Réforme du CP, souplesse dans l’application de la réforme de 2016 pour les collèges,… le nouveau ministre de l’Éducation nationale semble vouloir réellement changer la donne. Mais Jean-Michel Blanquer y arrivera-t-il mieux que ses prédécesseurs ?
Qui est Jean-Michel Blanquer, nouveau ministre de l’Éducation nationale ? À en croire la grimace affichée par Najat Vallaud-Belkacem, la précédente locataire de la rue de Grenelle en apprenant le nom de son successeur, Jean-Michel Blanquer donnera peut-être à son ministère une orientation sensiblement différente de celle de ces dernières années. Il aura suffi qu’il offre un recueil de fables de La Fontaine à 150 000 élèves de CM2 avant leur départ en vacances en juin dernier pour que certains pleurent un ministre beaucoup trop « à droite » et que d’autres bondissent de joie pour ce ministre enfin « à droite ». Les étiquettes sont si faciles à coller, si commodes pour la pensée que journalistes et commentateurs cherchent à tout prix à savoir si Jean-Michel Blanquer est progressiste ou conservateur…
Dépasser les clivages ?
Mais, ces dernières décennies en sont la preuve, il ne suffit pas qu’un ministre de l’Éducation soit de « gauche » pour qu’enfin tous les élèves de quartiers défavorisés soient soudain parfaitement intégrés et il ne suffit pas que le ministre soit de « droite » pour que, brusquement, tous les enfants se prennent de passion pour le latin. Jean-Michel Blanquer ne cesse de répéter qu’il veut dépasser les clivages. Est-ce vrai ? Est-ce de l’esbroufe politique ? En tout cas, le ministre nous aura donné très vite à voir de quel bois il se chauffait puisque, à peine était-il arrivé rue de Grenelle qu’il amorçait plusieurs réformes.
La première est sans doute une plus grande liberté accordée aux établissements dans la mise en application de la réforme du collège de 2016. Concrètement, cela signifie notamment la possibilité pour les collèges de réhabiliter les classes bilingues et l’enseignement du latin. La « réforme de la réforme » laisse également une plus grande liberté sur le choix des thèmes des fameux « EPI », ces enseignements pratiques interdisciplinaires qui devaient initialement porter sur huit thématiques imposées par le ministère. Le collège idéal est encore bien loin, ne serait-ce que parce que nous sommes encore et toujours enfermés dans le modèle sacro-saint du collège unique, mais cette autonomie supplémentaire accordée aux établissements scolaires demeure une avancée plutôt positive.
Jean-Michel Blanquer s’est également fait remarquer en annonçant un retour à la méthode syllabique dans les programmes scolaires. Gilles de Robien, ministre de l’Éducation nationale de 2005 à 2007, s’y était essayé, sans succès. L’actuel ministre fait parler de lui comme un travailleur acharné qui ne semble pas prêt à se laisser marcher sur les pieds et peut-être sera-t-il capable d’en finir enfin avec des méthodes de lecture dont l’inefficacité a été maintes fois démontrée. Les incessantes réformes de ces dernières années avaient été telles que se réjouir d’une décision émise par la rue de Grenelle est devenu impensable pour beaucoup. Et pourtant…
Le CP à 12
Toujours pour le primaire, le ministre met en place le « CP à 12 » pour les établissements des zones défavorisées. Fait rare en politique, cette décision est, en théorie du moins, saluée par tous, syndicats compris. Qui, de fait, contestera qu’il est bien plus facile d’enseigner à de petits effectifs et qu’ils permettent un suivi bien plus individualisé que dans des classes bondées de 30 élèves ou plus ? Reste que l’application concrète du « CP à 12 » pose de vrais problèmes matériels, ne serait-ce que parce qu’il faut doubler le nombre de salles de classe et d’enseignants. Plusieurs écoles y sont néanmoins parvenues, il n’y a plus qu’à espérer que les résultats suivront.
Pour le lycée, Jean-Michel Blanquer parle déjà d’une réforme du baccalauréat, qui serait travaillée en concertation avec le ministère de l’Enseignement supérieur. Si les contours exacts ne sont pas encore définis, le ministre parle en tout cas de simplification, de la suppression de certaines épreuves et d’une plus grande importance accordée au contrôle continu. Puis il faudra s’attaquer au vaste problème de l’orientation post-bac, ainsi faite aujourd’hui que les élèves de terminale peuvent émettre jusqu’à 24 choix mais qu’un élève ayant eu de très bons résultats au bac peut finalement n’être admis dans aucune université…
Le ministre est déterminé à faire bouger les lignes mais saura-t-il mettre toutes ces mesures pratiques au service d’une vision plus large et juste de l’enseignement, qui suppose en premier lieu la liberté éducative des parents pour leurs enfants ?