Un avent pour les enfants

Publié le 04 Déc 2022
avent

La moisson des parutions de l’Avent se révèle particulièrement riche et heureuse cette année. Rien que de très belles choses ou presque. Le plus dur sera sans doute de faire un choix.

D’abord, bien entendu, les traditionnels calendriers de l’Avent, les vrais, car, depuis quelques années, la mode d’adapter le concept à toutes les sauces gagne du terrain. Le phénomène est curieux mais s’inscrit dans l’ambiance de déchristianisation schizophrénique actuelle. Alors que l’on interdit crèches, symboles religieux sur les marchés de Noël et toute allusion au mystère de la Nativité, il n’est guère d’enseigne commerciale qui ne trouve prétexte à proposer des calendriers de l’Avent sans Avent qui aboutissent, le 24 décembre, pas le 25, à l’arrivée du Père Noël et, dans l’intervalle, selon qu’ils s’adressent aux enfants ou aux adultes, proposent aussi bien des chocolats que des minis produits de beauté, voire des joujoux pour adultes fort scabreux. Que ne ferait-on pour gagner de l’argent grâce à une fête religieuse soigneusement vidée de son sens !

Il devient donc difficile de trouver dans le commerce des calendriers de l’Avent qui en soient vraiment.

En voici deux, destinés aux petits, qui ne vous apporteront que de bonnes surprises.

EE Accueillir le Prince de la Paix 1024x724 1 avent

Celui d’Anne de Thieulloy et Sara Ugolotti, Accueillir le Prince de la Paix. Mon calendrier de l’Avent (Emmanuel Jeunesse, 12,90 €) propose, dans une douce déclinaison de bleus et de blanc, un paysage de neige nocturne volontairement naïf d’une grande joliesse avec ses animaux de la forêt, hiboux, chevreuils, lapins, écureuils, ours, loups, conviés, autant que les humains, à venir à la crèche.

Ici, pas de petite fenêtre à ouvrir, mais une gommette à coller à son emplacement afin que, le grand soir, tout le monde se presse au berceau de l’Enfant. Loin d’être en quête d’une friandise, c’est l’intérêt de l’affaire, les petits sont invités chaque jour, en suivant le conseil quotidien à méditer une courte citation tirée de la Bible, des écrits d’un saint, ou de l’enseignement du pape François. Puis à mettre à l’épreuve leur bonne volonté afin d’avoir quelque chose à offrir, eux aussi, à Jésus : se soucier des personnes seules, sourire à ceux que l’on croise, faire l’aumône d’un bonnet chaud (qu’est-ce qu’il sera content …) au pauvre qui fait la manche dans la rue, rendre service, lutter contre ses défauts, mieux prier, etc.

L’on notera seulement, par les temps qui courent, qu’il n’est pas très avisé d’inciter les enfants à aller, au nom de la charité chrétienne, rencontrer des gens qui, l’actualité l’a prouvé, ne sont pas fatalement gentils et bien intentionnés … On peut espérer néanmoins que, si les parents gardent le contrôle de la situation, le pire sera évité.

en avant noel 2022 avec sainte jeanne d arc avent

Le calendrier de Parole et prière, accompagné de son livret de l’Avent, signé Inès d’Oysonville, Astrid Nougayrède et Jérôme Brasseur, En avant Noël 2022 avec sainte Jeanne d’Arc (7,90 €.) s’adresse à un public un peu plus âgé. Là encore, il s’agit de coller une gommette, représentant un personnage, historique ou pas, autour de la crèche dressée sur le parvis de la cathédrale de Reims puisqu’il s’agit de commémorer le centenaire du patronage de sainte Jeanne d’Arc sur la France.

Les efforts demandés sont hebdomadaires : apprendre et réciter la prière de Léon XIII à saint Michel, rendre service, aller se confesser, se soucier d’une personne seule. Chaque jour un bref récit raconte l’aventure de Jeanne, invite à y réfléchir et à prier. La page consacrée au duc de

Bourgogne se révèle une défense inattendue, de nos jours, du patriotisme. Quelques jeux et un examen de conscience complètent l’ensemble.

