Profitant de la coïncidence entre le passage des reliques de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus à Rome et la série de catéchèses sur la passion de l’évangile et le zèle du croyant qui doit être un témoin, c’est-à-dire un martyr et donc doit savoir aller à contre courant, dans une obéissance entière à l’Église, le Pape a consacré son audience générale à la sainte de Lisieux. Celle-ci, on le sait, est patronne des missions à l’égal de saint François Xavier, le plus grand missionnaire de tous les temps, avec saint Paul. Avec le Pape, je voudrais insister sur cette proclamation inédite et apparemment impensable et je voudrais le faire à la lumière du magnifique dogme de la communion des saints.
Il y a là certainement un paradoxe. Comment peut-on l’expliquer ? Une petite carmélite, malade et faible, est proclamée patronne des missions. Qu’entendait nous enseigner Pie XI par cette proclamation ? De toute évidence, il marquait par là sa nette volonté de montrer aux yeux du monde l’importance unique et primordiale de la prière et de la communion des saints pour un essor missionnaire profond, solide et durable.
Par sa petite voie, Thérèse a su garder dans son cœur et dans sa mémoire la douce et réconfortante joie de l’évangélisation qu’avaient connue les Apôtres et les premiers Martyrs. Tout au long de sa courte vie, elle a été missionnaire dans l’âme en étant, dans le cœur de l’Église sa Mère, l’amour. Elle a su communiquer cette vive flamme de l’évangélisation à de jeunes missionnaires, particulièrement l’abbé Roullan. Si c’est bien Dieu qui donne toujours la croissance, la carmélite cloîtrée sema la bonne graine, en ne limitant ni son temps ni ses forces, même au cours de sa longue maladie qui devait la conduire à la tombe mais surtout au Ciel. Elle surmonta aussi doutes et incompréhensions, surtout au moment de sa terrible nuit de la foi. Elle a semé dans le cloître, mais par le mystère de la communion des saints, la graine s’est enfouie dans les terres sèches et arides du paganisme et de l’incrédulité, cette graine de l’amour, cette graine de la Bonne Nouvelle d’un Dieu qui a tant aimé le monde qu’il lui a envoyé son Fils unique. Et elle l’a fait, malgré ou plutôt en raison de sa petitesse, même quand les larmes, l’angoisse ou le découragement se sont mêlées à la ferveur rayonnante et l’humble détachement qui acceptait de perdre sa vie pour le Royaume et l’implantation de l’Église au cœur du monde païen. Tout cela, encore une fois, sans jamais quitter son cloître. Paradoxe étonnant qui nous fait comprendre que nous pouvons, par la prière et la communion des saints devenir de grands missionnaires. Songeons à l’islam. Quelle force pourrait avoir un grand amour et une profonde prière là où nous sommes ! N’oublions jamais que c’est toute l’Église qui est missionnaire et qui permet la pénétration du message évangélique. Toute l’Église, c’est-à-dire tous ses membres, où qu’ils soient, même le plus petit, peut et doit permettre que des tribus, lointaines et inconnues des hommes des premiers siècles, puissent connaître aujourd’hui la vérité fondamentale de la paternité divine et de la filiation divine de tous les enfants de Dieu nés au baptême, par et dans son Fils consubstantiel, le Verbe Incarné. Le Pape demande ainsi aux jeunes qu’ils fassent à leur tour partie de cette cohorte de saints missionnaires qui ont permis que, sur toutes les latitudes, cette vérité mystérieuse mais réelle que Dieu est notre Père et que nous sommes ses enfants, soit proclamée avec foi et vécue avec espérance et charité, à l’exemple de Marie.