Pour défendre la famille, il faut aussi sauver les couples

Publié le 05 Avr 2017
Pour défendre la famille, il faut aussi sauver les couples L'Homme Nouveau

Spécialement créé pour aider la cellule familiale attaquée de toute part, l’Institut pour la Famille en Europe a déjà mis en place en France plusieurs « Accueils Louis et Zélie » et propose toute une action centrée sur la prière pour sauver les couples en difficulté. Entretien avec son directeur, Guillaume d’Alançon.

L’Institut pour la Famille en Europe a publié récemment un livret de neuvaine à « Marie qui refait les couples » (Marie qui refait les couples, Life Éditions, 40 p., 4,90 €). Comment est né ce projet ?

Guillaume d’Alançon : La conviction profonde que l’amour conjugal est à la base de la paix sociale. Les crises qui affectent notre monde prennent très souvent naissance dans la fracture des familles. Aussi, il me paraît essentiel que les couples se confient à la Vierge, en tout temps mais aussi lorsqu’ils traversent des moments difficiles car, lorsque les problématiques de la vie conjugale ne sont résolues que sur le plan strictement naturel, elles ne sont en réalité pas vraiment résolues. N’oublions pas que le mariage est un sacrement, c’est ce qui rend l’union authentique entre l’homme et la femme insupportable à Satan… qui veut s’en mêler pour y semer le trouble. Enfin, en cette année du centenaire des apparitions de Fatima, la médiation de la Vierge est irremplaçable. Nous serions fous de nous en priver !

Si faire face aux problèmes de couples sur le plan naturel – avec l’aide d’un conseil­ler conjugal par exemple – ne vous semble pas suffisant, cela vous paraît-il néanmoins nécessaire ?

Certainement ! On a pendant trop longtemps fait uniquement de l’horizontal sans la dimension spirituelle mais faire l’inverse serait tout aussi désastreux. Il faut trouver l’équilibre entre la nature et la grâce.

Pourquoi cette idée de neuvaine pour les couples vous est-elle venue ? Cette problématique vous semble-t-elle avoir une actualité particulière ?

La question du couple est très actuelle dans la mesure où la famille est aujourd’hui attaquée de toutes parts. Ce qui reste de l’ordre naturel semble en passe d’être détruit. Nous vivons un combat de type apocalyptique, le combat de la fin des temps. Cela ne veut pas dire pour autant que nous sommes à la veille de la fin du monde car, en réalité, on trouve des traces de ce combat apocalyptique à toutes les époques, un combat aux implications politiques évidentes, qui se manifeste principalement dans la négation de la royauté sociale du Christ. Une ­cité qui a mis Dieu dehors connaît très vite de graves conflits en son sein. Et les couples sont les premiers à en subir les conséquences.

Cette neuvaine a été publiée par l’Institut pour la Famille en Europe, que vous dirigez. Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?

L’Institut pour la Famille en Europe (LIFE) a été créé en 2015 pour accompagner le développement des « Accueils Louis et Zélie ». Il s’agit de proposer un accompagnement de proximité pour les couples, les femmes confrontées à une grossesse inattendue, les familles, les jeunes mais aussi les personnes seules ou âgées. Nous avons déjà six centres dans le Sud de la France et nous travaillons en ce moment sur une dizaine de projets d’implantation. Nous œuvrons également en lien avec d’autres pays européens comme l’Espagne, la Suisse et l’Italie qui sont également intéressés par ce projet. Nous avons notamment reçu le soutien de Mgr Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg, et président de la Conférence épiscopale de Suisse.

Le Pape François avait demandé que l’Église soit un « hôpital de campagne », c’est-à-dire qu’elle soit sur le front, là où les blessures sont les plus vives. C’est la raison pour laquelle les accueils Louis et Zélie sont tenus par des personnes formées, notamment des professionnels de santé, des professionnels de l’écoute, des moniteurs Billings… Leur priorité est d’aider leur prochain avec compétence sans oublier d’être missionnaires. Il ne s’agit pas d’une écoute neutre… Pour le moment, la majorité des gens que nous recevons ne sont pas pratiquants… ils sont reçus avec un respect absolu, et c’est parce que nous les respectons que nous leur devons une aide reçue d’en haut. Si les problèmes des personnes rencontrées dépassent nos compétences, on les oriente vers des spécialistes fidèles à l’anthropologie et à la morale catholique : médecins, avocats, etc. Pour ­cela, nous nous appuyons essentiellement sur l’enseignement de Jean-Paul II.

Le démon étant à l’œuvre pour diviser, surtout dans les milieux catholiques, nous nous situons résolument en complémentarité avec les nombreux organismes qui œuvrent déjà en ce sens et n’hésitons pas à relayer les initiatives de la Fondation Lejeune, d’Alliance Vita, de Mère de Miséricorde, de la Communion Notre-Dame de l’Alliance, d’Amour et Vérité…

Comment se structure cette neuvaine ?

