On trouve de tout dans La Vie, même des choses intéressantes et même des collaborateurs dont les parcours ne conduisent pas de manière évidente à l’hebdomadaire chrétien d’actualité. Au titre des propos intéressants, notons par exemple ce billet (3 février 2021) qui s’intéresse aux approximations de Jean-Luc Melenchon sur l’Église catholique lors du débat sur le projet de loi sur le séparatisme.
On aimerait tout d’abord suggérer au leader de La France insoumise de faire appel à d’autres collaborateurs pour préparer ses discours : une introduction ne constitue pas le cœur du sujet d’un texte, la Séparation n’était pas condamnée pour ces motifs, et il aurait par ailleurs évité la splendide perle sur le chancelier Michel de L’Hospital prétendument assassiné lors de la Saint-Barthélemy… (…)
Si le projet de loi sur le séparatisme peut être perçu par le député Insoumis comme « une bouillie d’amalgames », ce que le même dit de la condamnation de la loi de 1905 est digne d’une (médiocre) copie de licence… Pie X n’interdit pas d’obéir à la loi parce qu’elle ôte les crucifix des tribunaux (ce fait lui est antérieur) ou parce que les clercs ne sont pas exemptés du service militaire (les « curés sacs au dos » datent de 1889…) ; cela, c’est un simple rappel des « jalons placés dans le but d’arriver à la séparation complète et officielle » de l’Église et de l’État.
La loi est condamnée parce qu’elle est la rupture unilatérale d’un accord unissant deux puissances, et que le culte va être organisé sans négociations préalables avec Rome. Le pape interdit donc d’accepter non la Séparation – qu’il déplore et condamne, mais contre laquelle il ne peut rien – mais les associations cultuelles, en cours d’élaboration. Condamnation qu’il renouvellera par les encycliques Gravissimo Officii (août 1906) puis Une fois encore (janvier 1907). (…)
Pie X peut ainsi procéder à une série de nominations d’évêques, bloquées par le conflit avec Combes puis le vote de la Séparation. Et si la Séparation entraîne un appauvrissement de l’Église en France, elle la libère également de la tutelle de l’État. La question des associations cultuelles sera réglée en 1923-1924 (elles deviennent « associations diocésaines »).
C’est l’intransigeance de Pie X qui oblige le gouvernement à faire évoluer la situation dès 1907, Rome étant d’ailleurs encouragée à la résistance par Albert de Mun, qui fait tout pour que les évêques gardent leur position. Et c’est aussi parce qu’une partie du gouvernement perçoit que l’Église est devenue (trop) libre par rapport à l’État que la question des nominations épiscopales sera explicitement évoquée lors des négociations menées après la guerre de 1914-1918, dans un climat qui a profondément changé. C’est notamment ce dernier point que Jean-Luc Mélenchon ne perçoit pas, préférant imaginer un effet des encycliques Laudato si’ et Fratelli Tutti (pourquoi pas aussi l’exhortation Evangelii Gaudium ?).