Rire de tout

Publié le 24 Oct 2012
Rire de tout L'Homme Nouveau

Au temps où le pouvoir politique tenait sa légitimité du Ciel, il y avait, dans une sagesse qui n’a plus cours, adjoint au souverain, une éminence grise pour rappeler la fugacité du pouvoir, s’assurer de son bon ordonnancement à la finalité du pouvoir politique, c’est-à-dire le bien commun en vue du Ciel, et un bouffon pour empêcher au souverain de se prendre lui-même pour l’autorité dont il n’était que le dépositaire. Enraillant les petits travers du monarque et des grands du royaume, le fou du roi redonnait une dimension humaine à l’omnipotence royale dont la pente naturelle tend vers une sorte de divinisation. Ainsi balancé entre le ciel et la terre, le pouvoir pouvait s’exercer sans une trop grande tyrannie et vaille que vaille s’orienter vers le bien commun.

Raymond Devos

Depuis que la noblesse de devoir a été remplacée par une oligarchie financière et que les éminences grises ne sont plus que des conseillers en placement, le pouvoir privé de son balancier, a perdu l’équilibre, et ne fait plus que fouir comme un cochon sauvage, la fange des désirs désordonnés et de l’égoïsme tyrannique, de sociétés qui n’ont plus comme principes que les Droits de l’homme et strictement plus aucuns devoirs. Le Ciel évacué, car par trop liberticide aux yeux des thuriféraires du moi déifié, le fou du roi, s’est métamorphosé en une sorte de psoriasis de l’intelligence. Et comme dirait monsieur de La Fontaine : « ils ne mourraient pas tous mais tous étaient frappés ». Tout devient sujet à la moquerie, sans limites, sans aucun souci de compassion ou de mesure vis-à-vis de celui qui en est la cible. On ne rit plus de bon cœur, mais d’un rire gras, voire jaune.

Vous ne pouvez plus ouvrir un journal, écouter une radio, regarder la télévision, sans être de façon quasi permanente submergé de faux calembours, de blagues « à deux balles », mais aussi de vacheries dépassant bien souvent la diffamation.

N’a-t-on pas vu récemment un journal dit satirique tenter sciemment de mettre le monde musulman à feu et à sang, sous le fallacieux prétexte que, non seulement l’on peut rire de tout, mais que cela est une quasi-obligation pour sauver une démocratie en péril face aux attaques répétées d’intégristes (sic) religieux dont les valeurs sont systématiquement traînées dans la boue.

Il y a pourtant un rire, qui grandit l’âme, un rire à la Raymond Devos, qui vous secouait non seulement les zygomatiques, mais aussi les neurones en jouant avec les mots avec tant de finesse que l’on pouvant entendre et réentendre ses sketches et toujours y trouver matière à rire.

Mais en majorité, ce rire à propos de quelque chose, s’est flétri, en un rire au dépend de quelqu’un, salissant pour le plus grand plaisir pervers d’une plèbe retournée à là barbarie. Diffamations, attentat verbal à la pudeur, négation absolue de toute valeur et tout cela dans un grand éclat de rire.

Et ces adultes qui rient de cet étalage nauséabond et délétère s’inquiètent ensuite que leur malheureuse progéniture ne respecte plus rien, et veulent maintenant rétablir une morale dite laïque à l’école.

Mais une morale c’est un ensemble de lignes que l’on trace pour définir la limite entre ce qui est bien et bon, et ce qui est mal. Or si vous autorisez les faussaires de l’humour à plastiquer systématiquement toutes les bornes morales sous la captieuse excuse de la liberté, vous jouez les Pénélope de bazar, construisant le jour des lignes avec des élastiques pour mieux les détruire la nuit venue.

Le pays est comme une nouvelle Rome que des milliers de Néron pyromaniaques sont en train de réduire en cendres sous les applaudissements frénétiques d’un peuple de décérébrer.

Vous trouvez plaisant de voir votre adversaire politique traîné dans la fange pour le seul plaisir de faire rire, mais avez-vous pensé à cet homme, à sa famille, à ses amis, aux souffrances morales qu’ils vont devoir endurer ? Non, bien sûr, pour un bon mot vous voilà complice actif des bourreaux qui exécutent leurs victimes sans jugement, les condamnant à la honte et la risée de tous.

Il n’y a aucune nourriture pour l’intelligence dans ce salmigondis de boules puantes, et le temps passé à ingurgiter ce brouet indigeste, est du temps perdu, du temps dérobé à vos devoirs parce qu’il vous maintient dans un état d’oisiveté. Il est bon de se distraire de temps à autre, mais il faut le faire avec discernement, parce que nous avons une responsabilité dans la propagation de ces immondices culturelles. Ils ne vivent comme les parasites que votre participation tacite à leurs forfaits. Si vous les ignorez, comme une bougie sans cire qui s’éteint aussi vite quelle a été allumée, ils disparaîtront du paysage pour notre plus grand bien et le leur aussi. 

Ce contenu pourrait vous intéresser

A la uneChroniques

Ni abstrait ni différencié, l’homme enraciné

L'Essentiel de Joël Hautebert | Dans le grand déséquilibre contemporain, deux écueils menacent la juste conception des êtres humains, considérés d’un côté comme des pions interchangeables et de l’autre comme n’ayant en commun que leur « zoologie ». Seule la conception chrétienne tient finalement les deux bouts de la chaîne. Une leçon plus que jamais d’actualité, à l’heure où la Nouvelle Droite pourrait faire figure de remède au mondialisme.

+

homme enraciné
ChroniquesEgliseLiturgie

La Pause liturgique : Sanctus 5, Messe Magnæ Deus potentiæ (Mémoires des Saints)

Ce Sanctus du 4e mode a quelque chose de mystique et de majestueux, dans sa simplicité. Il alterne heureusement les formules neumatiques et les passages syllabiques, les progressions par degrés conjoints et les intervalles de tierce, de quarte ou même de quinte, les élans vers l’aigu et les détentes vers le grave. Ce Sanctus a la particularité de n’être représenté que par une seule source manuscrite, allemande, datée de la toute fin du XIIe siècle.

+

alleluia