Jeanne d’Arc et les jeux vidéos

Publié le 09 Fév 2024
jeanne d'arc jeux vidéo
À l’occasion de la sortie de notre dernier hors-série Jeanne d’Arc, une jeune sainte pour notre temps (n°54-55), voici une revue des divers jeux vidéos existants autour du personnage de Jeanne d’Arc. Dans la plupart de ces jeux, Jeanne est présentée plus comme chef de combat que comme sainte, et le contexte y est violent.

 

Les jeux vidéo ont vu leur apparition en 1958. Dans un jeu vidéo tout se passe sur un écran où les joueurs interagissent derrière leurs ordinateurs ou leurs consoles. Ces jeux ne cessent d’évoluer et de se perfectionner. Grâce à eux il est possible désormais de découvrir l’histoire de Jeanne d’Arc, les personnages qui l’ont côtoyée et les espaces qu’elle a parcourus ; surtout, par les interactions de ces jeux, on peut agir magiquement dans ce XVe siècle apparemment si lointain, mais désormais présent.

On peut même, qui sait, modifier le destin. Jeanne est devenue un sujet important des jeux vidéo américains et japonais, pour le meilleur et pour le pire. Qu’on en juge par cette petite revue !

Évoquons d’abord un jeu qui est paru en 1988 : c’est « Joan of Arc: Siege and the Sword (le siège et l’épée) ». C’est un bon jeu de stratégie pour commencer à apprendre l’histoire de Jeanne d’Arc. Il s’agit de commander une armée française et de livrer des batailles pour le compte du Roi de France Charles VII. Il faut anéantir et pousser hors de France les Anglais qui l’occupent. Pour poursuivre l’évolution de cette épopée, il faut apprendre l’histoire de Jeanne d’Arc. 

En effet le jeu suivant sorti en 1992 « World of Heroes (le monde des Héros) » abandonne totalement l’aspect historique pour se concentrer sur une Jeanne d’Arc combattante. On oublie les Anglais et la mission de Jeanne (sauver la France). Reste seulement Jeanne, l’héroïne combattante. Un scientifique, le Dr Brown a créé une machine à remonter le temps et organise un tournoi où les meilleurs combattants de chaque époque historique (Raspoutine, Jeanne d’Arc, Jack l’Éventreur, un shogun japonais, un combattant mongol) s’affrontent.

Ce jeu est un jeu pour les non-bilingues. Car il n’y a pas de dialogue. Il ne s’agit pas de penser ou réfléchir, mais de se battre, de frapper, de tuer. On apprend au passage que Jeanne d’Arc, la seule femme, parmi ces monstres combattants, cherche un mari particulièrement valeureux.

Passons à un jeu qui a marqué les esprits en 1997, et c’est bien évidemment : « Age of Empires (l’Âge des Empires) ». C’est une franchise très connue par la génération qui a découvert les tout premiers jeux vidéo. C’est un jeu de stratégie en temps réel.

Le but du jeu est de créer et de développer une civilisation (occidentale, arabo-musulmane, asiatique ou encore amérindienne), puis de détruire les civilisations adverses. Plusieurs moyens s’offrent aux participants, notamment la déforestation ; mais on peut aussi nuire à la faune et détruire la chaîne alimentaire. On peut aussi épuiser les ressources minières. Une fois l’acquisition des ressources faites, on développe sa puissance, sans respect de l’environnement : le peuple ne se rebelle pas car il aime être exploité.

Ce jeu violent permet de massacrer, avec simplement l’embarras du choix sur la manière de tuer, à cheval ou encore à distance, ou tout simplement au corps à corps! Et dans la version IV de 2021, on peut exécuter Jeanne d’Arc à l’occasion de ses campagnes militaires, notamment contre les Bourguignons ; pendant des décennies, les ducs de Bourgogne ont été impliqués dans une lutte sanglante pour le contrôle d’un roi de France devenu fou, en tirant parti de leur ruse, de leurs prouesses militaires et de leur immense fortune. Mais ils payent pour le sang qu’ils répandent avec leur propre sang.

De plus, il est aussi possible dans ce jeu d’être Jeanne d’Arc dans sa campagne militaire (1428-1431) ; la guerre fait rage depuis cent ans et les Français, épuisés, ont perdu presque toutes les batailles. L’héritier du trône français est trop lâche pour vouloir y accéder. Bientôt, les Anglais et leurs alliés en Bourgogne auront conquis tout le pays. Mais, à l’heure la plus sombre, une jeune paysanne déclare qu’elle a l’intention de sauver la France. Il est alors possible de créer sa propre histoire et ses propres batailles, et cela grâce à l’éditeur de niveau.

Pour découvrir une Jeanne moins militaire et plus spirituelle, on peut rejoindre son ordre religieux et militaire avec le jeu «La Pucelle : Tactics (La Pucelle : tactiques)» sorti en 2002. C’est un jeu de stratégie au tour par tour, en 3D isométrique (en perspective).

