La pause liturgique : Kyrie 11 Orbis Factor (temps ordinaire)

Publié le 14 Juin 2025
communion kyrie introït séquence pâques ascension glória

Messe Orbis factor

 

Commentaire musical

Kyrie 11 Partition kyrie

 

Après le Kyrie 8 de la messe des anges, c’est probablement ce Kyrie qui est le plus célèbre et le plus connu des fidèles. Il se chante habituellement les dimanches du temps ordinaire. Il existe sous deux formes, l’une plus brève et plus antique (Xe siècle) (noté 11 A dans le graduel de 1974, ou 10 ad libitum dans le graduel de 1908) ; l’autre plus prolixe, la plus connue, qui n’est qu’un développement mélodique du précédent, et qui se serait propagée entre le XIVe et le XVIe siècle, en France ou peut-être en Angleterre.

C’est un Kyrie du 1er mode, admirable de paix et de sérénité. La présence du Sib adoucit encore l’atmosphère générale qui se dégage de cette belle composition qui demande une exécution très calme, assez large et pleine au plan vocal.

Il suit un schéma différent selon les deux formes. Pour le Kyrie 11 A, le plus ancien, on a un schéma de type abcd : trois Kyrie identiques, trois Christe identiques, deux Kyrie identiques et le dernier Kyrie qui est original. Le Kyrie 11 B, le plus récent, suit quant à lui un schéma de type abac : les deux avant-derniers Kyrie reprenant la mélodie des trois premiers Kyrie, seule la mélodie du dernier Kyrie est originale.

Entre les deux Kyrie, on peut observer des points communs et des petites différences. La mélodie des trois premiers Kyrie, sur le mot Kyrie seulement, est identique. De même la mélodie des trois Christe sur le mot Christe seulement. Par contre la mélodie des deux avant-derniers Kyrie est différente, celle du 11 B reprenant identiquement la mélodie des trois premiers Kyrie. Quant à la mélodie du dernier Kyrie, elle commence de la même manière mais se singularise pour chacun sur la vocalise de la syllabe finale du mot Kyrie. Enfin, la mélodie de eléison diffère entre les deux versions, à chaque fois.

L’intonation est typique d’un 1er mode : attaque sur le La, on touche le Sib, on se pose sur le La, puis un intervalle de quinte nous fait chuter vers le Ré grave. La formule de eléison, pour le 11 A, se déroule autour du Fa, du La et du Ré, en utilisant deux intervalles de tierce, tandis que celle du 11 B se déploie admirablement en trois beaux mouvements ternaires, du Fa jusqu’au Sib, puis du Sib jusqu’au Ré grave. Dans les deux cas, le Do, sous-tonique très ferme, prépare la cadence en Ré pleine de paix.

La mélodie du Christe, identique selon les deux versions, représente le sommet de toute la pièce. Elle part du La, puis monte subitement au Ré aigu, s’accroche à ce Ré par une virga pointée, puis module de façon très légère pour revenir au La. Le 11 B retrouve alors la longue formule montante puis descendante de eléison. Le 11 A, lui, n’utilise que la descente à partir du La.

Tandis que les deux avant derniers Kyrie du 11 B reproduisent à l’identique les trois premiers, ceux du 11 A ont une formule particulière qui joue entre le La et le Sol, avant la chute au grave sur le Ré. Les deux versions reprennent en outre chacune la formule des trois premiers Kyrie pour la mélodie de eléison.

Enfin, le tout dernier Kyrie est plus grave : il part du Ré, module autour du Ré en atteignant le Fa à l’aigu et le Do au grave, puis s’élève jusqu’au Sol dans les deux versions qui se séparent alors, la première (11 A) redescendant simplement par degrés conjoints jusqu’au Ré ; la seconde (11 B) modulant légèrement autour du Fa d’abord puis autour du Ré. Eléison est original pour le 11 A, demeurant au grave, entre le Do et le Fa, avant la cadence finale en Ré, identique pour le 11 B à toutes les formules précédentes.

Dom Gajard précise : « Nous sommes en présence d’une très jolie pièce, mais dans laquelle on perd facilement la perfection ! » Il recommande de donner de l’élan dans les montées (spécialement celles de eléison), avec un certain accelerando, et au contraire d’accompagner les descentes mélodiques d’un ritenuto.

L’attaque de Kyrie doit être ferme, nette, comme un appel bien lancé.

 

Depuis « e » de « Kyrie » (La Ré) élan vers la montée qui mène en crescendo vers le Si » (Fa Sol La Sib : souple), mais le Sib lui-même doit être plus doux. Puis une magnifique retombée : « leison », chaud, suppliant,

« Eleison » de « Christe » est semblable à celui de « Kyrie », mais il commence une tierce au-dessous de la mélodie précédente ; l’autre, une tierce au-dessus.

Exécution. – « Christe » : à plein, chanter « ste » en decrescendo, prendre le Fa doucement, puis faire sentir immédiatement la montée en crescendo.

Dans « Kyrie eleison« , toute l’expression, l’accent est sur « eleison« . Dans « Christe eleison« , l’expression est sur « Christe » ; « Eleison » est beaucoup plus chaud, prié ; ne pas respirer entre « Christe » et « eleison« .

Faire du Fa de « Eleison » (première note) comme une seconde retombée plus suppliante de « Christe« .

Dans le dernier « Kyrie« , il y a trois thèmes : le deuxième retombe sur la tonique comme le premier, mais il est plus fort, parce que plus engagé dans le grand crescendo vers « eleison« . Faire une grande montée vers cet « eleison« .

L’entonner nettement, nerveusement. Il est tellement priant.

 

>> à lire également : Éditorial du Père Danziec | Des paroles et des actes

 

Un moine de Triors

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