Nouveau Rituel du baptême : le cri d’alarme d’un exorciste

Publié le 05 Nov 2016
Nouveau Rituel du baptême : le cri d’alarme d’un exorciste L'Homme Nouveau

Dans son ministère de prêtre exorciste le Père Jean-Régis Fropo a fait un double constat : le Rituel du baptême des petits enfants de 1970 a été tant expurgé qu’il ne combat pas l’influence démoniaque pouvant opérer dès la naissance et même dans la vie intra-utérine, comme les sept exemples qu’il donne le montrent.

J’ai été prêtre exorciste dans le diocèse de Fréjus-Toulon (Mgr Dominique Rey) de 2005 à 2014 et j’ai reçu des centaines de personnes en souffrances diverses et pour des causes souvent mélangées, psychologiques et maléfiques. Plusieurs cas rencontrés dans mon ministère en France et à l’étranger m’ont alerté sur la question du Rituel utilisé lors du baptême des petits enfants. Ces cas sont les suivants.

1. Cas de Michel

J’ai rencontré Michel pendant une session de l’Emmanuel à Paray-le-Monial, l’été 2006. Il s’était présenté au service « écoute » pour demander une prière de délivrance. Très rapidement, les responsables de ce service se sont rendu compte que c’était un cas sérieux. Un entretien avec lui m’a montré qu’il souffrait de différents troubles depuis longtemps et cela sans explication d’ordre médical. Dès que j’ai commencé à prier pour lui, des manifestations se sont produites (gesticulations, cris…).

J’ai demandé à Mgr Benoît Rivière, évêque d’Autun, la permission de pratiquer une prière d’exorcisme. Trois temps de prière ont été pratiqués avec un autre prêtre et trois laïcs expérimentés. Ils ont été très mouvementés et éprouvants. Il semble qu’ils aient abouti à une délivrance au moins partielle. L’origine de ces troubles semble avoir été une forme de « consécration » faite sur lui au moment de sa naissance : il a été difficile d’en savoir plus… car ces rites (vécus aux Antilles) doivent rester secrets. On peut craindre qu’il s’y mêle des pratiques relevant de la sorcellerie.

Michel est né aux Antilles en 1969, il est de race noire. Engagé dans l’armée, il s’est marié en 1995 et il a deux enfants. Il a été baptisé en 1970 à la Martinique probable­ment selon le nouveau Rituel entré en vigueur en 1969.

Comment se fait-il que cette « consécration » maléfique n’ait pas été neutralisée lors de son baptême ?

2. Cas de Christine

Elle est née en 1971 et a été baptisée en 1972, selon le nouveau Rituel. Son milieu familial était très pauvre à tous points de vue ; elle était le fruit d’un adultère de sa mère. Sa vie a été perturbée dès son enfance et elle a eu un parcours personnel désordonné. Je l’ai rencontrée la première fois en juillet 2006 ; lors des exorcismes, les manifestations du démon ont été très violentes. Lors du vingt-neuvième exorcisme, en février 2007, le démon a dit : « Je suis venu en elle dès sa naissance, parce que sa mère la haïssait… elle n’était pas de son mari. » Une sœur présente à la prière a confirmé par charisme qu’un esprit de haine l’avait possédée dès sa naissance ; elle était donc victime de cette possession depuis ce moment-là.

Comment se fait-il que Christine n’ait pas été libérée de cet esprit de haine lors de son baptême ?

3. Cas d’Albert

Ce jeune garçon âgé de 13 ans en février 2008, a été baptisé et élevé dans une famille catholique pratiquante ; il a commencé le catéchisme en 2005 mais, rapidement, a refusé de continuer ainsi que d’accompagner sa famille à la messe du dimanche. Son milieu familial est tout à fait normal et paisible. Albert a une sœur plus âgée et un frère plus jeune. Le comportement de cet enfant a toujours posé problème pour ses parents : accouchement très difficile (trois tours de cordon autour du cou), bébé criant souvent, mauvais sommeil. Très jeune, il avait de fortes impulsions de violence, prenait facilement un couteau pour menacer ses proches. On l’a surpris prenant en cachette un chiot pour le martyriser. Le problème s’est aggravé quand il a été surpris à l’école se livrant à des attouchements sur ses camarades ; plus grave, il a sollicité un jeune cousin pour une tentative de fellation. Ses parents ont été très déconcertés, car ce genre de gestes ne pouvait pas lui avoir été suggéré par son environnement habituel.