Un seul reproche : pourquoi avoir, dans un esprit de calembour déplacé, nommé Emma Bellerobe, la dame de la cour, Harry Cover, le soldat anglais, l’abbé Rézina et l’abbé Attitude, deux des juges de la Pucelle ?

La promee de Noel avent

La promesse de Noël ; mon merveilleux album de l’Avent d’Isabelle Chevillard (Emmanuel Jeunesse. 65 p., 19,90 €) n’est pas un calendrier de l’Avent mais un parcours s’adressant aux préadolescents.

Pour Roch et sa sœur Lucie, enfants de la haute montagne, l’Avent est vécu comme une ascension vers le sommet où Dieu nous attend. Bravant le froid de l’hiver, la neige, les précipices, les ténèbres, le frère et la sœur se mettent en marche le 1er décembre pour monter au-devant de l’Enfant divin qui s’abaisse jusqu’à nous.

C’est un très bel album aux illustrations minimalistes et élégantes, qui tiennent de l’enluminure, à offrir en complément du calendrier. Encordés avec leurs jeunes guides, les enfants partiront, sous la protection de Marie, vers les révélations merveilleuses de la Nativité. Le texte est riche, soigné, d’une vraie profondeur spirituelle, loin des niaiseries inarticulées que l’on donne trop souvent aux petits. Chaque jour, l’aventure progresse, porté par une prière, une réflexion. C’est parfait.

24 contes de Noel autour du monde avent

Passons aux récits et contes de Noël et commençons par 24 Contes de Noël autour du monde de Judith Bouilloc (Plein Vent. 94 p. 18 €).

Voici, chaque jour de l’Avent, une histoire à découvrir en même temps que l’on ouvre la fenêtre du calendrier. Inspirées souvent de récits traditionnels des provinces de France ou de l’étranger, ces nouvelles évoquent un bébé dragon apprivoisé qui veut aider sa petite maîtresse à fabriquer les fameux brédélés alsaciens, deux jeunes Polonais qui sabotent le réveillon familial en sauvant la carpe promise au sacrifice, la veillée de la Nativité de 1914 dans les tranchées, la légende de Saint Nicolas, les lumières de Lyon, un chaton tombé à pic d’un sapin de Noël, les rois mages, la crèche de François d’Assise, le miracle du poinsettia, la sainte Luce, un chevalier auquel il fallut subir une étrange métamorphose avant de comprendre la nécessité de l’Incarnation, un lutin provençal coquin voleur des treize desserts, la tragique et véridique histoire de Sadako, petite Japonaise morte des suites de la bombe atomique, une admirable méditation sur la paternité spirituelle de saint Joseph, la générosité d’une babouchka russe, les malheurs d’un petit santon cassé jeté à la poubelle, les impressions d’un vieux chien aveugle dans l’étable de Bethléem …
Tout est animé d’un esprit chrétien, les textes, assez longs, favoriseront le goût de la lecture. Le mélange d’illustrateurs est un peu moins heureux, le classique côtoyant le très moderne, mais disons qu’il y en a pour tous les goûts.

Raconte moi la belle histoire de Noel avent

Continuons par Raconte-moi la belle histoire de Noël (Artège Le Sénevé. 50 p. 14,90 €) dû, là encore à Inès d’Oysonville et illustré par Amandine Wanert.

Raconter l’histoire de Noël en partant du péché originel et de la nécessité du Salut est la meilleure chose à faire mais l’idée en vient rarement à ceux qui s’adressent aux enfants. Inès d’Oysonville a la sagesse de relier la faute d’Ève au fiat de Marie, puis de suivre l’évangile jusqu’à la visite des Mages, en évitant toutefois le massacre des Innocents, traumatisant.

Certes, il y a bien, ici ou là, quelques interpolations, permises au demeurant, qu’il s’agisse des médisances des commères de Nazareth concernant la grossesse de Marie ou les interrogations de Joseph, mais rien de déplacé. L’on notera une coquille : Bethléem est en Judée, pas en Galilée, et l’on regrettera que l’enfant Jésus pousse des « couinements », terme qui s’applique aux souris ou aux porcs, mais le texte est dense, bien plus qu’il ne l’est d’ordinaire dans ce type d’album et porteur d’une véritable catéchèse. Amandine Wanert brosse de beaux dessins colorés et joyeux, agréables à l’œil.

