La prière, chemin de sainteté

Publié le 31 Oct 2016
La prière, chemin de sainteté L'Homme Nouveau

Plus d’un mois après la canonisation de Mère Teresa, le Pape a enrichi le martyrologe de l’Église de sept nouveaux saints, dont il ne fait pas mention particulière dans son homélie de ce 16 octobre. Le Pape se contente en effet d’analyser comment la prière demeure indispensable pour parvenir à la sainteté. Les nouveaux saints ont tous été des hommes ou femme de prière. On pense bien sûr à la carmélite Élisabeth de la Trinité dont la célèbre prière en dit long sur sa vie intime avec les Trois qu’elle retrouvait au plus profond d’elle-même dans un continuel silence : « Ô mon Dieu, Trinité que j’adore, aidez-moi à m’oublier entièrement pour m’établir en vous, immobile et paisible, comme si déjà mon âme était dans l’éternité »… Mais c’est aussi une grande vie de prière qui a été le cœur du ministère du prêtre italien A. Pavoni ; c’est la force puisée dans la prière qui a donné au français Salomon Leclercq de devenir le premier saint de la Révolution française et à J. Sanchez del Rio, laïc, d’aller jusqu’au martyr. Une vie centrée sur l’Eucharistie caractérise aussi l’évêque de Malaga E. Gonzales Garcia, de même que le Père Alphonse-Marie Fusco, fondateur des Sœurs Ballestrines ; enfin c’est la prière qui a fécondé l’apostolat du premier saint argentin dans la pampa, le Père Brochero.

À l’opposé du pélagianisme ou du semi pélagianisme, le Pape rappelle d’emblée le primat de la grâce, signe de l’amour absolument gratuit de Dieu pour ses créatures. Sans la grâce on ne peut rien, même si Dieu a voulu que nous coopérions à celle-ci selon la parole de saint Augustin : « Celui qui nous a créés sans nous ne nous rachète pas sans nous ». Mais la grâce s’obtient par une prière pure, fervente et persévérante. Et cette prière est elle-même une grâce, car de nous-mêmes nous restons incapables de posséder un cœur pur. Seul le Cœur de Marie est Immaculé. La fidélité qui se prouve par la persévérance ne s’obtient que par la prière, elle-même fruit de la grâce. Le Pape le précise avec clarté à partir de la collecte du dimanche. Pour servir Dieu avec loyauté et pureté de cœur, il nous faut impérativement son aide. Jésus l’avait affirmé dans son discours d’adieu : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire ». Relisons l’Évangile de Saint Luc qui insiste tant sur la grâce, la prière et l’Esprit Saint. L’Évangile du jour d’ailleurs le disait clairement à propos de la veuve importune. Le mystère de la prière ne se comprend que dans la persévérance qui seule peut atteindre le silence apparent de Dieu. Crions vers Dieu sans nous décourager, mais avec grande espérance, comme Moïse dans le désert qui les bras étendus suppliait le Dieu des armées. Quand, fatigué, il baissait les bras, il laissait place à la défaite. Aussi fallut-il soutenir ses bras pour qu’ils ne flanchent pas. Cela montre que la prière ne doit pas être sporadique ni en dents de scie, mais continuelle. Mais à quoi sert de prier, dira-t-on, puisqu’on n’est pas exaucé ? La prière n’est-elle pas, comme la religion, « l’opium du peuple » ? Pour éviter le découragement, il faut se rappeler que nous ne sommes pas seuls, mais faisons partie du Corps mystique. De même qu’on ne se sauve pas seul, on ne peut pas prier seul comme un égoïste. La prière, même personnelle, doit être ecclésiale c’est-à-dire en union avec l’ensemble du Corps mystique du Christ qu’est l’Église. Les saints sont entrés dans ce grand mystère de la prière individuelle et communautaire, personnelle et liturgique, qui est le premier des biens comme l’affirmait Dom Guéranger. Ils ont laissé l’Esprit Saint agir et prier en eux, parce qu’ils étaient, à l’instar de Marie, les temples de l’Esprit, les citoyens des saints et surtout des fils dans le Fils.

