Évangéliser, le défi majeur de notre époque

Publié le 12 Déc 2017
Évangéliser, le défi majeur de notre époque L'Homme Nouveau

Poursuivons l’étude des textes du Pape prononcés durant sa vite au Myanmar, en commentant l’homélie de la messe pour les jeunes à Yangon pour la saint André, le 30 novembre. À voir ces jeunes remplis de bon zèle pour annoncer l’Évangile, le Pape leur applique la phrase d’Isaïe citée par saint Paul et qui faisait l’objet de la première lecture : « Qu’ils sont beaux les pas des messagers qui annoncent une bonne nouvelle ». C’est la seule fois qu’apparaît dans l’Ancien Testament ce mot d’« évangile » qui signifie « bonne nouvelle ». L’annonce du salut, réalisé par Jésus après avoir été prophétisé et annoncé dans l’ancienne Alliance, demeure pour les chrétiens la bonne nouvelle par excellence. Mais cette bonne nouvelle n’est pas seulement réservée aux chrétiens. Le salut est universel et il n’y a de salut qu’en Jésus-Christ comme l’affirme saint Pierre devant le Sanhédrin. Évangéliser est donc un devoir pour tout chrétien et cela demeure le défi majeur de notre époque. Nous devons tous dire avec saint Paul : « Malheur à moi, si ne n’évangélise pas ! » Tel a toujours été le point de départ de la nécessité d’évangéliser le monde selon l’ordre exprès du Seigneur à ses Apôtres. Bien sûr, beaucoup diront qu’on ne peut pas apporter une bonne nouvelle quand il y a tant de mal dans le monde, quand injustice, violence et misère s’étalent de partout. Et bien si ! Le chrétien est un homme de foi, d’espérance et d’amour. Il croit en la miséricorde divine incarnée en Jésus-Christ qui seul peut accorder au monde non seulement le salut, mais encore la joie et la paix véritables. On ne reviendra pas sur les malheureuses circonstances du syncrétisme et du relativise contemporains, qui sapent toute évangélisation à sa base.

J’insisterai avec le Pape sur la question posée par saint Paul : Comment les hommes pourront-ils croire en Jésus sans entendre son nom ? Comment entendre sans que personne ne leur proclame cette bonne nouvelle ? Enfin, comment proclamer sans être envoyé ? Le Pape, en bon grand père, invite les jeunes à se remémorer ces trois paroles, sans pour autant tomber dans la peur. Souvent les hommes ne connaissent même pas le nom de celui en qui il faut croire. Ils ne peuvent invoquer de bouche celui auquel ils ne croient pas de cœur. Ils ne peuvent croire en celui dont ils ne connaissent pas l’existence. Ils ne peuvent en entendre parler si nul ne leur en parle. Et personne ne leur en dira rien sans mission et autorité pour cela. Tout se tient. Celui qui veut réellement s’adresser à l’humanité tout entière, doit faire en sorte que l’humanité soit avertie. Si la promulgation, si l’intimation ne se fait pas, comment l’humanité pourrait-elle accueillir l’économie nouvelle apportée par le Christ ? Il faut que le salut soit universel dans son offre, dans sa proposition, dans sa promulgation : et les questions accumulées par saint Paul et le Pape n’ont d’autre dessein que de montrer que Dieu n’a rien laissé en détresse, et qu’il a pourvu à tout. Le Pape donne alors saint André en modèle. Simple pécheur, il est devenu martyr (= témoin) du Christ en versant son sang pour Lui et en s’attachant de tout son cœur à sa Croix, scandale pour les juifs et folie pour les païens Qu’il nous apprenne à tous la vraie patience, car on ne devient pas un évangélisateur du premier coup. Le combat spirituel sera toujours dur et long. Il faut savoir faire réfléchir les gens sur les questions essentielles, sans pour autant les forcer. Le grand arbre de l’évangile a d’abord de petites racines, mais toutes doivent être bien enfouies dans la terre. Que l’Immaculée fasse de nous de vrais évangélisateurs !

Homélie du pape pour la Messe célébrée à Yangon, le 30 novembre 2017 :

Chers frères et sœurs,

avant de venir dans ce pays, j’ai longtemps attendu ce moment. Beaucoup parmi vous sont venus de loin et de régions montagneuses éloignées, quelques-uns aussi à pied. Je suis venu comme un pèlerin pour vous écouter et apprendre de vous, et pour vous offrir quelques paroles d’espérance et de consolation. 

La première lecture d’aujourd’hui, du livre de Daniel, nous aide à voir combien la sagesse du roi Balthazar et de ses voyants est limitée. Ils savaient comment louer « leurs dieux d’or et d’argent, de bronze et de fer, de bois et de pierre » (Dn 5, 4), mais ils ne possédaient pas la sagesse pour louer Dieu dans les mains duquel est notre vie et notre souffle. Daniel au contraire, avait la sagesse du Seigneur et il était capable d’interpréter ses grands mystères.

