Voici enfin venu le temps des grandes vacances. Occasion d’un repos bien mérité, de retrouvailles familiales ou amicales, elles peuvent aussi devenir une ornière pour la vie spirituelle.
Cartables rangés, ordinateurs fermés, examens terminés, dernier chantier achevé, s’ouvre le temps des vacances estivales. Le rythme effréné de l’année cède la place à une inaction soudaine. Il convient d’en profiter pour refaire ses forces physiques et morales. Cependant, il importe tout autant de veiller à ce que la nécessaire détente ne devienne pas, sous l’impulsion de notre nature complice, un relâchement coupable.
En effet, la théologie nous enseigne que le mal n’a pas d’existence en tant que tel, mais est une absence de bien. Or la rupture soudaine de notre routine et les heures de loisir qui en découlent, peuvent parfois mener à une oisiveté bien dangereuse. Pas de remède plus simple ni plus efficace que de remplir utilement ce temps. Ainsi l’été apparaît comme le moment le plus opportun pour consacrer davantage de temps au Bon Dieu et à notre vie spirituelle.
Un peu de français
Etymologiquement, le mot « vacance » vient du latin « vacare » : être libre, inoccupé ; il désigne par exemple l’état du siège apostolique entre la mort d’un pape et l’élection de son successeur. Il a donné le verbe « vaquer » qui, après avoir désigné le fait d’être inoccupé a progressivement muté pour signifier que l’on s’occupe à faire quelque chose.
Il est très lié au mot « loisir », c’est-à-dire au temps libre pendant lequel on peut faire une autre activité que celles qui sont imposées. On l’utilise aussi souvent au pluriel pour parler de ces dernières. S. Thomas d’Aquin aborde d’ailleurs ce sujet dans la Somme de Théologie (2a 2ae, Q. 168, article 2, Peut-il y avoir une vertu à jouer ?)
« La vertu qu’on appelle eutrapélie a pour objet les jeux et les plaisanteries qui sont quelquefois utiles pour le délassement de l’esprit. L’homme a besoin d’un repos corporel pour ranimer ses forces, parce qu’il ne peut pas travailler continuellement, n’ayant qu’une force limitée qui est proportionnée à une certaine fatigue. »
Dans l’esprit du Docteur Commun l’absence d’occupation n’est pas une fin en soi mais une préparation à l’action vertueuse. Il ne s’agit donc pas de licence de mœurs mais de liberté pour refaire ses forces. Comme le militaire dont les permissions augmentent considérablement la capacité de résilience.
Quelques écueils à éviter
L’être humain bien que possédant une âme libre et rationnelle est, comme tous les animaux, extrêmement tributaire de ses habitudes et de son environnement. Autrement dit, l’absence des habitudes quotidienne risque de déstructurer l’ensemble de la vie.
C’est pourquoi il importe de maintenir un rituel quotidien, à travers les prières du matin et du soir ou les repas à table. On touche ici à la règle de vie. Elle constitue un bon moyen pour ne pas se relâcher complètement. En outre, au plan strictement naturel, en imposant un rythme régulier d’horaires de coucher et de lever, elle favorise le sommeil et la récupération.
Les vacances sont aussi fréquemment marquées par l’augmentation des tentations. L’oisiveté guette et le diable le sait bien. Ses proies ne seront plus distraites de ses sollicitations par leurs travaux annuels. C’est pourquoi il importe de cultiver pendant cette période de saines occupations.
Un autre point d’attention qui bascule rapidement vers le relâchement se trouve dans la manière de se tenir. Les vacances sont souvent synonyme de mollesse et de paresse. Depuis la tenue à table jusqu’aux vêtements de la messe dominicale. Veiller à ces petites choses permet de garder une certaine vigilance afin d’éviter de sombrer dans le laisser aller et la nonchalance.
Dans la même veine, les commandements de Dieu continuent de s’appliquer pendant les vacances. La plus grande satisfaction des sens obtenue grâce au sommeil, à de meilleurs repas que l’on a le temps de préparer, ne doit pas diminuer la vigilance sur la vertu de chasteté, tant dans le regard masculin, que dans la décence du vêtement féminin. A titre d’exemple, les plages sont souvent très dangereuses pour les âmes, jeunes et moins jeunes. Choisir un lieu peu fréquenté et porter une robe de plage dès que l’on est hors de l’eau sont des moyens tous simples d’y remédier.
Pistes pour un été fervent
Il est temps maintenant d’aborder des perspectives plus positives. Les vacances donnent du temps. Ressource qui fait cruellement défaut de septembre à juin.
Or ainsi que le dit saint François de Sales, « Il n’y a point d’horloge, pour bonne qu’elle soit, qu’il ne faille remonter deux fois le jour ; et puis, outre cela, il faut qu’au moins une fois l’année, l’on la démonte de toutes pièces, pour ôter les rouillures qu’elle aura contractées, redresser les pièces forcées et réparer celles qui sont usées. Ainsi celui qui a un vrai soin de son cœur, doit le remonter en Dieu au soir et au matin […] ; et outre cela, il doit plusieurs fois considérer son état, le redresser et accommoder ; et enfin, au moins une fois l’année, il le doit démonter, et regarder par le menu toutes les pièces, c’est-à-dire toutes les affections et passions d’icelui, afin de réparer tous les défauts qui y peuvent être. Et comme l’horloger oint avec quelque huile délicate les roues, les ressorts et tous les mouvants de son horloge, afin que les mouvements se fassent plus doucement et qu’il soit moins sujet à la rouillure, ainsi la personne dévote, après la pratique de ce démontement de son cœur, pour le bien renouveler, le doit oindre par les sacrements de confession et de l’Eucharistie. Cet exercice réparera vos forces abattues par le temps, échauffera votre cœur, fera reverdir vos bons propos et refleurir les vertus de votre esprit. »
Les vacances donnent opportunément le temps d’effectuer une bonne retraite ou au moins de bien préparer la confession mensuelle ou d’assister à la messe en semaine afin de recevoir plus régulièrement la Sainte Eucharistie.
En outre, ce peut être l’occasion d’instaurer la pratique du chapelet quotidien, seul ou famille. Par ailleurs, on occupe aisément les journées, pour joindre l’utile à l’agréable, en programmant de petits pèlerinages aux différents sanctuaires dont la France fourmille. Souvent inconnus, c’est l’occasion de les faire revivre le temps d’une journée et de profiter des nombreuses grâces qu’ils recèlent.
Enfin, par-dessus tout, il restera toujours quelques obligations quotidiennes qui permettront d’accomplir parfaitement le devoir d’état et de se sanctifier au jour le jour. Ainsi les vacances, de potentielle triangle des bermudes de la vie spirituelle deviendront un tremplin vers le Ciel.
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