Dans la culture ambiante, la révolte du mouton

Publié le 09 Déc 2011
 Dans la culture ambiante, la révolte du mouton L'Homme Nouveau

Jeudi soir, en la fête de l’Immaculée Conception, s’est déroulée une veillée de prière à Notre-Dame de Paris, à l’appel du cardinal archevêque de Paris pour prier en réparation des blasphèmes portés par la pièce de Rodrigo Garcia, Gólgota Picnic. Auparavant, à l’appel de Frigide Barjot, Thibaut Dary et Jehan de Chaillé, des chrétiens ont déposé des fleurs blanches devant le théâtre où se joue la pièce. À l’appel de Civitas, d’autres chrétiens ont aussi prié devant le théâtre et une grande manifestation est organisée dimanche 11 décembre à Paris. Cinquante-cinq parlementaires ont dénoncé de leur côté les subventions publiques accordées aux théâtres produisant ce type de pièce et salué ceux qui « ont le mérite de réveiller une certaine apathie chez nos concitoyens qui, tout en étant d’accord avec eux, n’osent pas réagir, terrorisés par l’opinion médiatique qui les ferait passer pour des « fondamentalistes chrétiens » ». Le 8 novembre dernier, les responsables du portail Riposte Catholique écrivaient une lettre ouverte au directeur du Théâtre 14 qui allait faire rejouer la pièce Le Vicaire de Rolf Hochhuth contre Pie XII alors que son auteur a non seulement travesti la réalité historique mais est aussi un négationniste notoire.

 De Castullecci à Gólgota Picnic en passant par Le Vicaire ou les dessins insultants de Charlie hebdo, et quelque soient les degrés exacts d’anti-christianisme de chacun de ces événements pris en eux-mêmes, un fait imposant, un fait massif apparaît : l’installation d’un climat de dérision à l’égard du Christ et de son Église, climat qui distille à sa manière une haine contre le Christ. Chacune de ces manifestations ne constitue pas un phénomène isolé, mais s’inscrit dans une attaque généralisée du christianisme et donc de son divin fondateur.

Il n’est nul besoin de recourir à une quelconque théorie du complot ni d’imaginer que certains tirent les fils par derrière. Le complot n’est pas nécessaire ; les commanditaires n’ont pas à être rêvés. La culture ambiante permet à elle seule de se moquer du christianisme. La culture de l’enfouissement et le refus de la mission explicite de la part des catholiques – de notre part – ont permis que nous passions peu à peu d’une absence de pratique religieuse réelle à un désintérêt à l’égard du christianisme puis à l’exposition publique de son refus et d’une haine à son égard.

L’inattendu dans ce climat fut que les moutons n’étaient pas décidés à se laisser tondre en toute tranquillité. La révolte du mouton suscite toujours le scandale car elle n’est pas dans l’ordre. Certes le troupeau a été divisé dans ses réactions et dans ses contre-propositions. Mais c’est qu’il apprend à son tour à se débarrasser petit à petit de ce réflexe néo-kantien justement dénoncé par Michel De Jaeghere, lequel consiste à « vouloir à tout prix que sur tous les sujets, il y ait une réponse unique – bien entendu, la nôtre – et de faire d’elle une loi générale et universelle ».

Une grande partie de la culture ambiante crée un climat constant d’opposition au christianisme et au Christ. Elle n’évalue pas dans quelle mesure ni à quel degré telle pièce, tel livre, tel auteur ou tel dessin sont réellement, implicitement ou explicitement, anti-chrétiens. Elle fait feu de tout bois. Le climat compte davantage que l’œuvre elle-même. En tant que chrétiens, nous ne sommes pas nous-mêmes des critiques d’œuvres culturelles. En revanche, nous sommes bien plongés dans ce climat qui est celui de notre société. Que nous le voulions ou non, nous sommes dans le monde et nous ne pouvons accepter que le climat ambiant bafoue Jésus-Christ et son Église.

Seulement, notre réponse doit être chrétienne et cette réponse chrétienne n’est certainement pas univoque. La pire réussite du Diviseur serait bien de parvenir à nous diviser toujours davantage. Car non seulement il faut continuer à dénoncer le caractère malsain et insultant de cette succession d’événements culturels contre le Christ et son Église, mais il faut continuer aussi à nous occuper des pauvres et des malheureux, de ceux qui sont dans la rue et de ceux qui sont dans le ventre de leur mère, de ceux que l’on persécute physiquement et de ceux qui sont les laissés-pour-compte d’une société d’hyper-consommation. Que nous le voulions ou non, nous sommes contraints à l’inconfort de répondre chrétiennement à un monde qui ne l’est plus. Et qui a décidé de le manifester le plus souvent possible. Nous ne sommes pas plus grands que notre Maître. Il a été écartelé sur le bois de la croix et Il est né dans la mangeoire d’une crèche. Nous vivons dans un temps où la grâce qui nous est faite est de lui ressembler dans notre pauvreté même. 

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