Depuis longtemps Yvon Tranvouez ausculte le catholicisme breton à l’époque contemporaine. Il le fait en privilégiant certains moments historiques et en multipliant les approches locales. Sans rien céder à la rigueur universitaire et à la grande variété des références, il écrit dans un style agréable à lire, avec un bon sens de la formule.
On aimera aussi son sens des nuances. Dans le prologue de son livre, il précise : « la chrétienté bretonne d’hier était plus équivoque qu’on ne l’imagine ». On le constate dans le chapitre consacré aux années 1902-1905 (loi contre les congrégations, loi de séparation de l’Église et de l’État). Alors que la Bretagne catholique (95 % de pratiquants dans certains cantons, mais 60 % dans quelques zones du littoral) tente de s’y opposer avec détermination, elle n’est pas unanime politiquement. Dans cette même Bretagne catholique, un quart des députés appartenait au Bloc des gauches.
Dans un chapitre intitulé « Le tabernacle dans la cathédrale », Yvon Tranvouez montre le changement de regard sur le patrimoine religieux durant ces dernières décennies. Depuis la fin des années 1960 – la baisse continue de la pratique religieuse et une mauvaise application et compréhension de la réforme liturgique issue de Vatican II –, la tendance a été de « relativiser le culte, ses lieux et ses objets […] la culture n’a eu, en somme, qu’à ramasser le sacré, plus ou moins laissé à l’abandon ». Ce qui avait fait hier le support et le cadre de la vie religieuse des croyants est devenu parfois un patrimoine préservé par des associations ou des institutions culturelles. Puis, « précisément au début des années 1980 », note Yvon Tranvouez, dans le sillage du pontificat davantage identitaire de Jean-Paul II, une réaction a commencé à se produire : le cultuel a commencé à retrouver ses droits face au culturel. Le renouveau des pardons et des pèlerinages atteste de cette réappropriation. Même s’il…