Turquie : un attentat qui tombe à point ?

Publié le 23 Nov 2022
Erdogan

Attentat Istanbul

Le 28 octobre dernier, le résident Recep Tayyip Erdoğan trônait à un immense rassemblement organisé à Ankara. Officiellement, il venait célébrer la fête nationale. Il était surtout présent afin de lancer sa campagne pour les prochaines présidentielles, programmées en juin 2023.

Premier ministre de mars 2003 à août 2014 puis, à la suite d’une révision de la Constitution, élu président dans la foulée, il s’est installé au pouvoir pour ne pas le quitter. Parviendra-t-il néanmoins à satisfaire son ambition ? Certes, il a bien en main l’appareil répressif qui maintient l’opposition en respect. Surtout, ses prises de position islamistes lui valent le soutien de l’électorat religieux. Son ultra-nationalisme panturc lui assure également sa promotion dans les milieux nostalgiques de la grandeur de l’Empire ottoman. Ainsi, dans son discours du 29 octobre, il a été jusqu’à tancer la Grèce, rappelant, menaçant, l’incendie criminel de Smyrne (aujourd’hui Izmir). Pour mémoire, le 9 septembre 1922, lors de l’offensive turque de Mustafa Kemal, des milliers de chrétiens de langue grecque sont morts dans les flammes, provoquant la fuite de dizaines de milliers d’autres de leurs semblables vers la Grèce. Cependant, l’économie ne joue pas en faveur du président sortant. Le taux officiel de l’inflation, 83 %, est sous-évalué. Ainsi, depuis 2013, le PIB par habitant est-il passé de 12 600 dollars à 7 500. S’ajoutent les scandales de corruption auxquels sont mêlés les tenants du pouvoir et leurs proches. Aussi le mécontentement gronde-t-il et, signes prémonitoires, des villes comme Ankara et Istanbul, où Erdoğan a commencé sa carrière d’élu comme maire, sont passées à l’opposition aux dernières élections locales de 2019. Alors le « Sultan », comme on l’appelle, aurait-il mis sur pied un subterfuge pour reconquérir l’électorat ? Le 13 novembre dernier, un attentat à la bombe éclatait avenue de l’Istiqlal, non loin de la place Taqsim à Istanbul. Six personnes étaient tuées et 81 blessées. D’une clairvoyance étonnante, les services turcs arrêtaient quasi immédiatement une jeune femme de 23 ans, accusée d’avoir posé la bombe sur un banc. Puis, sans attendre, 16 autres suspects étaient arrêtés. Quant à Erdoğan, dès l’attentat, il affirmait le PKK, parti kurde de Turquie, et l’YPG, des Kurdes de Syrie, eux, coupables de ce nouveau bain de sang. Or, d’une part d’autres groupes, comme Daech (l’État islamique), sont des responsables potentiels de cet attentat. D’autre part, mais ce n’est pas non plus une assurance de leur innocence,…

Pour continuer à lire cet article
et de nombreux autres

Abonnez-vous dès à présent

Alain Chevalérias

Ce contenu pourrait vous intéresser

InternationalBioéthique

Abolition de la GPA : une semaine historique à l’Onu

Dans un rapport du 1er octobre, Reem Alsalem, rapporteur spécial des Nations unies sur la violence contre les femmes et les filles, a qualifié la gestation pour autrui de « forme d’esclavage moderne », et appelé à l’adoption d’un instrument international juridiquement contraignant interdisant la GPA « sous toutes ses formes ». 

+

gpa
International

Ce que l’Europe et l’Amérique doivent à l’Espagne. Entretien avec Marcelo Gullo (2/2)

Entretien partie 2 | Le 7 octobre, l'historien et politologue argentin Marcelo Gullo Omedeo publiait son dernier ouvrage, Lepanto : Cuando España salvó a Europa (Lépante. Quand l'Espagne a sauvé l’Europe). À cette occasion, Arnaud Imatz, docteur en sciences politiques et hispaniste, s’est entretenu avec l’auteur sur l’apport de l’Espagne dans l’histoire de l’Europe et des Amériques.

+

Espagne
International

De l’Europe à la Chine : la tyrannie des algorithmes

De l’agriculture au terrorisme, en passant par la pédophilie, l’intelligence artificielle et les algorithmes commencent déjà à prendre le pas sur la surveillance humaine. Une tyrannie qui va remettre en cause les relations et les échanges mondiaux et donc l’activité locale et nationale.

+

chine algorithme
International

Ursula von der Leyen, grande prêtresse de l’Europe 

Le 10 septembre dernier, Ursula von der Leyen prononçait le « discours sur l’état de l’Union » devant le Parlement européen. Elle a d’abord posé au chef de guerre, avant de promettre à toutes les tendances partisanes de satisfaire leurs désirs, puis de clamer son propre souhait en appelant à renforcer son pouvoir. C’était le discours d’un chef d’État et non d’un haut fonctionnaire nommé.

+

von der Leyen europe
International

L’assassinat de Charlie Kirk secoue les États-Unis

Décryptage | Militant conservateur et figure de la droite américaine, Charlie Kirk a été assassiné le 10 septembre dernier dans l’Utah (États-Unis). Sa mort a provoqué une onde de choc aux États-Unis, et même au-delà, ravivant les tensions politiques dans un contexte déjà très polarisé. 

+

Charlie kirk Amérique