Ecouter avec l’oreille du cœur

Publié le 02 Fév 2022
Ecouter avec l’oreille du cœur L'Homme Nouveau

Dans son message commémorant la 56ème journée mondiale des communications sociales le 22 janvier dernier, le Pape nous demander d’écouter : Dieu d’abord ; le prochain ensuite.

Pour écouter Dieu, il faut que règne en nous et aussi dans nos interlocuteurs un peu de calme, de tranquillité. Nous devons nous tenir éloignés de toute excitation ou nervosité menaçante, être nous-mêmes, seulement nous, rentrés en nous-mêmes ! Par conséquent le rendez-vous de l’écoute n’est pas en dehors, mais en nous-mêmes.

Écouter avec l’oreille du cœur, tel est le premier point de ce message et le thème principal. De fait, l’écoute n’est pas seulement le sens d’une perception acoustique, mais elle est essentiellement liée à la relation de dialogue : dialogue entre Dieu et l’humanité en premier lieu (Shema Israël) ; et ensuite entre les divers membres de la société humaine.

Pour bien écouter, nous devons nous rappeler le sens biblique du terme qui comprend plusieurs composantes. L’initiative revient à Dieu qui nous parle et à qui nous répondons en l’écoutant. L’écoute répond au style humble de Dieu. L’écoute biblique assume toutes les vertus qui doivent nous permettre de pratiquer les commandements et tout ce que nous avons entendu l’Esprit Saint nous suggérer. On remarquera qu’écoute, en latin auditio, a la même racine que obéir (obaudire). Celui qui écoute est celui qui a semé le bon grain dans la bonne terre pour récolter au centuple. Mais l’homme a tendance à se boucher les oreilles pour ne pas avoir à écouter. Et ce refus d’écouter finit souvent par devenir une agression envers l’autre, comme cela arriva aux auditeurs du diacre Étienne. L’écoute est au fond une dimension de l’amour. Jésus appelle donc ses disciples à vérifier la qualité de leur écoute.

En second lieu, le Pape analyse l’écoute comme condition indispensable de la bonne compréhension d’autrui. Il existe un usage de l’ouïe qui n’est pas une véritable écoute, mais son contraire : écouter en secret. C’est la tentation actuelle, à l’ère du Web, d’écouter pour espionner, instrumentalisant ainsi les autres à notre profit. Au contraire, ce qui rend la communication bonne et pleinement humaine, c’est précisément l’écoute de la personne. Mais au lieu de nous écouter les uns les autres, nous parlons dans le dos des autres. Une fois de plus le Pape condamne à juste titre le commérage, si dommageable à l’âme. Plutôt que de rechercher la vérité et le bien, nous recherchons le consensus, pour ne pas aller à contre courant et pour demeurer politiquement et socialement correct. Pourquoi affronter la difficulté de l’écoute ? Cela nous serait trop nuisible. Le cardinal Casaroli parlait du martyre de la patience, nécessaire pour écouter et se faire entendre dans les négociations avec les interlocuteurs. La capacité d’écouter est plus précieuse que jamais en cette époque de pandémie.

Enfin le Pape aborde le troisième point. : le besoin d’écouter dans l’Église. Dans l’Église, il y a un besoin urgent d’écouter et de s’écouter, mais à travers l’oreille de Dieu. Ainsi, nous pouvons redécouvrir une Église symphonique dans laquelle chacun est en mesure de chanter avec sa propre voix, tout en accueillant celle des autres comme un don, pour manifester l’harmonie de l’ensemble que l’Esprit Saint compose.

Marie la silencieuse, elle qui gardait tout dans son cœur, fut un modèle indépassable d’écoute. Notre époque a besoin de redécouvrir la fécondité du silence, pour surmonter la dissipation due aux sons, aux images, aux bavardages qui empêchent trop souvent d’entendre la voix de Dieu.

