Au quotidien n°274 : Brassens, le latin et la modernité à l’heure anglo-saxonne

Publié le 21 Oct 2021
Au quotidien n°274 : Brassens, le latin et la modernité à l’heure anglo-saxonne L'Homme Nouveau

Reprenant la chanson de Brassens après l’application du nouveau rite de la messe, Benoît Duteurtre dans Marianne (15 octobre 2021) estime que l’Eglise n’a vraiment rien à gagner à courir après la modernisation…

Alors qu’on célèbre le centenaire de la naissance de Georges Brassens, j’ai réécouté avec délectation cette chanson extraite de son dernier album : Tempête dans un bénitier. Elle a non seulement la vigueur de ses meilleurs refrains (culminant dans un chœur avec ses copains qui l’avait beaucoup amusé lors de l’enregistrement) ; mais elle rappelle aussi qu’un artiste, même supposément anar et quelque peu « de gauche », n’entre pas forcément dans les cases où on voudrait l’enfermer. Pensez donc : quelques années après le concile Vatican II, censé faire entrer le catholicisme dans l’ère de la modernité, le sulfureux chanteur anticlérical semble presque regretter la messe traditionnelle, ses cantiques et ses psaumes chargés d’encens. Comme il le dit sans ambages : « Sans le latin, la messe nous emmerde », ou, encore plus crûment, « Le vin du sacré calice se change en eau de boudin ».

(…) Mais son oreille d’artiste souligne aussi que la liturgie, en balançant ses rituels séculaires pour les remplacer par des chants en langue moderne d’une affligeante banalité, apparaissait soudain terriblement creuse. (…)

Si toutefois j’évoque aujourd’hui cette chanson, c’est aussi pour souligner combien la question du latin contenait en germe les ennuis qui allaient accabler l’Église, dès l’instant où elle commencerait à vouloir se mettre à l’heure. Plus elle en fait, plus on lui reproche de ne pas en faire suffisamment pour épouser le mouvement de son époque. Après qu’un rapport a mis au jour les dérives sexuelles, certes abominables, d’une partie du clergé, voici venu l’assaut final de ceux qui veulent aller plus loin pour réformer cette religion dans tout ce qu’elle a encore de particulier. La frustration sexuelle du clergé fait des ravages ? Il faut en finir avec le célibat des prêtres ! La sexualité masculine entretient les pires pulsions ? Il importe de féminiser le clergé ! La loi du secret a régné pendant trop d’années ? Il faut abolir celui de la confession, élément constitutif du catholicisme dont la République s’accommodait jusque-là. Qu’en est-il d’ailleurs de cette obligation de dénoncer, qui se comprend pour certains crimes mais ne saurait remettre en question toute forme de confiance et de confidentialité ?

Complices de trop de turpitudes, les évêques doivent baisser la face. L’offensive entamée en Amérique du Nord ne cesse de s’étendre pour montrer partout l’Église romaine comme une entreprise tentaculaire de détournement. On la prie de s’aligner sur les mœurs anglo-saxonnes et protestantes avec leurs excuses publiques, leurs dédommagements financiers et leur progressisme sociétal qui, bientôt, conduira les militants à exiger un mariage religieux pour tous.

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