L’homélie du Pape

Au début de la célébration d’aujourd’hui, nous avons adressé au Seigneur cette prière : « Crée en nous un cœur généreux et fidèle afin que nous puissions toujours te servir avec loyauté et pureté de cœur » (Oraison de la collecte)

Nous tout seuls, nous ne sommes pas capables de nous former un tel cœur, Dieu seul peut le faire, et pour cela nous le demandons dans la prière, nous l’invoquons de Lui comme un don, comme sa « création ». De cette manière nous sommes introduits dans le thème de la prière, qui est au centre des lectures bibliques de ce dimanche et qui nous interpelle nous aussi, nous qui sommes rassemblés pour la canonisation de nouveaux saints et saintes. Ils ont atteint le but, ils ont eu un cœur généreux et fidèle, grâce à la prière : ils ont prié avec toutes leurs forces, ils ont lutté, et ils ont vaincu.

Prier, donc. Comme Moïse, qui a été surtout un homme de Dieu, un homme de prière. Nous le voyons aujourd’hui dans l’épisode de la bataille contre Amalec, debout sur la colline avec les mains levées ; mais à chaque fois, à cause du poids, les mains retombaient, et dans ces moments le peuple avait le dessous ; alors Aaron et Hour firent asseoir Moïse sur une pierre et ils soutenaient ses mains levées, jusqu’à la victoire finale.

Voilà le style de vie spirituelle que nous demande l’Église : non pour gagner la guerre, mais pour gagner la paix !

Nous soutenir mutuellement

Dans l’épisode de Moïse, il y a un message important : l’engagement de la prière demande de nous soutenir l’un l’autre. La fatigue est inévitable, parfois nous n’en pouvons plus, mais avec le soutien des frères, notre prière peut aller de l’avant, jusqu’à ce que le Seigneur porte son œuvre à son terme.

Saint Paul, écrivant à son disciple et collaborateur Timothée, lui recommande de demeurer ferme dans ce qu’il a appris et dans ce en quoi il croit fermement (cf. 2 Tm 3, 14). Toutefois, Timothée lui aussi ne pouvait pas y arriver tout seul : la « bataille » de la persévérance ne se remporte pas sans la prière. Mais pas une prière sporadique, en dents de scie, mais faite comme Jésus l’enseigne dans l’Évangile d’aujourd’hui : « toujours prier, sans se décourager » (Lc 18, 1). C’est la manière d’agir chrétienne : être fermes dans la prière pour rester fermes dans la foi et dans le témoignage. Et voici de nouveau une voix au-dedans de nous : « Mais Seigneur, comment est-il possible de ne pas se décourager ? Nous sommes des êtres humains… Moïse aussi s’est découragé !… ». C’est vrai, chacun de nous se décourage. Mais nous ne sommes pas seuls, nous faisons partie d’un Corps ! Nous sommes membres du Corps du Christ, l’Église, dont les mains sont levées jour et nuit vers le ciel grâce à la présence du Christ ressuscité et de son Saint Esprit. Et seulement dans l’Église et grâce à la prière de l’Église, nous pouvons rester fermes dans la foi et dans le témoignage.

Ne pas se décourager

Nous avons écouté la promesse de Jésus dans l’Évangile : « Dieu fera justice à ses élus qui crient vers lui jour et nuit » (Lc 18, 7). C’est le mystère de la prière : crier, ne pas se décourager, et si tu te décourages, demander de l’aide pour tenir les mains levées. C’est la prière que Jésus nous a révélée et nous a donnée dans l’Esprit Saint. Prier ce n’est pas se réfugier dans un monde idéal, ce n’est pas s’évader dans une fausse quiétude égoïste. Au contraire, prier c’est lutter, c’est aussi laisser l’Esprit Saint prier en nous. C’est l’Esprit Saint qui nous enseigne à prier, qui nous guide dans la prière, qui nous fait prier comme des enfants.

Les saints sont des hommes et des femmes qui entrent jusqu’au fond dans le mystère de la prière. Des hommes et des femmes qui luttent avec la prière, laissant l’Esprit Saint prier et lutter en eux ; ils luttent jusqu’au bout, avec toutes leurs forces, et ils vainquent, mais pas tout seul : le Seigneur vainc en eux et avec eux. Ainsi ces sept témoins qui ont été canonisés aujourd’hui, ont combattu la bonne bataille de la foi et de l’amour avec la prière. C’est pourquoi ils sont restés fermes dans la foi, avec le cœur généreux et fidèle. Que par leur exemple et leur intercession, Dieu nous accorde à nous aussi d’être des hommes et des femmes de prière ; de crier jour et nuit vers Dieu sans nous décourager ; de laisser l’Esprit Saint prier en nous, et de prier en nous soutenant les uns les autres pour rester les mains levées, jusqu’à ce que vainque la Divine Miséricorde.

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