Deux violents séismes ont frappé la Syrie dans la nuit et la matinée du 6 janvier. Témoignage de Jean-Rémi Méneau, chef de mission de SOS Chrétiens d’Orient en Syrie.
Où étiez-vous et comment avez-vous réagi au moment des secousses ?
Quand nous avons été réveillés par le séisme, nous sommes sortis du lit, avons pris notre petite fille, et notre premier réflexe a été de nous réfugier sous la table. On est au rez-de-chaussée dans un immeuble de cinq étages, donc s’il s’était écroulé, cela n’aurait pas servi à grand-chose, mais nous n’avions pas d’autre choix.
Il y a eu ensuite un deuxième petit tremblement, plus léger et moins long. Entre les deux, j’avais eu le temps d’appeler les volontaires pour leur dire de mettre leurs chaussures, de se préparer à quitter l’appartement dès que possible. Il fallait sortir dans la rue pour éviter que les immeubles ne s’effondrent sur nous en cas de nouvelles perturbations.
Après la deuxième secousse, nous nous sommes abrités sur le trottoir en face de notre immeuble, et nous sommes restés trois heures dans le froid et sous la pluie, dans la peur de potentiels effondrements.
Nous avons quitté Alep à 8h avec notre chauffeur pour emmener ma femme et ma fille dans la famille à Homs, et nos volontaires à Dammas (leur appartement a été en partie endommagé).
Moi, je suis revenu à Alep pour évaluer les dégâts.
Quel est le bilan en morts et blessés aujourd’hui ?
Pour la Syrie, on compte plus d’un millier de mort, et plusieurs milliers de blessés.
SOS Chrétiens d’Orient déplore le décès du père Emad, de l’église grecque catholique d’Alep. On l’a retrouvé mort sous les décombres de son immeuble.
De quelle manière SOS Chrétiens d’Orient répond à ce type de crise ?
La phase d’évaluation doit être la plus rapide possible, afin de passer au plus vite à l’action.
Nous apportons notre première aide auprès des centres d’accueil. Ensuite, à moyen et à long terme, ce sera la rénovation des maisons endommagées pour que les gens reviennent vivre chez eux. Aujourd’hui, les portes et les fenêtres sont cassées, la plomberie est impactée, les chrétiens d’Alep se retrouvent dehors en plein hiver.
Quels sont les enjeux politiques et économiques de ce séisme ?
C’est inadmissible car entre la Turquie touchée par la même catastrophe, et la Syrie, c’est le jour et la nuit : la Syrie ne touche pas la même aide internationale que la Turquie alors que les deux pays sont quasiment autant touchés.
Les sanctions internationales pèsent sur la Syrie qui se voit donc privée de l’aide dont elle aurait besoin. Il faudrait que le parlement européen et les Etats-Unis lèvent ces sanctions, au moins de manière temporaire – car il serait naïf de croire que ce serait possible définitivement – pour que les Syriens puissent accéder à cette aide.
Les Syriens enduraient déjà la guerre civile et la crise économique, ils étaient déjà au fonds du puits, et voilà que se rajoute le tremblement de terre. La seule aide qu’ils recevront sera réservée aux zones gouvernementales, tenues par les kurdes et les djihadistes… Je crois que dans des conditions pareilles, il ne faut plus faire de politique.
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