Sa mère s’est alors souvenue qu’elle avait subi une agression sexuelle grave alors qu’elle était enceinte de cinq mois de ce garçon. Cette agression s’est consommée dans un viol. Il est probable qu’un esprit d’impureté s’est emparé de l’enfant à l’occasion de ce viol, ce qui expliquerait en partie son comportement déviant. Cela m’a été confirmé par le résultat de la prière de délivrance que j’ai faite pour lui : les comportements déviants d’Albert ont complètement disparu.

Comment se fait-il que lors de son baptême cette emprise d’un esprit impur n’ait pas été éliminée ?

4. Cas d’Étienne

Étienne est né en 1975 dans une famille catholique. Pratiquement, depuis sa naissance, il souffre de troubles inexpliqués par la médecine : obsession de blasphèmes, fortes angoisses, insomnies, pulsion de haine contre sa mère, pulsion de mort. Dès sa puberté, il a été saisi par une frénésie de jouissance sexuelle. À 16 ans, il fait une rencontre du Christ et se convertit : les troubles subsistant, il est pris en charge successivement par plusieurs prêtres exorcistes. Ces exorcismes sont très violents et manifestent un véritable cas de « possession » depuis sa vie dans le sein de sa mère : cet état a été reconnu par son évêque. L’origine de cette emprise s’explique alors par les agissements criminels d’un oncle, prêtre d’une secte satanique, qui a pratiqué un rituel de sorcellerie contre son neveu à sa naissance. Le baptême reçu à quelques semaines a été sans effet sur ces « liens ». (On parle d’« emprise maléfique » ou de « lien maléfique » lorsqu’on constate que le sujet est sous l’emprise ou la suggestion quasi permanente d’un ou plusieurs démons ; cet état est différent de la « tentation » qui est une attaque ponctuelle. On parle d’« obsession maléfique » lorsque l’emprise agit au niveau psychique ou mental, et de « vexation » lorsqu’elle s’exerce directement sur le corps).

5. Une famille m’amène un enfant de 7 ans d’origine coréenne et de milieu païen ; ils l’ont adopté alors qu’il avait 4 ans et l’ont fait baptiser peu après. Cet enfant souffre de troubles inexpliqués qui disparaissent après une prière de délivrance. Ils sont nombreux aujourd’hui les enfants adoptés en Europe, provenant de pays lointains et dont on ignore tout de leurs origines humaines et religieuses ; ils sont souvent nés dans le paganisme local et peuvent être sous une emprise maléfique. Les exorcismes du baptême devraient les délivrer, ce qui n’est pas le cas.

6. Cas des « pays de mission »

J’ai exercé mon ministère plusieurs années au Sénégal : dans ces pays (Afrique, Asie) il est fréquent que l’on baptise des enfants de parents non baptisés eux-mêmes (problème de la polygamie) ou chrétiens depuis seulement une ou deux générations. Les ascendants païens de ces enfants ont certainement touché à la sorcellerie et ont contracté des liens maléfiques : ces liens passent quasi obligatoirement sur les descendants et de préférence sur les petits enfants. Il est donc primordial pour ces pays que le Rituel du baptême comporte des exorcismes explicites. J’ai pu le constater moi-même lors d’une session à Lomé (Togo).

7. Les agissements des membres des sectes sataniques

Michela, dans son témoignage de conversion après des années passées dans une telle secte, s’exprime : « Des gynécologues et obstétriciens travaillant dans les hôpitaux faisaient partie de la secte (satanique) : ils y pratiquaient la consécration à Satan de tous les nouveau-nés à l’instant même où ils venaient au monde, en utilisant le sang du placenta. Personne ne pouvait s’en apercevoir parce que les formules étaient prononcées mentalement et qu’aucun rite ou geste particulier n’était nécessaire » (Michaela, J’ai quitté Satan, préface du cardinal J.S. Martins, Éd. Bénédictines, 2009, page 96).