L’interprète définitif des mystères de Dieu est Jésus. Il est la sagesse de Dieu en personne (cf. 1 Co 1, 24). Jésus ne nous a pas enseigné sa sagesse avec de longs discours ou par de grandes démonstrations de pouvoir politique ou terrestre, mais en donnant sa vie sur la croix. Nous pouvons tomber quelquefois dans le piège de faire confiance à notre sagesse elle-même, mais la vérité est que nous pouvons facilement perdre le sens de la direction. À ce moment, il est nécessaire de nous rappeler que nous disposons devant nous d’une boussole sûre, le Seigneur crucifié. Dans la croix, nous trouvons la sagesse, qui peut guider notre vie avec la lumière qui provient de Dieu. 

De la croix, vient aussi la guérison. Là, Jésus a offert ses blessures au Père pour nous, les blessures par lesquelles nous sommes guéris (cf. 1 P 2, 24). Que ne nous manque jamais la sagesse de trouver dans les blessures du Christ la source de tout soin ! Je sais qu’au Myanmar beaucoup portent les blessures de la violence, qu’elles soient visibles ou invisibles. La tentation est de répondre à ces blessures avec une sagesse mondaine qui, comme celle du roi dans la première lecture, est profondément faussée. Nous pensons que le soin peut venir de la colère et de la vengeance. La voie de la vengeance n’est cependant pas la voie de Jésus. 

La voie de Jésus est radicalement différente. Quand la haine et le refus l’ont conduit à la passion et à la mort, il a répondu par le pardon et la compassion. Dans l’Evangile d’aujourd’hui, le Seigneur nous dit que, comme lui, nous aussi nous pouvons rencontrer le refus et des obstacles, mais que toutefois, il nous donnera une sagesse à laquelle personne ne peut résister (cf. Lc 21, 15). Il parle ici de l’Esprit Saint, par lequel l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs (cf. Rm 5, 5). Avec le don de l’Esprit, Jésus rend capable chacun de nous d’être signes de sa sagesse, qui triomphe sur la sagesse de ce monde, et signes de sa miséricorde, qui apporte aussi soulagement aux blessures les plus douloureuses.

À la veille de sa passion, Jésus s’est donné à ses Apôtres sous les espèces du pain et du vin. Dans le don de l’Eucharistie, nous ne reconnaissons pas seulement avec les yeux de la foi, le don de son corps et de son sang ; nous apprenons aussi comment trouver le repos dans ses blessures, et là être purifiés de tous nos péchés et de nos routes déformées. En prenant refuge dans les blessures du Christ, chers frères et sœurs, vous pouvez goûter le baume apaisant de la miséricorde du Père et trouver la force de le porter aux autres, pour oindre chaque blessure et chaque mémoire douloureuse. De cette manière, vous serez des fidèles témoins de la réconciliation et de la paix, que Dieu désire voir régner dans chaque cœur humain et dans chaque communauté.

Je sais que l’Eglise au Myanmar fait déjà beaucoup pour porter le baume de guérison de la miséricorde de Dieu aux autres, spécialement à ceux qui en ont le plus besoin. Il y a des signes clairs que, même avec des moyens très limités, de nombreuses communautés proclament l’Evangile à d’autres minorités tribales, sans jamais forcer ou contraindre, mais toujours en invitant et en accueillant. Au milieu d’une grande pauvreté et de difficultés, beaucoup parmi vous offrent concrètement assistance et solidarité aux pauvres et à ceux qui souffrent. A travers l’attention quotidienne de ses évêques, prêtres, religieux et catéchistes, et particulièrement à travers le louable travail de Catholic Karuna Myanmar et de la généreuse assistance fournie par les Œuvres Pontificales missionnaires, l’Église dans ce pays aide un grand nombre d’hommes, de femmes et d’enfants, sans distinction de religion ou de provenance ethnique. Je peux témoigner que l’Église ici est vivante, que le Christ est vivant et qu’il est là, avec vous et avec vos frères et sœurs des autres communautés chrétiennes. Je vous encourage à continuer de partager avec les autres la sagesse sans prix que vous avez reçue, l’amour de Dieu qui jaillit du cœur de Jésus.

Jésus veut donner cette sagesse en abondance. Certainement, il récompensera vos efforts de semer des graines de guérison et de réconciliation dans vos familles, vos communautés et dans la société plus vaste de cette nation. Ne nous a-t-il pas dit que sa sagesse est irrésistible (cf. Lc 21, 15) ? Son message de pardon et de miséricorde utilise une logique que tous ne voudront pas comprendre, et qui rencontrera des obstacles. Cependant son amour, révélé sur la croix est, en dernière analyse, inéluctable. Il est comme un “GPS spirituel”; qui nous guide infailliblement vers la vie intime de Dieu et le cœur de notre prochain.  

La Bienheureuse Vierge Marie a suivi aussi son Fils sur la montagne obscure du Calvaire et elle nous accompagne à chaque pas de notre voyage terrestre. Qu’elle puisse, Elle, nous obtenir toujours la grâce d’être des messagers de la véritable sagesse, profondément miséricordieux envers ceux qui sont dans le besoin, avec la joie qui vient du repos dans les blessures de Jésus, qui nous a aimés jusqu’au bout.

Que Dieu vous bénisse tous ! Que Dieu bénisse l’Église au Myanmar ! Qu’il bénisse cette terre par sa paix ! Que Dieu bénisse le Myanmar !

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