> DOSSIER « Enquête sur l’Ultra gauche : Entre révolte et impasse »
Leurs manifestations et leurs exactions font la Une, leurs idées sont radicales, leurs causes très diverses et même contradictoires, leurs méthodes assez sommaires et leurs théories peu construites… Qui sont-ils et faut-il avoir peur des antifas, des Black blocs, des zadistes et autres « Soulèvements de la Terre » ?
L’ultra-gauche constitue une mouvance active, parfois violente, qui se révèle, à y regarder de plus près, comme un assemblage précaire de groupuscules plus ou moins isolés. Cette fragmentation limite sa capacité à produire une véritable massification de sa radicalité. En d’autres termes, il lui est difficile de créer l’effervescence populaire et l’union des forces nécessaires à la révolution qu’elle appelle de ses vœux. Ce phénomène peut être attribué à une erreur doctrinale fondamentale : aucune révolution n’émerge d’un soulèvement populaire brut ; elle résulte plutôt du travail d’une élite sous-jacente. L’idéologie de la révolution spontanée ne pourra jamais se concrétiser.
Atomisation de la gauche
Concrètement, l’isolement de ces groupuscules s’explique par l’atomisation de la gauche. L’unité ainsi qu’un leadership clair leur font défaut, en raison de la fragilité des relations entre la gauche traditionnelle (PS), l’extrême gauche (La France insoumise) et l’ultra-gauche activiste (antifas, etc.). Il convient de souligner que le fait sociologique majeur, comme pour tout engagement politique, réside dans le besoin de stabilité personnelle et familiale de l’individu. Comme le disait déjà Maistre, l’agitateur politique privilégiera souvent le repos au combat sur le long terme. La gauche en général, et l’ultra-gauche en particulier, souffrent d’un processus biologique d’essoufflement des générations : l’âge tend à déradicaliser. De plus, la division des forces au sein de l’ultra-gauche est exacerbée par la diversification des causes, allant de l’altermondialisme à l’écologisme, en passant par la libération morale (LGBTQI+) et le combat antisystème. La diversité des engagements, combinée à la guerre des egos et des clans, représente l’ennemi principal de ce doux rêve qu’est la « convergence des luttes ». Par le passé, des affrontements ont déjà eu lieu entre syndicats et Black blocs. À l’image de notre société, la gauche en général est parcellisée, et peu de militants sont capables d’adhérer à une action radicale. Un autre frein notable est ce qu’on peut appeler l’« ubérisation » des intelligences. Quel est le projet politique d’envergure…