Sept semaines après la « bienheureuse nuit » de la Résurrection, l’Église célèbre la Pentecôte, d’un mot grec signifiant cinquante. Au cours des trois premiers siècles, ce mot désignait, sous la plume d’un Tertullien (mort v. 220), par exemple, ce que nous appelons temps pascal, comme pour montrer qu’il dépasse en longueur le temps du jeûne, la Quarantaine, origine du mot Carême.
L’Ancien Testament connaissait déjà une fête, cinquante jours après la Pâque. À l’origine, la fête dite « des Semaines » était un jour d’action de grâces pour les moissons et l’on y offrait les prémices des produits de la terre (cf. Ex 34, 22). Puis, elle devint l’anniversaire de l’Alliance, après la sortie d’Égypte (cf. Ex 19, 1-16). D’après des sources extra-bibliques, cette mémoire était généralisée au moment de la venue du Christ.
Mais c’est bien sûr la descente de l’Esprit Saint sur la Vierge Marie et les Apôtres que célèbre l’Église en ce jour. Jusqu’aux dernières réformes (1960 et 1970), la fête comportait même une vigile, qui reprenait des éléments de celle de Pâques, et une octave.
Pâques closes
Cette solennité, appelée jadis « Pâques closes », est, bien plus que la fête du Saint-Esprit, un mystère du Christ. En effet, « pour accomplir jusqu’au bout le mystère de la Pâque », le Père a « répandu aujourd’hui l’Esprit Saint sur ceux dont [Il] a fait [s]es fils en les unissant à (s)on Fils unique » (Missel romain [2002], préface). Un moine écrivait ainsi : « La Rédemption n’est pas un ouvrage discontinu. Jésus l’a faite tout entière ; personne ne lui succède ; le seul changement est que sa Présence intérieure remplace sa présence extérieure. Le Christ invisible, l’Esprit Saint qui était caché tout le temps dans le Christ, gouverne à présent l’Église et la gouverne avec une énergie, avec une efficience qui le rendent encore presque palpable et extérieur » (dom Vonier, + 1938).
C’est donc lors d’une théophanie que s’accomplit cette effusion, avec des signes rappelant l’Ancien Testament : « À la troisième heure du jour le monde retentit tout à coup d’un bruit éclatant annonçant aux Apôtres en prière la venue de Dieu. Car c’est de la lumière du Père qu’est issu ce beau feu divin » (Bréviaire romain [1961], hymne de matines). Et cette manifestation apporte aussi une révélation : « Jésus-Christ glorifié a répandu l’Esprit à profusion et Il l’a manifesté comme Personne divine, de sorte que la Trinité Sainte est pleinement révélée » (Abrégé du CEC, n. 144).
L’Église rendue visible
L’Église se rend elle aussi visible, par la prédication des Apôtres : « Le feu à la flamme vibrante a pris forme de langue pour qu’ils reçoivent le don de la parole et un amour ardent ». « Au souffle de l’Esprit Saint, ils sont intérieurement comblés de joie : ils parlent des langues diverses, et ils annoncent les merveilles de Dieu. » (Bréviaire romain [1961], hymnes de matines et laudes). Alors, « la mission du Christ et de l’Esprit devient la mission de l’Église, envoyée pour annoncer et pour répandre le mystère de la communion trinitaire » (Abrégé du CEC, ibid.).
Avec discrétion, la Vierge Marie se joignit aux Apôtres après l’Ascension. On la voit « appelant elle aussi de ses prières le don de l’Esprit qui, à l’Annonciation, l’avait déjà elle-même prise sous son ombre » (Lumen gentium, n. 59). Et saint Augustin ne craint pas de la considérer comme la « Mère des membres [du Christ]… ayant coopéré par sa charité à la naissance dans l’Église des fidèles qui sont les membres de ce Chef » (Sur la Virginité, n. 6). Quelle meilleure avocate, alors, pour nous obtenir de raviver le don de l’Esprit Saint ?