L’accord du Mercosur est dans l’actualité, mais aussi scandaleux soit-il, il n’est qu’un des nombreux problèmes auxquels font face les agriculteurs français. Depuis longtemps, des substances interdites en Europe sont utilisés pour les produits importés, les groupes français se développent en Afrique au détriment de nos paysans, les lois destinées à leur garantir un juste prix sont détournées…
Au début de l’année dernière, les manifestations agricoles récupérées par la FNSEA à laquelle la Coordination rurale a emboîté le pas ont montré à quel point le malaise paysan était profond. Le problème du revenu insuffisant a souvent été occulté, d’abord par les normes environnementales puis par l’accord du Mercosur.
Où se niche la souveraineté ?
Noémie Calais, éleveuse de porcs noirs dans le Gers, tenait une vivifiante tribune dans Libération du 7 mars 2024. Pour cette adepte de l’agriculture paysanne, « la souveraineté est déjà sous nos pieds » mais « elle est grevée par une mauvaise répartition de la valeur, captée par les marges de l’agro-industrie et de la grande distribution ». De son côté, Rémi Lacombe, vigneron du Médoc, faisait condamner le négociant Cordier, filiale du groupe coopératif In Vivo, par le tribunal de commerce de Bordeaux. À juste titre, celui-ci a considéré que du vin en vrac payé sur la base de 1 euro la bouteille devait être qualifié de prix abusivement bas, fait proscrit par la loi Egalim. Si un négociant ne peut échapper à cet article de loi concernant les prix abusivement bas, la Coopération agricole a obtenu d’en être exonérée, le 24 février 2021, grâce à un recours devant le Conseil d’État ! Toutefois, la question du prix de vente ne doit pas occulter les coûts de production. Ainsi, le coût élevé des approvisionnements explique en partie le manque de compétitivité de la « ferme France ». Or, concernant les produits de protection des plantes, les licites importations parallèles en provenance d’États membres aux tarifs moins élevés permettent des économies de 10 à 25 %. Quant aux tarifs des médicaments vétérinaires, beaucoup plus élevés en France qu’en Espagne, il en coûte 600 millions d’euros de plus pour la « ferme France », comme l’a montré l’association « Audace » qui défend la libre circulation de ces produits tout à fait légaux. La souveraineté consiste-t-elle à aller prendre des marchés sur le continent africain comme le suggérait Julien Denormandie le 16 mars 2024 à l’École supérieure des Agricultures…