Représentant du Saint-Siège à la COP21, le cardinal Peter Turkson a évoqué le 9 décembre 2015, dans un entretien à la BBC, le contrôle des naissances comme une solution. L’enseignement de l’Église encourage la « paternité responsable » et la « régulation des naissances ».
Dans un entretien donné en marge de la COP21 à Paris, le cardinal Peter Turkson, président du Conseil pontifical Justice et Paix, a enchanté les grands médias en assurant que le Pape François a « appelé à un certain degré de contrôle des naissances ». Cela cadre avec la logique malthusienne de ceux qui rendent le nombre des hommes sur terre responsable du « réchauffement climatique » et des catastrophes qu’il est censé devoir amener.
Un consensus à préserver
Le thème de la surpopulation s’est fait discret lors des négociations de Paris. Très présente dans le travail sur le terrain des organisations internationales et des grandes fondations, la diffusion de la contraception est moins ouvertement évoquée lors des conférences sur le climat, pour ne pas mettre en péril le consensus entre nations. Il en fut ainsi à la COP21 où le prince Charles donna le coup d’envoi aux travaux en parlant de notre « pauvre planète encombrée » mais où il fut peu question de « contrôle de la population ».
Qu’un haut responsable du Vatican adopte ce langage, c’est pain bénit pour les pourfendeurs de l’« empreinte écologique » humaine. Le cardinal Turkson a déclaré que « l’Église ne s’est jamais opposée au contrôle des naissances et à l’espacement des naissances et tout ça ». Il a toutefois précisé que dans son esprit les mots « contrôle des naissances » renvoient à l’espacement des naissances par les « méthodes naturelles ».
Cela a déclenché une première controverse dans la mesure où les mots anglais employés, « birth control », désignent clairement la contraception. Autant la régulation des naissances peut être légitime – en respectant des limites « bien larges, en vérité », comme l’enseignait Pie XII en 1951 – autant le « contrôle des naissances » n’est pas compatible avec la loi de Dieu.
Tel a été le tollé que le cardinal Turkson a dû faire marche arrière. Interrogé par Diana Montagna d’Aleteia, il a regretté l’emploi de ces termes : « Lorsque j’ai utilisé l’expression “contrôle des naissances”, ce à quoi je pensais, c’était à l’enseignement traditionnel de l’Église sur la paternité responsable. Ainsi, quiconque verra les termes “contrôle des naissances” dans l’interview de la BBC, devra les comprendre comme signifiant “paternité responsable”. » Son intention était de répondre au journaliste sur son propre terrain, en présentant « l’Église comme n’étant pas hostile ni opposée à l’idée d’espacer les naissances ».
La précision dans le langage est une grande vertu des communicants… En l’occurrence elle est arrivée trop tard pour la majorité de ceux qui ont pris connaissance des premières déclarations du cardinal Turkson, très écouté dans le domaine de l’écologie et au premier rang des présentations de l’encyclique Laudato si’.
Renversement
Le deuxième objet de controverse est la question de savoir si le Pape a véritablement présenté la régulation des naissances comme un devoir moral dans le cadre de la lutte contre le « réchauffement climatique » et le manque d’eau et de nourriture. Le cardinal Turkson a ainsi déclaré que « la quantité de population qui est critique pour la réalisation de cet objectif reste à découvrir, cependant le Saint-Père a également appelé à un certain degré de contrôle des naissances ».
L’idée est bien là : il y aurait une obligation morale pour les catholiques de pratiquer la régulation des naissances. C’est un évident renversement de perspective : jusqu’ici, la régulation naturelle des naissances est une possibilité offerte aux couples qui pour des raisons graves, notamment dans le domaine économique ou celui de la santé, peuvent pratiquer la continence pendant les périodes fertiles de la femme tout en restant ouverts à la vie.
En faire une sorte de devoir général est plus que douteux sur le plan de la morale catholique – et c’est en outre une pierre apportée à l’édifice des partisans de la lutte mondiale contre le réchauffement climatique par la réduction de la population. Il faut dire que cette lutte globale a elle aussi été présentée comme une obligation morale pour les catholiques par le cardinal Turkson.