Entrant récemment dans cette grosse paroisse parisienne, je parcours la feuille du dimanche intitulée « Diagnostic » (au sujet, bien entendu, de prêtres pédophiles), et je me dis que pour établir pareil diagnostic je ne m’adresserai jamais à ce médecin-là, bien que je sois catholique de vieille souche. Je m’explique.
On a donc voulu, le Pape François repris ici par le clergé, évoquer à nouveau l’affaire (dramatique, scandaleuse, il est vrai) du cardinal de Washington et de 300 prêtres aux USA (Pennsylvanie). Alors redisons-le pour la centième ou la millième fois, comme le fait régulièrement la presse, la télévision : oui, il y a là d’effroyables fautes et des prêtres indignes, oui, l’Église a eu tort de cacher ces scandales et de se contenter d’éloigner les coupables, solution inopérante. Mais aussi : oui, l’Église aujourd’hui a le grand tort de revenir sans cesse sur le sujet, de parler comme la télévision finalement, de se tirer une balle dans le pied. Oui, il fallait dire il y a eu des criminels chez nous, nous l’avouons et demandons pardon, mais ajouter et maintenant, no comment !
On n’est pas tout le temps témoin à charge contre ses frères, même coupables, on ne doit pas être tout le temps procureur mais essayer d’être un peu avocat. Il y a aussi une notion que la loi laïque impose avec raison mais que l’Église ignore : la prescription, alors que l’on évoque des faits qui ont parfois plus de trente ans ! et presque toutes les victimes sont aujourd’hui décédées.
Mais voici le plus extravagant : où sont le sens critique, le discernement quand on voit les raisons de la pédophilie dans… le cléricalisme ! Ça n’a rien à voir. Il y avait des pédophiles avant l’Église et on ne voit guère comment se manifeste aujourd’hui le cléricalisme puisqu’il y a de moins en moins de clercs (la paroisse en question a 18 prêtres habitués ou permanents, 3 sont Français et âgés, les 15 autres Africains ou Asiatiques !). Le cléricalisme arrogant façon congrégation (Louis XVIII, Charles X) a été insupportable mais entendre aujourd’hui un pape et des prêtres crier à la suite de Gambetta en 1877 « Le cléricalisme, voilà l’ennemi ! » a vraiment de quoi surprendre et c’est aussi mépriser tous ceux qui sont fidèles et droits.