EE Lhistoire de Noel scaled 1 avent

Annette Langen et Martina Hoffmann sont le duo gagnant de l’édition religieuse allemande et proposent de très jolies adaptations de l’Histoire sainte, telle L’histoire de Noël (Emmanuel Jeunesse, 26 p., 14,90 €). Faut-il cependant attribuer à une erreur de traduction le fait de qualifier Marie de « jeune femme », ce qui pose un évident problème ? Quant au reste, rien à reprocher puisque l’on colle au récit évangélique.

Grands dessins éclatants de couleur, rappelant les illustrations pour la jeunesse des années 70 ; visages rapidement esquissés, mais non sans talent, animaux plus mignons les uns que les autres, ce qui importe aux enfants !

Des animaux, justement, ils n’en manquent pas dans ces albums. Voici, par exemple, d’Apolline Dussart Le Noël de Grisouille (Téqui, 30 p., 13,50 €).

Le noel de Grisouille avent

Il fait terriblement froid ce soir de décembre dans la forêt de Millevent. M. Grignoti le souriceau a hâte de regagner son foyer et retrouver sa famille au coin d’un bon feu. Mais, à côté de son terrier, la vieille étable est éclairée. À l’intérieur, un jeune couple et un nouveau-né que le bœuf et l’âne, malgré leurs efforts, ne parviennent pas à réchauffer … Comment offrir à cet Enfant la chaleur et le confort dont il a besoin ? Grisouille, le dernier-né des Grignoti, a une idée : si tous les animaux de la forêt se mettaient ensemble à l’ouvrage, ils auraient tôt fait de fabriquer des draps, une couverture, un édredon, un oreiller …

Quelle merveille que ce conte de Noël exquis, d’une grande délicatesse, délicieusement illustré par l’auteur dans des teintes chaudes et lumineuses, raconté sans mièvrerie avec beaucoup de style.

Les animaux fetent Noel avent

Restons dans le monde tendre et naïf des bêtes touchées par la grâce avec Les animaux fêtent Noël de Bernadette Bret-Pasquier et Ange Voslka (Téqui, 26 p. ; 7,90 €), six brèves nouvelles porteuses d’un riche enseignement. Un bœuf grincheux fait grise mine à l’âne qui a osé s’approcher de sa mangeoire, mais l’humble monture est porteuse d’un magnifique secret et le bœuf comprendra le prix de l’accueil et du partage.

Les bergers de Bethléem se sont mis en route vers la crèche, emmenant leurs plus belles bêtes pour les offrir à l’Enfant ; ils ont volontairement abandonné derrière eux un agneau estropié qui leur fait honte, mais le petit animal, malgré sa boiterie, se hâte sur sa patte malade vers le merveilleux rendez-vous …

Ignorante des traditions de Noël, la petite souris ne s’est jamais rendue à la crèche ; les autres animaux la pressent de les rejoindre ; elle va découvrir, éblouie, que Dieu aime et attend chacun d’entre nous.

Le chien et le chat sont mécontents : pourquoi ne sont-ils pas, eux aussi, dans la crèche ? N’en auraient-ils pas été plus dignes que l’âne et le bœuf ? Un peu de réflexion et d’honnêteté leur fera comprendre que chacun doit se tenir à la place que Dieu a voulue pour lui.

Il fait si froid que les oiseaux se sont cachés, oublieux de l’approche de Noël et du concert qu’ils doivent donner à l’Enfant. Le rossignol parviendra-t-il à les arracher à temps à leur confort égoïste ?

Un ânon songe au merveilleux récit tenu de son père qui, jadis, a porté sur son dos une mère et l’enfant qu’elle attendait, le Sauveur de la Création tout entière en personne. Pourquoi n’ai-je pas cette chance, pense le petit âne. Mais voilà qu’un homme le détache et l’emmène vers Jérusalem parce que « le Maître a besoin de lui. »

Tout cela est d’une profondeur que les adultes feront partager aux petits afin qu’ils saisissent bien le message de ces histoires ; les dessins sont charmants, avec, il faut le souligner, d’admirables visages humains quand tant d’illustrateurs actuels les caricaturent.

