À Dieu chère Christine (Rudent)

Publié le 07 Oct 2021
À Dieu chère Christine (Rudent) L'Homme Nouveau

Ce mardi 21 septembre, L’Homme Nouveau a appris le rappel à Dieu de son ancienne collaboratrice, Christine Rudent.

Quasiment un an après le retour à Dieu de Daniel Hamiche, L’Homme Nouveau est une fois encore en deuil. Notre vaillante Christine Rudent, qui fut de 2012 à 2018 l’interlocutrice privilégiée de nos abonnés, s’est éteinte après trois ans et demi de combat contre la maladie. Son enterrement a eu lieu lundi 27 septembre dernier, en l’église Saint-Clodoald à Saint-Cloud, célébré par son frère Henri de Penfentenyo (oblat de Saint-­Vincent-de-Paul) et en présence d’une très nombreuse assistance. Parmi celle-ci, on reconnaissait des dominicaines du Saint-Esprit, d’anciennes ambulancières de l’armée, mais aussi des personnalités comme Philippe de Villiers ou Hervé Rolland, président de la Fondation pour l’école.

À L’Homme Nouveau, Christine nous avait marqués par sa ténacité et son sourire, soucieuse en permanence du bien commun du journal, sachant être proche de chacun et ayant un don particulier de complicité avec les plus jeunes. Son bureau reflétait sa personnalité, égayé de photographies de Benoît XVI, certainement « son » pape de prédilection, mais aussi de ses proches, notamment les membres disparus de sa famille. Il y a quelques mois, elle était venue nous rendre visite – la dernière –, partageant avec nous un repas, toujours soucieuse de ne pas déranger, de ne surtout pas s’imposer, nous impressionnant par son souci constant de s’occuper des autres avant elle-même. Quelle leçon, à jamais inoubliable, de christianisme en acte !

À la fin de la messe d’enterrement, ses enfants ont tracé le meilleur et le plus juste portrait d’elle, rendant le plus beau des hommages à leur mère. Nous garderons d’elle le souvenir de son sourire, de sa serviabilité et de sa pugnacité. L’Homme Nouveau adresse toutes ses condoléances à son mari, Jean-Michel, à ses enfants, à sa maman, madame Michel de Penfentenyo, ainsi qu’à toute sa famille. Nous proposons aux lecteurs qui le souhaitent de s’associer au trentain que nous ferons célébrer pour le repos de son âme en nous adressant leur obole (soit par chèque à l’ordre de L’Homme Nouveau, soit sur notre site Internet).

Vous trouverez ci-dessous l’homélie prononcé par le Père Henri de Penefntenyo ainsi que l' »oraison » des trois enfants de Christine.

Christine 2

Homélie

À l’heure où Marie, notre sœur, avec toute l’Église, chantait les Laudes, et où, il y a trois ans, papa rejoignait son Seigneur, Christine nous a quittés, paisiblement, remettant sa belle âme à Dieu.

Ceux qui ont eu la grâce de la voir ces derniers jours ont été impressionnés, comme depuis le début de sa maladie, par son regard lumineux, son indéfectible sourire qui traversait l’épaisseur de ses souffrances.

Jean-Michel. Il y a 32 ans, Dieu t’avait confié ce trésor pour que tu la conduises à Lui. Patiemment, ensemble, vous avez grandi dans cet amour de Dieu et des autres, irradiant la paix profonde et communicative qui vous habitait et dont elle a été un témoin merveilleux. Tu as recueilli son dernier souffle, pour le confier à l’auteur de la vie.

Année après année, dans les larmes parfois, dans la confiance toujours, vous avez tissé les liens forts d’une intime union des cœurs. Tu as soutenu avec fidélité sa force dans l’adversité, pendant sa longue maladie, l’as faite grandir dans l’abandon à la divine Providence, qu’elle savait être la source de toutes grâces. Ainsi Dieu vous élevait l’un l’autre, Christine par son courage dans l’épreuve, toi par une patiente sollicitude de tous les instants.