Il s’agit de nettoyer et purifier la terre des hérésies, en combattant des démons. Les personnages Prier et son frère Culotte sont novices au sein de l’organisation de chasse aux démons, créée par Jeanne. Ils sont donc inexpérimentés et susceptibles de faire des bavures. Ils viennent de passer leurs examens finaux et sont prêts à combattre l’hérésie, mais se retrouvent rapidement mêlés à une série de complots orchestrés par une église rivale aux sombres intentions.

Le jeu se déroule sur une carte tactique, et des équipes de six personnages au maximum s’efforcent de débarrasser le terrain des ennemis et de l’énergie noire. Une fois le meurtre accompli, il faut détruire les traces et les preuves, être méticuleux et malicieux. Beaucoup des personnages sont des femmes qui sont de véritables terreurs pour leurs ennemis. Et Jeanne d’Arc ? Elle n’existe pas vraiment dans le jeu, mais les personnages incarnent son ordre et ses principes ! 

Retour en 2004 pour une Jeanne d’Arc militaire avec «Wars and Warriors: Joan of Arc (Guerres et Héros : Jeanne d’Arc)». On peut incarner Jeanne d’Arc et tous ses compagnons de voyage et bien entendu : Jean II duc d’Alençon, La Hire, etc. Ils partent sauver la France. C’est un jeu de combat à progression, en langage simple, le jeu consiste à combattre les armées anglaises. Il permet de contrôler les personnages, dont Jeanne d’Arc. Cette progression est marquée par des améliorations des personnages afin d’effectuer des faits d’armes de plus en plus performants.

Un jeu de 2006, intitulé sobrement « Jeanne d’Arc », utilise des éléments fantastiques. L’armée anglaise a été manipulée par des démons qui dans un passé lointain avaient combattu les humains. C’est alors qu’une villageoise, Jeanne, est interpellée par une voix du paradis pour sauver la France. Ainsi commence la campagne de Jeanne d’Arc et de ses amis Roger et Liane, pour libérer la France de la tyrannie des armées anglaises. Pour sauver la France, il faut purifier par le feu les Anglais.

C’est un jeu de stratégie. Le joueur peut visiter différentes villes de France et améliorer ses armes et ses armures. Elles permettent bien évidemment de faire de plus en plus de mal. Avant le début de la bataille, le joueur sélectionne l’équipement avec lequel il veut affronter son adversaire. Au sein de chaque tour, pour chaque personnage, le joueur peut effectuer une action comme attaquer, utiliser une arme bien particulière, notamment celle des flammes purificatrices.

Dans la même veine fantastique, mais en beaucoup plus complexe et ambitieux, «Fate/Grand Order (Destin/Grand Ordre)» est né en 2015. C’est un jeu de rôle, gratuit et en ligne. La survie de l’humanité est en jeu à brève échéance. Pour la sauver de l’extinction, il faut remonter le temps et parcourir maintes civilisations. Les héros sont des Experts qui disposent de Servants aux compétences variées pour mener à bien leurs différentes missions. Jeanne d’Arc est l’une de ces Servantes.

Enfin, un des jeux vidéos les plus célèbres et parfois utilisés par les professeurs d’histoire, «Assassin’s Creed ( La guilde des assassins)». Dans l’épisode «Rogue (Voyou)» en 2014, qui oppose précisément les Assassins et les Templiers pour le contrôle de l’humanité, bien des époques historiques sont mentionnées. Jeanne d’Arc est mentionnée dans une mission appelée « Les Chemins de l’innocence » où le joueur peut interagir avec elle durant la bataille de Paris en 1429.

Son rôle est mineur : ses voix sont rappelées, ainsi que ses qualités militaires. Elle ne finit pas brûlée sur le bûcher par les Templiers, car ses compagnons Assassins lui substituent une autre victime. Elle finit d’ailleurs par épouser l’un de ses compagnons et devient mère de famille.

Nous avons vu à travers ces différents jeux beaucoup de représentations différentes de Jeanne d’Arc, sans véritable souci de vérité historique et spirituelle. Certes la Jeanne d’Arc, chef militaire et combattante, est largement majoritaire ; mais trop souvent elle agit avec brutalité et violence, comme si elle était sans foi ni loi.

On peut découvrir parfois une Jeanne pieuse, et souvent une Jeanne fantastique dotée de pouvoirs maléfiques telle une sorcière. Il y a même des échos aux thèses survivantistes (Jeanne ne serait pas morte en 1431). En fait tous ces jeux en disent plus sur leurs auteurs et les joueurs (bref sur notre époque) que sur Jeanne elle-même.

Est-elle honorée par ces jeux ou dégradent-ils son image ? En tout cas, Jeanne ne cesse de fasciner. 

 

>> à lire également : Enseignement catholique (4/4) : Héritages et trésors de l’éducation chrétienne

Jean-Baptiste Sardet

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