Ces sept exemples mettent en lumière une influence démoniaque dès la naissance et même intra-utérine.

Les faiblesses du Rituel

Les enfants concernés ont été baptisés selon le Rituel rénové d’après le concile Vatican II. Celui que j’ai entre les mains a été promulgué le 15 mai 1969 par la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements et signé par le cardinal Gut, préfet, et A. Bugnini, secrétaire. On peut légitimement se poser la question : « Comment se fait-il que les exorcismes prévus lors du sacrement du baptême n’aient pas délivré ces enfants de ces emprises maléfiques ? ».

Si nous examinons le Rituel de 1969, on peut noter ce qui suit.

Dans le paragraphe intitulé « Prière d’exorcisme et de délivrance » on lit :

124. Le célébrant dit : « Père tout-puissant, tu as envoyé ton Fils unique dans le monde pour délivrer l’homme, esclave du péché, et lui rendre la liberté propre à tes fils ; tu sais que cet enfant comme chacun de nous, sera tenté par les mensonges de ce monde et devra résister à Satan ; nous t’en prions humblement : par la Passion de ton Fils et sa Résurrection, arrache-le au pouvoir des ténèbres ; donne-lui la force du Christ, et garde-le tout au long de sa vie. Par Jésus le Christ, notre Seigneur. Amen. »

On connaît la tradition ininterrompue de l’Église catholique concernant les prières d’exorcisme avant le baptême : Clément d’Alexandrie, Tertullien, Hippolyte de Rome, Cyprien de Carthage, Cyrille de Jérusalem, Jean Chrysostome, Augustin. On peut dire qu’il y a un « consentement unanime des Pères sur ce sujet ». J’ai moi-même constaté sur un cas difficile que le seul rite du baptême donné à un adulte ne provoque pas la libération de la personne (On constate d’expérience que les liens maléfiques résistent aux sacrements : un baptisé peut pratiquer régulièrement les sacrements de pénitence et d’Eucharistie et conserver des « liens » contractés avant sa conversion. Lorsqu’un adulte fait l’expérience d’une conversion et d’une rencontre personnelle parfois forte avec Jésus Seigneur et Sauveur et s’il est baptisé catholique, l’Esprit Saint lui révèle à la fois son état de pécheur et la surabondance de la Miséricorde du Seigneur. Il se tourne alors spontanément vers le prêtre pour recevoir cette Miséricorde : celui-ci après l’avoir écouté et exhorté, lui donne l’absolution. Cependant, l’expérience montre que quelques mois après, le sujet retombe dans le péché grave. Cela peut avoir simplement comme cause sa faiblesse spirituelle, un manque de persévérance dans la prière et les sacrements. Mais cela peut avoir une autre cause : dans le cas où la personne a « pataugé » dans la boue des péchés mortels pendant des années (addictions diverses par exemple), non seulement elle a perdu la grâce sanctifiante de son baptême, mais encore elle a sans doute contracté des « liens » maléfiques avec divers démons. Ces liens n’ont pas été rompus par la seule « absolution ». Il faut nécessairement que le prêtre complète ce pardon par une prière de délivrance spécifique. Sinon, il n’aura fait que la moitié de son travail et le pénitent va retomber peu de temps après. Peu de prêtres, hélas, sont au courant de ce problème. J’ai eu le cas d’un catéchumène de 40 ans environ gravement possédé par une vie très désordonnée pendant vingt ans et par l’influence d’ascendants liés à la franc-maçonnerie. Une année d’exorcismes a précédé son baptême mais il a fallu les renouveler pendant une quinzaine de mois après son baptême et la célébration de celui-ci a été très mouvementée). On peut en conclure qu’une prière spécifique d’exorcisme est nécessaire non seulement pour les adultes mais également pour les petits enfants qui ont pu être victimes de liens avant ou juste après leur naissance.