Cette mission de sanctification mutuelle a commencé par le oui de votre mariage, et prend aujourd’hui un tour nouveau. Seul Dieu peut dire à quel point cette mission qu’il t’a confiée est accomplie, achevée. Dieu seul sait s’il l’a trouvée assez sainte pour entrer dans la gloire. Il ne nous appartient pas d’en juger. Cependant, le témoignage de courage, de force, de joie toute spirituelle dont vous avez fait preuve nourrit notre espérance qui est la certitude de l’amour inconditionnel et infini de Dieu pour sa fille.

Christine nous manquera-t-elle ? Oui, bien sûr ! Et combien ! Parce que nous sommes encore incarnés, faits de chair et de sang, d’émotions et d’affections. Elle n’aimait pas que l’on s’inquiète de sa santé, de ses maux, non pour les nier, mais parce qu’il y avait plus important pour elle que les seules vicissitudes de la nature. Sa compassion pour les autres, son désir profond de communiquer la paix, la joie intérieure était comme sa marque de fabrique. Elle ne voulait pas faire peser sur les autres ce qu’elle appelait ses petites misères, même au plus fort de ses souffrances, et elle nous entraîne dans ce mouvement vers le haut, vers Là-Haut.

Oui, elle nous manquera, mais nous savons qu’elle n’est pas absente, elle nous est toujours présente, différemment. Elle nous est présente dans le régime de la Foi que nous avons partagé avec elle, et tout ce que nous avons reçu d’elle. Elle nous est présente dans l’Espérance : en se fermant sur les réalités terrestres, son si beau regard s’est ouvert sur les réalités célestes. Désormais, c’est en Dieu qu’elle nous voit, et c’est en Dieu que nous la voyons. Elle nous est proche enfin par la charité, celle que nous lui devons par nos prières pour elle, en signe de gratitude pour tout ce qu’elle nous a apporté. Car elle nous a beaucoup donné !

Christine n’aimait pas les discours, elle n’aimait pas prendre la parole en public. Réservée, elle avait cependant un sens du contact personnel très développé : à l’aise avec tous, elle savait communiquer autrement que par les seules paroles. Sa grande sensibilité lui faisait rejoindre les cœurs et les toucher avec délicatesse en même temps qu’avec puissance. C’est ainsi que, durant ces trois ans et demi de maladie, lucide et discrète sur ce qu’elle vivait, elle a enseigné avec courage et vigueur une grande vérité qui touche à la fois la vie ici-bas, notre heure dernière, et notre vocation à la vie éternelle. Oui, elle a prêché pendant ces trois ans, prédication silencieuse mais si expressive, sur une grande vérité énoncée par le grand Saint Paul :

Nous ne perdons pas courage, et même si en nous l’homme extérieur va vers sa ruine, l’homme intérieur se renouvelle de jour en jour. (2 Co 4, 16)

Tout au long de sa vie, elle a connu les faux-plat montants des dépouillements successifs, des côtes plus raides et des arrachements douloureux, comme put l’être le don à Dieu de deux de ses enfants, Marie et Pierre-Joseph. La grâce de Dieu était à l’œuvre : son indéfectible et beau sourire même irrigué de larmes, irradiait une joie qui venait du plus intime de son âme. Elle a intérieurement pressenti que l’accueil de la croix était source de paix intérieure : « l’homme intérieur se renouvelle de jour en jour ». Ses derniers mois, et de plus en plus à mesure qu’elle approchait de ses dernières heures, la côte devenait plus raide, plus douloureuse. Et de son regard toujours lumineux émanait un abandon toujours plus grand à l’action purificatrice et vivifiante de Dieu.

Elle nous est toujours présente enfin par le sillage de joie qu’elle a laissé derrière elle. De la maternité Sainte Félicité, rue Blomet, à Notre Dame de Chrétienté, de ses stages comme conductrice ambulancière dans l’armée, au secrétariat de l’Homme Nouveau, mais aussi dans les services de charité chez les Petites Sœurs des pauvres où elle s’est dévouée, et tant d’autres actes de compassion, connus de Dieu seul, elle a su laisser un parfum de joie, de simplicité, apaisant les cœurs, détendant les esprits. Un prêtre de ses amis, qu’elle aimait beaucoup, m’écrivait : « Votre sœur c’est Marthe : non pas Marthe qui s’agite et qui se préoccupe de sa sœur qui est aux pieds du Maître : c’est « Marthe servait », le cœur à Dieu, les mains pour le prochain ».

