Les vêpres de l’octave de Pâques

Publié le 08 Avr 2020
Les vêpres de l’octave de Pâques L'Homme Nouveau

Les cérémonies qui célèbrent la Résurrection glorieuse du Christ comprenaient autrefois des vêpres à l’octave de la fête. Liturgies antiques attestées par différentes sources, elles exprimaient la joyeuse reconnaissance des baptisés envers leur Rédempteur.?

À Pâques, « solennité des solennités », les cérémonies de l’Église ont une richesse qui plonge ses racines dans la plus haute Antiquité. On pense bien sûr à la vigile pascale qui en constitue comme le sommet, mais l’Église de Rome a longtemps connu un rite particulier pour les vêpres des jours de l’octave.

Chacune de ces vêpres était « itinérante », car elles se chantaient en trois endroits successifs. On en trouve trace dans un des Ordines romani, recueils liturgiques anciens de Rome, qui remontent au VIIe siècle. Cependant, ce rite semble venir de plus loin. En effet, dans son Journal de voyage (380), la pélerine Éthérie raconte une célébration qui se déroulait à Jérusalem le soir de Pâques et qui rassemblait au Mont des Oliviers, avant le lucernaire (coucher du soleil), les nouveaux baptisés avec les moines et les plus fervents des chrétiens. Après le rassemblement à l’Éléona, lieu du sermon sur la Montagne, on montait au sommet, « à l’endroit d’où le Seigneur monta aux cieux », pour redescendre au Saint-Sépulcre (cf. ch. 39).

Pour la Rome du VIIe siècle, on sait par le Sacramentaire grégorien – autre recueil liturgique antique – le détail de chacun des jours de l’octave, avec les lieux des trois stations quotidiennes. Le dimanche, l’office commençait dans la basilique du Latran avec le chant de l’Alléluia et de trois psaumes. Puis, comme les jours suivants, on se dirigeait vers le baptistère voisin et l’on achevait la célébration à l’oratoire de la Sainte-Croix, également proche.

Abandonnées à Rome vers le XIIIe siècle, ces vêpres ont subsisté jusqu’à la dernière réforme liturgique chez les Prémontrés et dans certains diocèses (Angers, Nantes ou Paris). Voici leur déroulement dans les livres liturgiques parisiens. Au chœur de l’église paroissiale, on chante sous l’antienne d’un triple Alléluia les trois psaumes 109, 110 et 111. Le clergé et les ministres se dirigent ensuite avec le cierge pascal vers les fonts baptismaux au chant du psaume 112 avec l’antienne : « Le Christ est ressuscité et il a éclairé de sa lumière son peuple qu’il a racheté de son sang, alléluia ». Au baptistère, on chante : « Allez dans le monde entier, enseignez toutes les nations et baptisez-les au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit », pendant que le célébrant encense trois fois les fonts. Il dit ensuite une oraison demandant que ceux qui sont « délivrés de la mort du péché puissent avancer dans une vie nouvelle ». On gagne ensuite une seconde station, l’autel de la Sainte Vierge, par exemple, où après l’encensement une oraison demande de « jouir ici-bas des secours de la grâce pour en remercier Dieu de ses fruits dans l’éternité ». On se rend ensuite à la Croix au chant dupsaume 113, véritable hymne pascale, et l’on chante : « Jésus, que vous cherchez, n’est plus ici, il est ressuscité ; rappelez-vous ce qu’il vous a dit lorsqu’il était en Galilée, alléluia ». Vient alors l’oraison suivante : « Dieu, dont le Fils crucifié pour nous a daigné racheter le monde, faites que nous réjouissant de notre rédemption, nous puissions, par votre grâce, goûter aux joies éternelles. » Les vêpres s’achèvent par le refrain de cette semaine : « Voici le jour que le Seigneur a fait ; passons-le dans l’allégresse et dans la joie » (Ps 117,21), le Magnificat et l’oraison du jour.

Au-delà de leur intérêt historique, ces vêpres sont un cri de reconnaissance des baptisés au Christ ressuscité qui les sauve de la mort : « Dieu, qui, par la résurrection du Christ, nous avez fait revivre pour la vie éternelle (…) lorsque notre Sauveur apparaîtra dans sa majesté, revêtez d’une bienheureuse immortalité ceux que vous avez régénérés par le baptême » (autre oraison devant la croix).

Lire l’office ici. 

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