L’encylique du pape et le dernier livre de l’Homme Nouveau

Publié le 08 Juil 2009
L'encylique du pape et le dernier livre de l'Homme Nouveau L'Homme Nouveau

Y a-t-il un lien entre le dernier livre publié par les éditions de l’Homme Nouveau et la parution de la troisième encyclique du pape Benoît XVI : « Caritas in veritate » (La charité dans la vérité). D’une hauteur de vue bien à l’image de son auteur, se fondant sur le rappel théologique des liens intrinsèques entre la charité et la vérité, cette encyclique réactualise la doctrine sociale de l’Église, en prenant à bras le corps les problèmes nouveaux posés dans le cadre de la mondialisation. Prudent, évitant de choquer un auditoire avide d’images chocs et de formule à l’emporte-pièce, le seul laïc admis à présenter le texte du pape lors de la conférence de presse, le professeur Stefano Zamagni de l’université de Bologne a tenu à préciser que « Non, ce n’est pas une encyclique anticapitaliste ». Preuve hautement paradoxale que certains passages de ce texte très riche pourraient le laisser penser…

On donnera raison au professeur Zamagni, car comme l’explique Chesterton en introduction de son livre Outline of sanity, traduit en français, de manière un peu paradoxale, bien dans le ton de l’auteur, par Plaidoyer pour une propriété anticapitaliste, ce terme de capitaliste est devenu polysémique et exige d’être très précisément défini. Or, Chesterton le fait remarquer : « une société de capitalistes ne contient pas trop de capitalistes, mais trop peu ».

Il ne s’agit pas ici de résumer cette nouvelle encyclique. Force est de constater pourtant que la pensée distributiste de Chesterton et de Belloc ne peut que se trouver encourager à poursuivre ses efforts et son actualisation par ce texte papal. Dans ce sens, la publication pour la première fois en langue française du Plaidoyer pour une propriété anticapitaliste s’inscrit directement dans l’effort de réflexion auquel le pape invite les catholiques.

Quand il souligne que la question sociale et économique est morale et repose fondamentalement sur une vision anthropologique ; quand il critique les effets de l’économie uniquement spéculative ; quand il constate que « le marché n’arrive pas à produire la cohésion sociale » ou que « l’activité économique ne peut résoudre tous les problèmes sociaux » ; quand il rappelle la nécessité de ne pas séparer l’agir économique de l’agir politique ou quand il évoque l’idée de « subsidiarité fiscale », il est certain que la doctrine chestertonienne entre en harmonie avec le discours du pape comme elle l’était déjà à l’époque de la parution de Centesimus annus de Jean-Paul II. À ceux qui s’en étonneraient, il faut les inviter à lire le Plaidoyer pour une propriété anticapitaliste qui d’une autre manière, sans la même autorité, et dans un contexte historique différent, repose sur les mêmes principes d’analyse.

Aux États-Unis, les commentateurs le constatent déjà, notant le regain de vigueur du courant distributiste. Ainsi, par exemple, Kevin Michael Derby, sur Examiner.com, s’en prend au catho-con (catholiques conservateurs soutenant le courant néo-conservateur) et montre le lien entre la nouvelle encyclique et le travail des distributistes. À Oxford, samedi prochain, la rencontre sur la pensée de Chesterton face à la crise économique actuelle ne pourra que se trouver encouragée par l’apport de la nouvelle encyclique.

Ce contenu pourrait vous intéresser

A la uneEgliseLettre Reconstruire

Les papes et le principe de subsidiarité (V)

« Question de Principe » | Comment évoquer le principe de subsidiarité dans l’enseignement pontifical sans parler du magistère de Jean-Paul II sur la question ? Auteur de trois encycliques sociales, il est aussi à l’origine du Compendium de la doctrine sociale de l’Église. Paru dans la Lettre Reconstruire n°35 (avril 2024).

+

principe de subsidiarité
A la uneSociétéLettre Reconstruire

L’Église face au socialisme (II)

Lettre Reconstruire n°35 (avril 2024) | Dans la série de ses études synthétiques sur les idéologies modernes, Carlos Sacheri aborde le socialisme et le jugement de l’Église sur cette réaction aux injustices sociales nées du libéralisme économique. Il présente ici les points communs à toutes les idéologies socialistes.

+

socialisme
A la uneÉditorialDoctrine socialeLettre Reconstruire

Subsidiarité et bien commun

Édito de la Lettre Reconstruire n°35 | Ce nouveau numéro de Reconstruire continue, à travers la rubrique « Questions de principe », à aborder l’enseignement pontifical à propos de la subsidiarité. Formulé scientifiquement par Pie XI, mais déjà présent chez Léon XIII, le principe de subsidiarité n’a cessé de prendre une place grandissante dans le corpus social catholique. Au point, comme nous le soulignons dans ce même numéro, d’être introduit indirectement dans le nouveau Code de droit canonique (1983) et donc dans la vie de l’Église elle-même.

+

subsidiarité bien commun
SociétéLectures

L’inégalité, un outil de civilisation ?

Entretien | Juriste et historien, Jean-Louis Harouel s’attaque dans un livre récemment paru au mythe de l’égalité. Il postule que cette « passion laide » contemporaine, destructrice de la famille, entre autres, ne sert en rien les intérêts d’une population, en montrant que seule l’inégalité, créatrice de richesses, encourage la production et par là-même augmente le niveau de vie et conditionne le progrès moral et scientifique. Entretien avec Jean-Louis Harouel sur son livre Les Mensonges de l’égalité. Ce mal qui ronge la France et l’Occident.

+

égalité mythe