Mis en pause par la dissolution de l’Assemblée nationale, les débats autour de la loi sur la fin de vie ne tarderont pas à reprendre. À l’heure où les définitions traditionnelles de la médecine sont progressivement remises en cause par le relativisme, la fin de vie participe de cette mutation, où le patient n’est plus seulement bénéficiaire mais décideur.
La tourmente politique actuelle n’a fait que différer le débat législatif sur « la fin de vie ». Celle-ci étant l’effet d’un mouvement profond ne va pas disparaître en raison des dernières perturbations électorales. Ce mouvement est alimenté depuis des décennies par de puissants groupes de pression dont, au premier rang, les loges maçonniques qui jouent, comme toujours, un rôle de chef d’orchestre entre les différents acteurs : médecins, journalistes, associations, politiques, acteurs économiques et scientifiques. Mais il serait naïf de ne voir dans cette revendication à l’euthanasie et au suicide assisté que le fruit d’un agenda partisan. Il faut aussi en interroger les présupposés et les conditions de crédibilité. À ce titre, la mutation de la médecine depuis quelques décennies semble essentielle. Nous entendons par mutation de la médecine, bien sûr celle de ses pratiques mais aussi en amont, le changement dans la compréhension de la nature de la médecine. Nous sommes passés en quelques années d’une médecine hippocratique à une médecine qu’un livre récent nomme la « médecine des désirs » [1].
L’acte médical
La conception traditionnelle de la médecine est fondée sur l’œuvre et la pratique du médecin grec Hippocrate de Cos (460-370 av. J.-C.). La médecine est indissociablement un art réglant des gestes techniques ; une science portant sur le fonctionnement du corps humain ; et une prudence permettant de discerner ce qui est ajusté à ce patient. Reposant sur un diagnostic, un pronostic et une prescription thérapeutique, la médecine est en effet avant tout l’activité d’une personne qui en soigne une autre. Le fameux serment d’Hippocrate déclare :
« Je dirigerai le régime des malades à leur avantage, suivant mes forces et mon jugement, et je m’abstiendrai de tout mal et de toute injustice. (…) Je ne remettrai à personne du poison, si on m’en demande, ni ne prendrai l’initiative d’une pareille suggestion ; semblablement, je ne remettrai à aucune femme un pessaire abortif. Je passerai ma vie et j’exercerai mon art dans l’innocence et la pureté. » [2]
Dans cette conception, le médecin est le médiateur…