Ce contenu pourrait vous intéresser

A la uneEgliseTribune libre

Benoît XVI et François : deux lectures du Maître de la Terre de Benson, deux pontificats, deux églises ? (2/3)

Une volonté farouche de changer de paradigme (2/3) | Tout d’abord, et en amont de l’élection, la volonté farouche de changement de ceux qui ont préparé le règne. En 2007 paraissait un livre très éclairant et remarquablement conçu dans la plus pure tradition de la manipulation de l’opinion. La thèse de ce livre-programme qui devait se révéler prophétique peut se résumer ainsi : l’Église, depuis Constantin et avec pertinacité, s’est éloignée du message évangélique. Ce phénomène s’accentue à partir de la Renaissance quand l’Église s’entête de plus en plus en s’opposant à la modernité. Constatant au XXe siècle que des génocides ont été perpétrés dans des pays chrétiens (Allemagne, Rwanda), il faut en tirer la conclusion que cette manière ancienne d’être chrétien était fausse et qu’il faut refuser les préoccupations dérisoires que sont la connaissance de la foi, le nombre d’entrées au séminaire ou de sacrements célébrés, car tout cela détourne de l’essentiel qui consiste à apporter davantage d’humanité.

+

pape François synode
A la uneEgliseTribune libreLectures

Benoît XVI et François : deux lectures du Maître de la Terre de Benson, deux pontificats, deux églises ? (1/3)

Nous nous interrogions en 2019 (1) sur le regard porté par Benoît XVI et François sur ce roman d’anticipation de tout premier rang qu’est Le Maître de la Terre de Benson. Plus personne (plus personne de sain d’esprit en tous cas) ne prétend à présent à la continuité entre les deux pontificats. Leurs ambitions, leurs idées, leurs spiritualités, leurs tempéraments que tout oppose trouveraient dans ce livre un point commun ? Non, décidément nous ne parvenons pas à comprendre. Si les deux pontifes ont recommandé ce livre puissant, les motifs en sont forcément différents. 

+

François maitre de la terre Benson
A la uneEgliseMagistère

La loi naturelle, une herméneutique à contextualiser ?

L'Essentiel de Thibaud Collin | Le récent ouvrage de Mgr Livio Melina, Le discernement dans la vie conjugale, définit la loi morale comme une lumière sur le vrai bien, contre un paradigme, défendu par Karl Rahner et la cardinal Kasper, qui, sous couleur de pastorale et en tordant la notion de discernement, la présente comme inapplicable.

+

LOI NATURELLE Livio Melina
EgliseLiturgie

L’Ascension du Christ est notre propre élévation

L'esprit de la liturgie | Jésus montant au ciel est cause de joie pour les apôtres car, avec lui, la nature humaine est élevé à une dignité plus haute et « la captivité est emmenée captive ». Et leur égarement ne durera pas puisqu’il leur a promis le Consolateur.

+

ascension
A la uneEgliseDoctrine socialeMagistère

Dignitas infinita, quels fondements philosophiques ?

Entretien | La dernière déclaration du Dicastère pour la Doctrine de la Foi, Dignitas infinita, datée du 2 avril 2024, revient sur la dignité et sur les droits de la personne humaine. Le texte fait référence à la Déclaration des droits de l’homme de 1948 et s’appuie sur le personnalisme catholique développé au XXe siècle. Explication par Guilhem Golfin, docteur en philosophie et professeur à Paris, contributeur de l’ouvrage La Dignité humaine. Heurs et malheurs d’un concept maltraité. 

+

Dignitas infinita
A la uneEgliseEglise de France

Mobilisation pour le maintien de la Tradition en Finistère : « Nous ne comprenons pas les raisons de cette expulsion »

Entretien avec Joseph, membre de l’organisation de la mobilisation pour le maintien de la tradition dans le Finistère. Deux prêtres de la Fraternité Saint-Pierre ont été expulsés sans explications. Pour les fidèles, cette situation est à la fois inexplicable et injuste. La Fraternité Saint-Pierre est un institut sacerdotal fondé en 1988 et dont les statuts ont été approuvés par le Pape François en 2022. Ces deux prêtres en sont membres.  

+

tradition Finistère