L’Aide à l’Eglise en détresse (AED) a dévoilé ce jeudi 22 juin son rapport biannuel sur la liberté religieuse. La fondation pontificale souhaite alerter sur les violations de ce droit. Lors de sa présentation, le directeur de l’AED France, Benoît de Blanpré était accompagné de Mgr Dabiré, évêque de Dori (Burkina Faso), pour souligner la situation particulièrement dramatique en Afrique.
« L’Afrique est le continent le plus violent dans la restriction de la liberté religieuse ». Benoît de Blanpré, directeur de l’AED France, débute ainsi la présentation du rapport de la fondation pontificale sur la liberté religieuse. Dans le monde, 28 pays subissent des persécutions dont treize se trouvent sur le continent africain. « Les califats opportunistes » s’implantent en République démocratique du Congo (RDC) ou au Mozambique. Dans des pays comme le Mali, le Niger, ou le Burkina Faso, les groupes djihadistes militaires, paramilitaires ou criminels massacrent, pillent, enlèvent. Les contextes de guerre civiles sur les territoires somaliens ou camerounais sont des fertilisants à la prolifération de ces groupes terroristes.
Un climat de terreur
La peur s’immisce au sein des pays. Les chrétiens sont particulièrement visés par les attaques, des évêques se déplacent avec des gardes du corps. Au Nigéria, l’ambassade américaine demande à ses ressortissants de quitter le pays par crainte d’attaques djihadistes. Dans des pays comme la Somalie ou l’Iran, les lois anti-conversions pullulent. La charia rend la conversion impossible (crime d’apostasie, lois anti-blasphème, interdiction du prosélytisme, des lieux de culte et de l’importation de littérature religieuse…). Les avantages économiques lors d’une reconversion se multiplient. Benoît de Blanpré parle « d’islamisation du Sahel ». L’engrais est fertile : la pauvreté, la corruption, les rivalités entre les éleveurs et les agriculteurs, la crise climatique, les tensions ethniques. Tout cela crée un appel d’air auquel les groupes terroristes ne peuvent résister. Les enlèvements, les violences sexuelles, les conversions religieuses forcées se répandent et restent largement impunis.
Le silence des états
Les états trop fragiles ne peuvent intervenir pour la sauvegarde des populations chrétiennes. La communauté internationale reste muette. Les enjeux géopolitiques ou économiques sont trop importants pour briser le silence. Le trouble autour du passé colonial de l’Occident rend aussi difficile toute intervention. A cela s’ajoute une indifférence et une ignorance sur la notion de liberté religieuse propre aux pays occidentaux fortement déchristianisés.
Le Burkina Faso, reflet de la situation du continent africain
En Afrique, dans 21 pays la liberté religieuse est remise en cause, dans treize état, les chrétiens souffrent de persécution extrême et dans huit, de discrimination. Pour incarner ces chiffres froids, la présentation du rapport est suivie du témoignage de Mgr Dabiré, évêque de Dori (Burkina Faso) et président de la Conférence épiscopale Burkina-Niger. Le Burkina-Faso est un point névralgique pour les terroristes. Il est prisonnier entre le Mali déstabilisé par les attaques djihadistes, un gouvernement trop faible pour combattre et le Niger en crise, victime de déplacements de populations à cause de la violence islamiste. Auparavant la paix burkinabaise venait du dialogue entre les communautés. Mgr Dabiré raconte que l’herbe poussait dans les tribunaux, tous les litiges étaient résolus par la discussion.
De son côté, le gouvernement parvenait à maintenir un équilibre grâce à une égalité politique pour toutes les religions. Depuis 2015, c’est une autre chanson. L’arrivée du terrorisme islamique sonne le déchirement des familles. « Nous n’avions pas compris ce qu’était l’islam. Maintenant, on nous a expliqué » disent certains membres avant de couper toute communication avec leur famille. Pour Mgr Dabiré, la séparation de la cellule familiale est le signe que quelque chose de grave se déroule, « la famille est au-dessus de tout. On partage tout en famille quelle que soit la religion. » Les populations chrétiennes sont massacrés pour l’exemple. Le port d’une croix ou une procession pour la Sainte Vierge entraîne une mort brutale. Les infrastructures sont détruites pour empêcher toute expression de la Foi.
Un héroïsme silencieux
Cependant les populations burkinabaises chrétiennes résistent. Beaucoup ne peuvent pas assister à la messe régulièrement mais restent fidèles par la prière et la communion spirituelle. Face à cette résistance, les prêtres sont encouragés à demeurer dans leur pays. Mgr Dabiré rappelle que la fonction principale de l’évêque est de « défendre la foi catholique ». Avec l’aide de l’AED, l’Eglise organise le Forum sur la pastorale et la sécurité pour donner une réponse ecclésiastique à la menace terroriste et alerter sur les violences. La fondation pontificale finance aussi un programme de reconstruction psychologique pour les victimes du terrorisme. « La Foi sera sauvegardé par la fidélité et le courage » conclue Mgr Dabiré. Comme souvent, les chrétiens d’Afrique offrent à l’Occident une belle leçon d’héroïsme sanctifiant.
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