Jeudi et vendredi, le sommet pour un nouveau pacte financier mondial se tiendra à Paris, réunissant plusieurs chefs d’Etats et organisations internationales. L’objectif serait de former une alliance mondiale en vue de lutter contre tous les défis actuels. Est-ce la solution face à la crise que nous traversons ? Qu’en pense l’Église ?
Ces 22 et 23 juin prochains, le Palais Brongniart, l’Unesco et l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economique) accueilleront le sommet pour un nouveau pacte financier mondial. Plus de 100 chefs d’État ou de gouvernements sont attendus, plus de 300 États et organisations internationales seront représentés. Le président de la République Emmanuel Macron ouvrira le sommet ce jeudi matin.
« La lutte contre la pauvreté, la décarbonation de notre économie, afin d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, et la protection de la biodiversité sont étroitement liées. Nous devons donc nous accorder conjointement sur la meilleure façon de faire face à ces défis dans les pays pauvres et les pays émergents du monde en développement », a affirmé Emmanuel Macron. Le but de cette réunion mondiale revient à réunir les États du nord et les États du sud.
Le président français cherche à former une alliance mondiale. Les représentants sont donc variés. La première ministre de la Barbade, micro-état insulaire situé dans les caraïbes, a quant à elle affirmé que « nous devons construire, ensemble, un système financier international plus réactif, plus juste, et plus solidaire permettant de lutter contre les inégalités, de financer la transition climatique, et de nous rapprocher de l’atteinte des objectifs du développement durable ».
L’idée d’une alliance mondiale n’est pas nouvelle. Dans le cadre de ce sommet, ce pourrait être une réponse aux crises économiques que nous traversons. Dans son encyclique caritas in veritate, le pape Benoît XVI affirmait que « la crise devient […] une occasion de discernement et elle met en capacité d’élaborer de nouveaux projets » (n°21). L’idée de globalisation est-elle la solution ?
Critique du « gigantisme »
Dans son livre Small is toujours beautiful, Joseph Pearce, auteur et professeur de Littérature à l’Université Ave Maria en Floride, explique le processus de croissance mondiale. Il montre notamment qu’au XIXe siècle, c’est la révolution industrielle qui a augmenté la production. Les échanges entre les États ont également été permis par l’essor de l’empire britannique. La mondialisation va de pair avec la progression du commerce.
Cependant, l’auteur remarque également que « ce développement économique a provoqué et même dépassé l’emballement démographique, faisant en sorte que la relative prospérité matérielle des uns s’accompagne, pour les autres, de bouleversements sociaux majeurs »[1]. La croissance économique mondiale augmenterait donc les inégalités. Joseph Pearce se pose cette question : « si la croissance économique apporte davantage de richesse matérielle, apporte-t-elle aussi davantage de bonheur ? » Il souhaite ainsi manifester que la mondialisation ne semble pas être la solution pour la pleine croissance de l’homme, notamment au niveau spirituel.
Dans un article parut dans la revue Liberté politique de juin 2012, Jean-Yves Naudet, président à l’époque de l’Association des économistes catholiques, affirme que la dette française provient majoritairement de l’administration publique centrale. Il estime que 80 % de la dette vient de là. [2]. Or, la mondialisation renforce une centralisation autour d’une autorité mondiale qui dirigerait tous les États.
Ce qu’en dit l’Église
Cette idée d’une direction mondiale va à l’encontre du principe de subsidiarité défendu par l’Église. En 1931, le pape Pie XI publiait l’encyclique quadragesimo anno dans laquelle il définissait ce principe. Il affirmait : « ce serait commettre une injustice, en même temps que troubler d’une manière très dommageable l’ordre social, que de retirer aux groupements d’ordre inférieur, pour les confier à une collectivité plus vaste et d’un rang plus élevé, les fonctions qu’ils sont en mesure de remplir eux-mêmes ».
En 2004, le compendium de la doctrine sociale de l’Église reprend cette citation, défendant ainsi le principe selon lequel l’État doit être une aide pour permettre aux sociétés inférieures d’accomplir ce pour quoi elles sont faites.
L’Église, dans sa doctrine, défend que la communauté politique doit être « l’unité organique et organisatrice d’un vrai peuple » (n°384). Elle ne parle pas d’un gouvernement mondial au-dessus de tous les Etats. Dans le compendium de la doctrine sociale, elle rappelle que « Le Magistère reconnaît l’importance de la souveraineté nationale, conçue avant tout comme expression de la liberté qui doit régler les rapports entre les États » (n°436). Il s’agit avant tout de permettre à chacune des communautés politiques de se développer, « dans la conviction que le bien commun d’une nation est inséparable du bien de la famille humaine tout entière » (n° 435).
L’Église souhaite avant tout que chacun puisse accomplir ses devoirs dans la société, et que l’État soit au service de cette vocation. Le magistère affirme ainsi que, pour défendre les deux principes majeurs que sont la solidarité d’une part et la subsidiarité de l’autre, « l’intervention de l’État dans le domaine économique ne doit être ni envahissante, ni insuffisante, mais adaptée aux exigences réelles de la société » (n°351).
[1] Joseph Pearce, Small is toujours beautiful, p. 46.
[2] Jean-Yves Naudet, une dette publique immorale, in Liberté Politique, n°57, juin 2012 ; p. 18.
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