Par ailleurs, si on consulte l’ancien Rituel du baptême (celui que j’ai en main est daté de 1956), on constate qu’il comporte deux longs exorcismes à la forme impérative et un exorcisme impératif sur le sel que l’on déposera ensuite sur la bouche de l’enfant. Il est évident, si l’on compare les deux Rituels, celui de 1956 et celui de 1969, que les prières d’exorcisme, pourtant portées par une très longue tradition, ont presque disparu du nouveau Rituel. Nous sommes devant « une rupture de tradition ». Le pape Paul VI lui-même s’est exprimé sur ce sujet dans son intervention du 15 novembre 1972 : « Dans la liturgie du baptême, on a raccourci les exorcismes. Je ne sais pas si ce fut là chose très réaliste et très bien trouvée (una cosa molto realistica e molto indovinata). » (Le démon, mythe ou réalité, René Laurentin, Fayard, 1991, p. 155). Le terme « raccourci » est minimaliste par rapport à la réalité, car toute trace de prière impérative a disparu, et le sens de la prière du n° 124 n’est pas vraiment explicite d’un exorcisme.

On a souvent peu conscience des terribles dégâts que provoquent des liens maléfiques sur la personne : douleurs corporelles, perturbations psychiques, difficultés relationnelles… c’est l’ensemble de la vie de la victime qui est atteinte dans sa santé physique et psychique, ses relations familiales, professionnelles, sentimentales. Et quand cela dure pendant des années, j’ai pu constater que c’était très lourd à porter pour l’intéressé et son entourage. Certes, les cas cités sont relativement exceptionnels mais je constate qu’ils ne sont pas rarissimes ; en conséquence de la paganisation croissante de notre société, ils risquent d’être de plus en plus nombreux. Par ailleurs, ils sont certainement nombreux en pays dits « de missions », Afrique, Amérique du Sud, Asie. Si l’on réfléchit que des millions d’enfants reçoivent le baptême catholique chaque année selon ce rituel probablement déficient, on mesure l’ampleur du problème. Ce n’est pas un détail !

Comment faire face à cette situation ?

J’ai voulu avertir les responsables de ces questions à Rome, plus exactement le Préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements. Plusieurs tentatives sont restées sans résultat et c’est seulement au mois de mai 2016 que j’ai obtenu une réponse du cardinal Robert Sarah, nouveau Préfet de cette Congrégation. Celui-ci me fixa un rendez-vous à Rome au siège de la Congrégation. Je compris que le cardinal Sarah recevait favorablement mes remarques et qu’il les faisait siennes. Cependant, la charge de travail actuel de la Congrégation ne lui permettait pas d’envisager une réforme du Rituel du baptême des petits enfants dans l’immédiat. À ma question : « Alors, Éminence, que faire ? », il me répondit : « Avertissez les évêques ».

Rentré en France, j’ai rencontré Mgr Guy de Kerimel, évêque de Grenoble, responsable pour la CEF des questions touchant à la délivrance et à l’exorcisme. Il semble avoir bien compris le problème et m’a assuré qu’il transmettrait ces remarques à la Commission épiscopale en charge de la liturgie. Début juillet 2016, j’ai rencontré Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon. Celui-ci revenait du Congrès « Sacra Liturgia » qui venait de se tenir à Londres en présence notamment du cardinal Sarah. Réfléchissant ensemble, une solution s’est peu à peu dégagée de nos réflexions : le motu proprio de Benoît XVI Summorum Pontificum du 7 juillet 2007 libéralise l’ensemble des Rituels précédant le concile Vatican II et en autorise l’usage, en particulier le Rituel du baptême des petits enfants. Pour le monde francophone, ce Rituel, latin-français, date de 1956 et porte les références suivantes : Rituale parvum ad usum diocesium gallicæ linguæ, Maison Mame.

Tout curé, conscient des déficiences du rituel de 1970, peut donc utiliser ce rituel de 1956 ou 1962 sans autorisation particulière.

Une nouvelle édition de ce rituel est prévue par l’abbaye Sainte Madeleine du Barroux mais pas avant 2017 ou 2018.

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