Les dépenses publicitaires en France ont atteint 29, 624 milliards en 2014, soit 1,44 % du PIB. De deux minutes d’écrans publicitaires par jour en 1968, le téléspectateur est passé à une exposition de plus de deux heures aujourd’hui. Réflexions sur cette place croissante prise par la publicité.
Que les médias soient devenus principalement des supports publicitaires a été révélé par la formule inoubliable de Patrick Le Lay (PDG de TF1) en 2004 : « À la base, le métier de TF1, c’est d’aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit (…). Nos émissions ont pour vocation de rendre le cerveau du téléspectateur disponible : c’est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible. »
Pour lecteurs de tous bords
Soumis aux exigences des gros annonceurs, les journaux d’opinion de la presse écrite sont ainsi devenus (depuis Émile de Girardin et avec l’aide du progrès technique) des journaux d’information industriels, selon le leurre de la « doctrine de l’objectivité » masquant en réalité leur neutralisation, leur soumission à la pensée unique par dépendance à la publicité. Pour obtenir davantage de contrats publicitaires, il faut des lecteurs de tous les bords politiques : « Les conséquences de cette collusion (entre médias et publicité) sont graves. Elles aboutissent à dépolitiser au maximum les grands journaux, à les vider de tout ce qui peut prêter à d’inévitables controverses, à refuser l’expression d’opinions nouvelles, originales. » (Jacques Kayser dans Mort d’une liberté, Plon, 1955).
La première désinformation a consisté à faire avaler ce sophisme de ladite presse d’information selon lequel les faits seraient séparables du commentaire (« Les faits sont sacrés, les commentaires sont libres »), alors que la vérité du fait réside le plus souvent dans sa juste interprétation, c’est-à-dire dans le commentaire éclairant le fait brut, discriminant ainsi entre le vrai et le faux, le bien et le mal, dans un débat et une recherche qui fondent la vocation du journaliste, comme celle de l’historien. Dans un consensus général, les journaux dits d’information dissimulent en réalité leur opinion. Ils insinuent leurs commentaires politiquement corrects dans la présentation de ce qu’ils donnent comme le fait brut, sacré, indiscutable. C’est la dictature sournoise du relativisme au service notamment des fins…