Directeur d’un établissement dépendant de la Congrégation de Sainte-Croix, Yann de Cacqueray connaît bien l’enseignement catholique sous contrat où il a fait sa carrière. Il éclaire pour nous le rapport de forces avec l’État, très inégal aussi à cause du manque de courage des cadres et de l’autorité religieuse.
L’établissement scolaire Stanislas est aujourd’hui au centre de l’attention des médias. Cette affaire risque-t-elle selon vous de relancer la guerre scolaire ? Qui est la véritable cible de l’État et des médias ?
Cette affaire dépasse largement le cadre de Stanislas. La question est de toucher le symbole que représente cet établissement, pour ensuite mettre au pas l’ensemble des écoles, collèges et lycées privés catholiques. L’idée n’est pas de taper sur Stan, mais sur le plus emblématique pour qu’aucun des autres n’ose faire ne serait-ce qu’une partie de ce qu’a fait Stan. Il existe clairement une pression sur les établissements, et c’est toujours la même stratégie : une technique très utilisée par les médias comme par l’État, qui sont en totale connivence sur le sujet. On pense à l’épisode Gerson, ou à ce chef du lycée Jean-Paul II à Compiègne, destitué car il avait dit à ses élèves de ne pas aller voir un film LGBT. Ce sont toujours les mêmes sujets et toujours le même procédé pour que les petits établissements restent tranquilles. Dans ce contexte, je comprends qu’un jeune chef d’établissement ne souhaite pas prendre de risques.
Est-ce à cause de cette pression que la plupart des établissements privés n’ont aujourd’hui de catholique que le nom ? Ou y a-t-il d’autres causes ?
C’est en effet l’une des raisons principales, la deuxième étant que les ecclésiastiques ont largement déserté le champ éducatif. Toutes les congrégations religieuses qui dispensaient l’enseignement au XIXe siècle ont disparu au XXe. Un ancien directeur diocésain se félicitait d’avoir fait disparaître les tutelles congréganistes de son diocèse. Au moment des débats sur l’enseignement libre en 1983-1984, beaucoup, à la Conférence des Évêques de France, souhaitaient l’intégration de l’enseignement catholique dans l’Éducation nationale…
Précisons ce statut d’établissement privé sous contrat : qu’est-ce qu’exige et permet la loi pour un établissement de ce type ?
La loi exige de suivre les programmes de l’Éducation nationale, et d’enseigner les « valeurs de la République ». Pour ce qui est de l’enseignement religieux, nous n’avons en théorie pas de limite puisque l’État ne s’en occupe pas. Mais la…