Comme chaque année depuis 7 ans, L’Homme Nouveau a lancé son concours d’écriture Jeunes Talents 2024 entre avril et juin. Cette année, le thème était : « Après la guérison de son serviteur par Jésus, que devient le Centurion de l’Évangile ? »
Nous publions ici les écrits que nous avons reçus. Les trois lauréats sont aussi publiés dans le numéro d’été (n° 1812), daté du 27 juillet.
Retrouvez toutes les productions dans le dossier thématique Concours Jeunes Talents 2024.
Le départ de Maximus
Un texte de Marie-Bé
Le service du centurion Maximus dans l’armée romaine s’achève enfin. Il quitte demain à l’aube Capharnaüm avec sa famille pour Césarée d’où ils embarqueront. Il aura passé ces cinq dernières années à veiller au bon ordre de la ville. Il allait souvent aussi à Jérusalem où était installée la légion à laquelle il était rattaché. Sa première mission eut lieu en Syrie. Il y construisit une famille ; sont nés deux beaux garçons et une gracieuse petite fille.
Une fête d’adieu s’est déroulée la semaine passée en son honneur. Que de liens tissés avec les habitants ! Maximus y avait des amis et respectait le peuple juif et ses traditions. Mais la venue de Jésus le Nazaréen a bouleversé sa vie. Tant qu’il le pouvait, il s’informait de ce que Jésus disait et des merveilles qu’il accomplissait. Lui- même, un païen indigne de s’approcher de lui a reçu cette immense faveur qu’il guérisse son fils aîné. C’était il y a deux ans. Depuis, il n’y a pas un jour sans qu’il ne pense à ce seigneur qui a sauvé son enfant. Comment le remercier ? Maximus aurait aimé revoir Jésus avant son départ. Mais le Seigneur se cachait de plus en plus dans Jérusalem car il avait des ennemis. Depuis que Maximus sait que Jésus y est entré ouvertement pour la fête de la Pâque et qu’il a été acclamé roi, une lourde angoisse l’oppresse.
Les gros bagages sont déjà arrivés à Césarée. Dans la maison, Il n’y a plus l’agitation de ces derniers jours. Ce soir, tout est en ordre. Il réunit pour la dernière fois sa famille dans l’atrium. Maximus, silencieux, se souvient des moments passés ici avec cette femme qu’il affectionne et ses enfants. De retour chez lui, il l’épousera et s’installera dans la belle campagne près de Massalia.
C’est le départ. Toute la famille monte dans une reda tirée par deux robustes chevaux. Elle n’est pas seule sur la route. Un petit convoi se constitue, formé de quelques charrettes de marchands et d’une troupe de légionnaires. Une soixantaine de milles sépare Capharnaüm de Césarée. En comptant trois jours de voyage, ils devraient arriver vendredi avant que le sabbat ne commence.
Les deux premiers jours se sont passés sans encombre. Vendredi, il ne reste plus que seize milles à parcourir.
Durant le trajet, Maximus pense à Jésus le Nazaréen. L’aurait-il défendu face à ses ennemis ? Lui, un soldat romain, un païen, aurait-il pu vraiment l’aider ? Son fils aîné déjà âgé de seize ans devine la pensée de son père. Pour lui aussi, Jésus est son sauveur et son seigneur.
La reda avance à bonne allure. Maximus se rappelle le jour où il a croisé Jésus pour la dernière fois. Le Seigneur, alors, partait d’un pas résolu avec ses disciples en direction de Jérusalem.
La reda poursuit aujourd’hui seule la route, escortée de trois légionnaires. Maximus est anxieux. Ils ne sont pas à l’abri d’attaques de brigands. Heureusement, ses deux fidèles serviteurs les accompagnent. Mais bientôt, l’air devient pesant et presque irrespirable. Le ciel s’assombrit ; les nuages s’amoncellent. Le soleil se cache et l’obscurité s’intensifie. Tout paraît immobile. Les arbres frémissent de frayeur. Quelques plaintes du vent arrivent jusqu’aux oreilles des voyageurs. On aurait dit des sanglots. Des oiseaux laissent échapper encore quelques notes puis se taisent les uns après les autres. Seule la course de la diligence rompt avec la nature qui semble mourir. Les chevaux de plus en plus nerveux commencent à se cabrer. Il faut s’arrêter.
La reda est rangée sur le côté de la route. Le cocher et les légionnaires essaient de calmer les chevaux. De mémoire d’homme, Maximus n’a jamais connu une telle nuit en plein midi. La nature se déchaîne de plus en plus. Le vent forcit violemment. Le sol commence à se dérober sous ses pieds et des éclairs fusent au-dessus de sa tête. L’effroi le saisit, lui et toute sa famille. Les dieux romains ne sont plus dans sa vie depuis longtemps. Jésus, seul, peut les sauver. Dans un élan de foi, entraînant les siens, il court s’agenouiller en direction de Jérusalem. « Seigneur, sauve-nous. Seigneur, aie pitié de nous » ne cesse-t-il de prier.
Le calme revient peu à peu. Maximus prostré depuis peut-être trois heures se relève. La reda reprend la route. Les voyageurs arrivent enfin à Césarée avant que le sabbat ne commence. Mais une immense tristesse les recouvre comme s’ils étaient enveloppés d’un linceul.
Le surlendemain matin, le ciel est pur. Maximus a dormi d’un sommeil d’enfant comme jamais. Il se sent rajeuni, prêt à franchir mille mers. À la proue du vaisseau, son regard se porte au-delà de l’horizon, plein d’espérance. Mais pourquoi, vendredi, s’est-il abattu une telle horreur sur la terre ? Dieu avait-il abandonné les hommes ? « Où êtes-vous, Seigneur ? Je ne le sais mais je crois que vous êtes vivant quand bien même vous seriez mort. Merci, Seigneur ! Une fois de plus, vous êtes venu à notre secours. » murmure-t-il soudain.
Maximus devra rester quelques mois à Rome pour une dernière mission avant d’être complètement dégagé de ses devoirs civiques. Son lourd équipement de centurion est devenu trop étroit, son cep de vigne, inutile. Il est prêt à revêtir la tunique des serviteurs de Dieu. Libre, il retournera dans son pays natal où le bruit des cigales enchante les cœurs et les plantes embaument l’air de senteurs subtiles. Il plantera une vigne sur un coteau ensoleillé et fera alors l’offrande de son meilleur vin à Dieu pour ses bienfaits.
Marie-Bé
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