Journaliste, mère de famille, Aziliz Le Corre s’est penchée, dans un livre tout juste paru, L’enfant est l’avenir de l’homme, sur les mouvements qui prônent la stérilité volontaire, dans un souci écologique ou pour des raisons plus matérialistes. Une tendance qui est surtout fondée sur le manque de confiance dans l’avenir et la crise de la transmission. Entretien.
| Un monde inhabitable, le souci du pouvoir d’achat, la maternité comme aliénation, autant de raisons invoquées pour ne pas enfanter. Dans quelle mesure l’argument écologique des « No Kids » porte-il dans l’explication de la baisse de la natalité ? Comment cela se vérifie-t-il ?
Il faut revenir à l’origine du mouvement « No Kids ». Ce label a été fondé en 2010 par Lisa Hymas, sous le nom de « GINK » pour Green Inclination No Kids, littéralement « engagement vert, pas d’enfants ». Leur slogan : « Si tu aimes les enfants, ne les mets pas au monde, c’est une poubelle. » J’ai interrogé sa fondatrice, qui vit à Seattle, par écrans interposés. Elle m’a confié sans concession s’être servie de la question écologique pour faire avancer les revendications « childfree» (« sans enfants par choix ») dans le débat public américain. Un argument vertueux qui aurait permis d’assumer plus facilement son choix de ne pas engendrer. Selon l’Ifop, 24 % des Français se disent influencés par le réchauffement climatique dans leur décision d’enfanter (parmi ceux qui ont répondu positivement au sondage, 38 % ont entre 18 et 25 ans). Et 42 % des femmes de moins de 35 ans déclarent que la crise climatique pèse sur leur désir d’enfant. Néanmoins, selon une étude du Crédoc de 2020, cette même classe d’âge, est celle qui consomme le plus. En résumé, il est plus concevable à une majorité des moins de 35 ans de ne pas enfanter que de cesser de prendre l’avion ou de changer ses habitudes alimentaires. Cela ne signifie pas que les No kids sont responsables de la baisse de la natalité. C’est bien plutôt une mentalité qui préside à cet hiver démographique : l’idéal de consommation qui constitue l’horizon de toute existence postmoderne, dans laquelle il semble inconcevable de vivre pour autre chose que pour son propre désir.