Après le sens de l’honneur et le sens des priorités, le père Danziec poursuit sa description des cinq sens à cultiver pour répondre aux défis de l’existence et de son état de vie, avec le sens de l’Église. Pour ce 3ème volet, place au Corps Mystique du Christ : l’Église, qui est mère et maîtresse.
Ces fameux cinq sens bien particuliers – le sens de l’honneur, le sens des priorités, le sens de l’Église, le sens de l’humour et enfin le sens de l’éternité – constituent une sorte de charpente invisible, appelée à solidifier notre demeure intérieure. Après les deux premiers sens, prenons le temps de réfléchir au 3ème sens : le sens de l’Église. Enfant de Dieu par le baptême, nous sommes devenus par le fait même le jour où nous avons été présentés au-dessus des fonds baptismaux frère de Jésus-Christ et temple du Saint-Esprit. Depuis nous sommes membres de l’Église. Tâchons d’y voir plus clair et de considérer avec gravité et soin cette filiation tout à fait particulière.
Notre civilisation est une nappe d’eau dont la surface montre une triste écume et qui aura toujours ses bas-fonds ; mais entre les deux, un courant pur et fort circule, formé des hautes consciences chrétiennes façonnées par la chrétienté.
Avoir le sens de l’Église, c’est avoir conscience de ses trésors. Tout l’enjeu réside dans notre capacité à venir y puiser. À accepter que l’Église nous baptise, si nous ne le sommes pas. À ouvrir les portes de notre âme pour que l’Église vienne nous transformer. Qu’elle nous confirme, nous communie ensemble et avec Dieu. Qu’elle nous ordonne et nous pardonne aussi. Qu’elle nous marie au besoin, d’un mariage pur et fécond avec la nature sanctifiée. Avoir le sens de l’Église, c’est savoir que nous avons besoin d’elle pour accueillir et réaliser notre Salut.
Avec Jean Ousset, gardons en tête cependant le très grand mal qui pourrait traverser la conscience catholique : croire que le calme et la paix devraient être les seules marques de la divinité de l’Église. À prendre l’histoire de l’Église dès son début et à examiner le renouvellement de ses drames au cours des siècles, ce qui risque de faire perdre la foi fragmentairement considéré, devient au final argument massif de la sainteté de l’Église, pour peu qu’on ait une suffisante culture historique des drames de la vie de l’Église.
Avec piété filiale, spécialement à l’heure du mantra « synodal », il importe plus que jamais de s’offrir à l’Église. Avec un certain tremblement, parce que l’Église est un mystère, parce que l’Église est grande. Elle est comme « Tremenadae majestatis » / « redoutable en majesté » pour tirer une expression du Dies irae. S’offrir à elle donc, mais sans faillir non plus, parce que l’Église est vraie. Elle est miraculeuse. Ce qui donne de se laisser incorporer en elle, quelle que soit la météo de l’histoire à son extérieur et la température ambiante en son intérieur.
Le cardinal Pie avait cette formule : « Quand le Christ ne règne pas par les bienfaits attachés à sa présence, Il règne par les méfaits attachés à son absence. » Ne croyons pas que dans l’Église Catholique, la vie serait plus paisible et sereine que partout ailleurs. La vitalité de l’Église n’est pas affaire de slogan publicitaire. Bernanos le remarquait : « Ils écriront sur leur temple : on est mieux nourri ici qu’en face. Et ils s’étonneront de ne recueillir que des ventres ».
On l’aura compris : la gloire de l’Église ne saurait être une gloire humaine. Il lui faut être sainte comme malgré nous. « Elle est sans péché mais elle n’est pas sans pécheurs » pour reprendre la formule consacrée. Pour Charles de Foucauld, « l’Église est une apparente défaite dans une perpétuelle victoire ». C’est joliment dit. Franchement, qui parmi nous oserait dire qu’elle nous a laissés sans enseignement pour nous instruire ? Sans patrimoine sacré pour nous émerveiller ? Sans expérience mystique pour nous édifier ? Sans prière pour nous dépasser ? Sans miracle pour nous confondre ? Manquerions-nous de textes sacrés, d’écrits patristiques, de recueils spirituels, d’encycliques charpentées pour y voir clair ?
« Regardez comme votre plus haute fierté, votre plus grand honneur, d’être membres de l’Église, de lui appartenir sans réserve ; c’est la plus noble cause à servir, la seule qui soit absolument digne que nous lui donnions notre vie et, s’il le faut, notre sang » écrivait le prêtre théologien, l’abbé Berto, en octobre 1949.
Voilà de quoi guider notre examen de conscience pour que nous chantions avec joie les délices de sa Tradition et de son enseignement constant.
Et confondre si nécessaire ceux qui voudraient les modifier !
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