Le Noel de Francois d Aise avent

Frère Éloi Leclerc racontait, quant à lui, dans Le Noël de François d’Assise (Salvator et Éditions Première Partie, 40 p., 12,90 €) l’invention de la première crèche voici bientôt huit siècles.

Il fait froid en ce mois de décembre 1223 dans les Apennins. C’est pourtant là, sur ces collines couvertes de neige, vers le village de Greccio que le Poverello entraîne ses frères afin de célébrer avec les paysans ombriens un Noël pas comme les autres. Pour mieux faire saisir aux humbles l’immensité du mystère de la Nativité, il veut le rejouer, grandeur nature, avec de vrais personnages et de vrais animaux. Mais, tandis que l’on chante l’évangile, un miracle se produit qui prouvera à tous la sainteté de François.

Franciscain, le frère Éloi Leclerc avait mis toute sa tendresse dans ce récit destiné aux enfants, alliant profondeur et simplicité. Clémence Meynet, qui illustre cette réédition, propose de grands dessins délicats et naïfs alternant grisaille des paysages enneigés et chaleurs des intérieurs, délicatesse des visages, douceur des animaux. Au final, un délicieux album qui ne séduira pas que les enfants.

Le brigand de la crèche avent

Avez-vous déjà remarqué, dans les crèches provençales ou napolitaines, cet homme barbu, vêtu de bric et de broc, un grand couteau à la ceinture et qui n’ose pas trop s’approcher ? C’est un brigand, un bandit de grands chemins, enfin le rejeté, l’exclu du monde des honnêtes gens qui vont à la messe de minuit adorer l’Enfant. Un personnage pas très recommandable, sûrement, mais dont Catherine de Lasa et Armelle Talvende vous racontent l’histoire dans Le brigand de la crèche (Téqui, 30 p. 13,90 €).

Ce soir de Noël, en s’apercevant que l’oncle Léon, parent bougon et solitaire qui n’a jamais voulu se soucier de ses neveux, n’est pas venu se joindre à la procession en chemin vers l’église, les enfants décident d’aller le chercher, parce que Dieu ne fait pas acception de personne et qu’il y a de l’amour à donner à tous au berceau de Jésus. Seulement, tonton Léon, écrasé sous le poids de ses péchés, n’ose pas se mettre en chemin ; il en a trop sur la conscience, à commencer par tous ces biens volés qui l’entourent …

Si l’histoire, joliment écrite et pleine d’enseignements, est parfaite, l’on admirera spécialement les illustrations éclatantes de couleurs vives, les ciels d’un bleu splendide ruisselant d’étoiles, les visages rayonnants. Une bouffée de joie dans la grisaille du monde.

Le trésor de Petit Pierre avent

Une note plus grave pour finir avec Le trésor de Petit Pierre, signé Martine Bazin et mis en image par Joëlle d’Abbadie (Téqui, 27 p., 13,50 €).

Devenue très vieille, sœur Claire se souvient de ce soir d’hiver 1945, lorsque, elle était alors une toute jeune religieuse institutrice, l’on avait trouvé sous le porche de l’église un bébé blond, sans

doute né d’un amour inavouable, que sa mère avait abandonné … Les services sociaux l’avaient confié à de pieuses gens qui se désolaient de n’avoir pas d’enfants mais, très vite, Pierre s’était révélé différent, anormal, retardé, incapable de rien comprendre au monde des gens ordinaires. Et puis, comme l’avait dit le médecin, il ne vivrait pas longtemps …

Le grand chagrin de sa mère adoptive et de sœur Claire, le sachant condamné, était de ne pas arriver à lui faire comprendre les vérités du Salut. Du moins le croyaient-elles.

Jusqu’à cet Avent où l’enfant disgracié était venu, quelques jours avant de mourir, déposer au pied de Jésus ses improbables et pauvres trésors.

Autant le dire, vous allez pleurer à chaudes larmes mais quelle admirable leçon de vie, d’espérance, de foi et d’amour … Quant aux dessins de Mme d’Abbadie, ce sont, mais est-ce nécessaire de le dire, des merveilles de grâce et de beauté, d’un réalisme transcendé, jusque dans le moindre détail.

D’avance, heureux et saint Noël !

Anne Bernet

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