Bonté de Dieu et Miséricorde

Publié le 06 Fév 2016
Bonté de Dieu et Miséricorde L'Homme Nouveau

Pris presque au hasard, trois textes de l’Écriture disparates évoquent en commun la bonté mystérieuse de Dieu. « Dieu seul est bon », répond le Seigneur au jeune homme riche qui l’accoste en lui disant Bon Maître. Puis, l’ouvrier de la première heure, qui boude le traitement trop favorable à son gré que le propriétaire accorde à celui de la dernière heure, s’entend dire : « Es-tu jaloux de ce que je sois bon ? » Enfin, ayant créé l’homme, Dieu se félicite en lui-même que son œuvre soit « vraiment très bonne ».

« Dieu est Amour », écrit saint Jean, en écho à la parole de Jésus : « Dieu seul est bon » ; de la bonté qu’est Dieu ne peuvent donc sortir que de bonnes choses. La bonté de Dieu est en effet ici quasi synonyme de son Amour ; le bien et le bon qu’est Dieu sont perçus par nous comme tout brûlants, contagieux de soi, « diffusif de soi », dit l’adage théologique.

Pure bonté

L’idée essentielle de ces réflexions qui entremêlent plusieurs passages de la Parole divine, c’est que Dieu, pure bonté comme il est pur acte d’être, est en amont de toute dérivation vers d’autres bontés, fragmentaires celles-ci, de toute participation de son être et de sa bonté vers l’ordre créé. Le Créateur est d’un autre ordre que la créature. La perfection chez Dieu en fait une « plénitude d’attrait », comme (le « on » est supprimé) le remarque un auteur spirituel, réalité dès lors éminemment désirable, car capable d’assouvir à fond notre capacité de désir.

Pourtant, le mal est là, le serpent s’est insinué dans la création et il l’a flétrie. Que devient alors la bonté divine, trahie dans son intention de répandre l’amour et le bien ? L’attribut divin de bonté devient alors Miséricorde, c’est-à-dire bonté qui vient à notre secours, amour qui peut et veut pardonner et guérir, bonté se surpassant elle-même, devenant alors surcompensation d’elle-même. Il s’agit là du dernier mot du Cœur de Dieu.

Dans la Bulle d’indiction de l’année jubilaire, le Pape François cite un mot de saint Thomas qui va loin et dit un peu tout cela, tiré du traité de la charité (Iia-Iiae, Qu. 30, a. 4, c.) : « La miséricorde est le propre de Dieu dont la Toute-Puissance consiste justement à faire miséricorde ». Le serpent fait douter de l’innocence divine, il met le trouble dans le cœur de l’homme, comme si, en créant, Dieu avait une idée derrière la tête qui s’opposerait à notre situation de créature libre. La miséricorde divine dissout d’elle-même l’objection du cœur méfiant, elle lui fait ouvrir les bras par plénitude de tendresse, comme une mère qui étreint un enfant « mal embouché », l’arrachant au faux problème, à la question qui le tarauderait : « Suis-je aimé pour de vrai ? » Tel est le complexe du petit dernier qui devient l’avant-dernier et, se sentant évincé, voit son univers affectif s’écrouler. C’est là une situation analogue aux ouvriers qui s’échelonnent au long de la journée : tant que l’on ne voit pas que c’est un honneur et une sécurité d’être embauché par un tel maître, tant que l’enfant, loin de se croire évincé, se sait invité dans la ronde de l’amour où chacun apporte son petit effort délicieux, tant que l’égoïsme n’est pas dénoncé, on en restera toujours à la logique infernale de la jalousie héritée du propos malin des origines.

La preuve de l’amour ne sera jamais dans un pauvre syllogisme humain, elle réside dans l’agir totalement vrai, dans la tendresse qui virilise, construit et honore l’autonomie de « l’avant-dernier ». L’Incarnation rédemptrice constitue elle-même cette étreinte divine devant laquelle l’homme n’a plus qu’à rester bouche bée d’admiration de ce que la bonté divine est devenue pour lui Miséricorde en le secouant de tendresse au prix de son Sang très précieux.

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