Jusqu’à quel point faut-il adapter l’annonce de la foi à la culture contemporaine ? Mgr Jean-Claude Hollerich donne sa réponse dans un livre paru l’année dernière. Et celle-ci trahit une ignorance indigente de la philosophie et une naïve fascination pour ce que cette culture aurait à apprendre à l’Église, altérant gravement le sens de l’Évangile qu’il est censé prêcher.
L’Évangile du Salut doit être annoncé à tous les hommes de toutes les époques et vivant dans toutes les cultures. Il est dès lors hautement nécessaire de réfléchir à l’évangélisation des hommes vivant dans nos sociétés occidentales largement déchristianisées. Ces sociétés ont sécrété une culture singulière qui dispose la pensée et l’action de ceux qui y sont immergés. Il convient de savoir ce que signifie alors l’inculturation de la foi dans une telle culture. Saint Jean-Paul II affirme dans son encyclique Redemptoris Missio (1990) que l’inculturation n’est pas « une simple adaptation extérieure, car l’inculturation“signifie une intime transformation des authentiques valeurs culturelles par leur intégration dans le christianisme, et l’enracinement du christianisme dans les diverses cultures humaine”. C’est donc un processus profond et global qui engage le message chrétien de même que la réflexion et la pratique de l’Église » (n. 52).
L’acuité du problème décuplée
Le problème est de discerner jusqu’où le christianisme doit s’enraciner dans les conditionnements culturels actuels et à quel moment il doit les critiquer et les transformer sous peine d’être lui-même altéré. Le problème a acquis une acuité décuplée depuis que certains et non des moindres, comme le cardinal Hollerich dont nous allons présenter l’opinion, considèrent que la déchristianisation de l’Europe exige que l’Église revoie certains de ses enseignements perçus comme incompréhensibles par beaucoup de nos contemporains. La question est donc : dans quelle mesure l’enseignement de l’Église peut-il être un obstacle à l’évangélisation ? Autrement dit, en quoi l’inculturation de l’Évangile implique-t-elle ou pas une révision de pans entiers de son enseignement moral et anthropologique devenus incompatibles avec la culture postmoderne ?
« Je suis quant à moi profondément convaincu, déclare Mgr Hollerich dès le début du livre, que la culture européenne dite “chrétienne” est un obstacle »
Rapporteur général du synode
Le cardinal Hollerich (né en 1958) n’est pas n’importe qui. Jésuite luxembourgeois, ancien missionnaire au Japon, nommé archevêque de Luxembourg par Benoît XVI puis cardinal par le pape François, il a été de 2018 à mars dernier président de…