La neuvaine est composée de trois parties. La première comprend neuf méditations pour les neuf jours de la neuvaine, en intégrant à chaque fois une problématique spécifique de la vie conjugale : estime de soi, fécondité, fidélité, éducation des enfants, maladie, crise de la foi d’un conjoint… Chacune de ces problématiques est reprise dans la prière en couple sous le regard de la Vierge. À la méditation propre des neuf jours s’ajoute une prière à la Vierge que les couples reprennent quotidiennement. La seconde partie de la neuvaine est une litanie à « Marie qui refait les couples ». Enfin, le livret propose un petit atelier temps d’écoute, qui formalise en des règles simples mais très concrètes l’esprit de ce que peut être le temps d’écoute réservé au conjoint. C’est une écoute exclusive de l’autre, qui ne doit normalement pas être interrompu, même lorsque ses propos peuvent être difficiles à entendre. Les problèmes peuvent être résolus pourvu que celui qui parle ait le sentiment d’avoir été vraiment entendu… L’autre prend ensuite le temps de reformuler pour être sûr d’avoir bien compris ce qui lui a été dit. Reprendre ensuite chaque difficulté ou incompréhension posément permet de dépasser le premier niveau de l’émotion pour entrer dans une démarche rationnelle, sans oublier Notre Dame, présente discrètement au cœur de ces ateliers, comme à son habitude.

Cette méthode d’écoute et de reformulation est finalement assez proche de ce que proposent, par exemple, les Équipes Notre-Dame avec le « devoir de s’asseoir ».

En partie, oui, mais lorsqu’un couple va mal, le « devoir de s’asseoir » peut vite se transformer en « devoir de se chamailler », et l’atelier d’écoute proposé en complément de la neuvaine est précisément construit pour éviter cet écueil. En disant cela, je ne remets bien évidemment pas en cause le bien-fondé et l’importance du « devoir de s’asseoir » !

L’atelier est-il pensé pour que les couples prennent un temps d’écoute chacun des neuf jours de la neuvaine ?

L’atelier d’écoute peut-être dissocié de la neuvaine elle-même, c’est à chaque couple de déterminer le temps dont il a besoin. Toujours est-il que cette écoute nécessite du calme et du silence pour que la conversation soit portée par une certaine vie intérieure. ­Même si les blessures à aborder avec son conjoint sont très profondes et douloureuses, il faut savoir trouver une atmosphère qui incite à la confiance et à la confidence. Dans une ambiance de recueillement. Toute action pour porter du fruit doit jaillir de la prière avait dit un jour en substance Marthe Robin.

D’où vient cette méthode d’écoute proposée dans le livret ?

Elle vient d’abord de l’expérience de couples, affinée ensuite par des rencontres variées, des moines notamment. La vie monastique, dans son essence, est une vie de famille, différente certes de la famille naturelle, mais elle en est une analogie évidente (cf. Dom Massimo Lapponi, Saint Benoît et la vie de famille). Plus les moines seront moines, plus les couples seront couples. C’est le mystère de la communion des saints. « Toute âme qui s’élève élève le monde » disait un auteur spirituel. La vie de prière, l’ascèse, le travail, l’obéissance,… bref toutes les vertus propres à la vie monastique sont finalement de très bons outils pour que nous, laïcs, puissions nous « décaper » de l’intérieur.

Dans les premiers temps de l’Égli­se, on parlait de la vie monastique comme de la vie chrétienne et ce n’est pas pour rien. Le fait que de nombreux laïcs s’agrègent à des communautés religieuses est très parlant, ne sont-elles pas d’incomparables lieux de ressourcement baptismal ? D’ailleurs, la vie conjugale des saints Louis et Zélie Martin avait une régularité toute monastique… Il y a de multiples passerelles et lieux de convergence dans l’Église, tout comme il y a une continuité entre vie contemplative et vie apostolique. Un certain nombre de textes du chartreux dom Guillerand s’adressaient à des fidèles laïcs. Si chaque époux ne développe son oreille intérieure dans l’oraison, celui-ci ­aura du mal à entendre son conjoint… qui gémit parfois en émettant un son difficilement perceptible, sauf à l’écoute du cœur.

Pourquoi s’adresser à la Vierge lorsque l’on a des problèmes de couple ? Après tout, elle qui était sans péché, n’a pas dû connaître ce genre de turpitudes !

C’est très vrai ! Cela dit, Marie est médiatrice de toutes les grâces et elle nous a toujours promis son assistance dans les dangers. Par ailleurs, si Marie n’a pas vécu de difficultés de manière peccamineuse, le foyer de Nazareth a certainement dû affronter les problématiques du quotidien.

La neuvaine a été publiée en novembre dernier, avez-vous déjà des retours ?

La neuvaine, déjà traduite dans plusieurs langues, a reçu l’imprimatur de Mgr Aillet, évêque de Bayonne et nous avons rencontré le Pape en décembre dernier, qui nous a encouragés dans notre démarche : « Bene, bene, avanti, avanti ! », nous a-t-il dit. Alors avançons. Nous avons également reçu le soutien de plusieurs évêques de France et d’ailleurs, de cardinaux romains… En outre, les retours que j’ai eus jusqu’à présent sont très encourageants. De nombreux prêtres diffusent le livret auprès de leurs fidèles. Sans compter les témoignages discrets reçus ça et là.

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