifie-t-elle que tous les couples hétérosexuels non touchés par l’infertilité pourront prétendre à une PMA pour des raisons de confort ? 

En outre, la PMA dite « post-mortem » (réalisée avec les gamètes du père décédé entre le moment du prélèvement des gamètes et celui de la PMA) demeure interdite pour une raison mystérieuse puisque la possibilité de la PMA va être étendue aux femmes célibataires. Il est évident, dans ces conditions, que cet interdit ne sera pas maintenu très longtemps et c’est bien là toute la perversion de ces incohérences qui ne font que rendre plus urgentes d’autres transgressions censées rétablir l’égalité. 

Pour autant, on aurait tort de s’inquiéter de cette loi de bioéthique sous prétexte qu’elle ouvrirait la boîte de Pandore et aboutirait forcément à la gestation pour autrui (GPA). La boîte de Pandore est déjà largement ouverte et, à ce stade, il s’agit même plutôt d’un gouffre que d’une boîte et nous savons qu’il s’est ouvert en 1975, lorsque l’avortement a permis que l’on fasse dépendre l’humanité d’une personne à la mesure du désir dont elle fait l’objet. 

Ce contenu pourrait vous intéresser

À la uneSociété

Peuple, élite et bien commun

L'Essentiel de Joël Hautebert | La victoire de Donald Trump aux États-Unis et les constats dressés à de nombreuses reprises ces dernières années en Europe sur les divergences grandissantes entre le peuple et les élites ne doivent pas amener les catholiques à une vision manichéenne : la défense des valeurs morales naturelles est la boussole vers le bien commun qui évitera de confondre une oligarchie dévouée avec d’une véritable élite.

+

élite peuple
À la uneSociétéÉducation

Difficultés scolaires et troubles cognitifs 

C'est Logique ! de Bruno Couillaud | Le mot « trouble » est désormais commodément employé dans les milieux scolaires pour désigner toutes sortes de difficultés des élèves. Mais l’absence de définition claire de ce mot et son ambiguïté semblent repousser un certain nombre de conduites répréhensibles volontaires dans le domaine de la pathologie, exonérant les éducateurs qui devraient y faire face. 

+

trouble cognitif
SociétéBioéthique

Le débat sur la fin de vie repoussé

L'examen du texte sur la fin de vie, initialement prévu pour le 27 janvier, a été reporté aux semaines des 3 et 10 février, suscitant une incertitude quant à sa forme définitive. Ce projet, soutenu par une partie des députés, vise à légaliser l'euthanasie et le suicide assisté, mais il rencontre une opposition féroce, notamment de la part des soignants, des défenseurs des soins palliatifs et de nombreuses voix chrétiennes.

+

Pour des états généraux de la fin de vie :tribune et pétition du Comité pour la dignité en fin de vie L'Homme Nouveau
Société

Le retour de la Dame de Pierre : un voyage à travers 1000 ans d’histoire

Le 8 décembre 2024, la cathédrale Notre-Dame de Paris, après cinq années de travaux suite à l’incendie dévastateur de 2019, réouvre de nouveau ses portes au public. À cette occasion, un événement majeur rend hommage à l’histoire et à la grandeur de Notre-Dame : le spectacle La Dame de Pierre, qui revient du 20 au 22 décembre 2024 sur les scènes du Palais des Congrès de Paris.

+

la dame de pierre