Elle s’est préparée de longue date à cette rencontre avec son Seigneur, se savait aimée et pardonnée, sans la crainte de la mort, parce qu’elle vivait en compagnie des saints dans sa prière continuelle avec la Vierge Marie, son ange gardien, Iann dont elle avait recueilli le dernier souffle, papa aussi, et surtout, plus encore, avec Pierre Joseph qu’elle savait être un puissant intercesseur et qu’elle priait tous les jours. Ils faisaient partie de sa vie. Nul doute que lorsque les portes de l‘éternelle félicité s’ouvriront pour elle, elle leur donnera encore la joie !

Et s’il reste encore à purifier son cœur des dernières scories des inévitables imperfections et limites de la nature, soyons-en certains, c’est encore dans la joie, paradoxale certes, mais joie pure, celle d‘être totalement débarrassée par Dieu Lui-même de tout ce qui l’empêche de goûter l’éternelle joie divine.

Prions, demandons humblement à Dieu d’achever en elle ce qu’il a si bien commencé. Amen.

Christine 4

Oraison des trois enfants Rudent

Il est coutume, lors de ce genre de discours, de mettre en lumière toutes les qualités et les vertus du défunt, en prenant soin d’omettre ses faiblesses, ses vices et ses imperfections. L’avantage avec maman, c’est qu’en ayant beau chercher, c’est quasiment impossible de mettre le doigt sur une ombre au tableau. Il n’y a rien à cacher.

La maladie qu’elle a vécue pendant plus de trois ans et demi a renforcé ses innombrables qualités déjà bien présentes. Malgré toutes les épreuves qu’elle a pu rencontrer, elle y a fait face avec une force impressionnante, une humilité exemplaire, une foi inébranlable, un sourire lumineux et une espérance contagieuse.

La succession de complications et de douleurs liées à sa maladie, a changé sa vie ainsi que celles de son entourage, papa le premier. Elle a eu l’occasion de subir de nombreux traitements, et de visiter de nombreux hôpitaux. D’ailleurs elle prit le soin de faire la liste de ses cliniques préférées.

Les derniers jours auprès d’elle ont été d’une beauté infinie ! Nous avions des raisons d’être inquiets, tristes, et déprimés. Mais il nous suffisait d’entrer dans sa chambre pour y trouver une mère joyeuse, confiante, toujours positive et même amusante. Ceux qui l’ont visitée ces dernières semaines pourront vous le confirmer : nous ne pouvions qu’être apaisés auprès d’elle.

En principe le malade tire sa force de ses proches, avec maman c’était l’inverse.

Bien que pendant ce long chemin de croix, son corps se transformait et laissait les traces d’un combat de tous les jours, elle a su garder intactes toutes ses qualités.

Quel était son secret ?

Comment a-t-elle pu faire preuve d’autant d’énergie ?

Comment a-t-elle pu répéter tous les jours cette phrase si réconfortante : “J’ai la niaque !” ?

Comment, malgré son état, a-t-elle pu rester constamment positive, aussi battante ?

Ce qu’on a pu constater, c’est sa grande simplicité. Avec elle, pas de chichi. Elle portait la même attention à chacun, des plus illustres personnes aux plus petites gens.

Son secret, on en a une petite idée : maman a toujours fait ce pour quoi elle était faite, en cohérence avec sa vocation profonde : servir et aimer.

Servir avec le sourire, et aimer sans condition

Le service en tant que conductrice ambulancière.

Le service en tant qu’auxiliaire puéricultrice.

Le service et l’amour dans son mariage, comme une épouse modèle.

Le service et l’amour en tant que mère dans notre éducation.

Le service encore et toujours dans les activités de la paroisse, les pèlerinages, dans les écoles, pour les réunions de famille, pour les anniversaires, pour les vacances, etc…

Elle avait ce talent fou pour faciliter tous les types d’évènements. D’ailleurs, on s’excuse d’avance pour le pot à l’issue de la cérémonie, car il ne pourra jamais être à la hauteur de ceux organisés par maman.

Enfin, comme l’a souligné Jean-Marie, la souffrance qu’elle a vécu n’a fait qu’accentuer ses talents, ses qualités et sa force, elle n’a jamais cessé de servir et d’aimer les autres, dans les petits gestes, et dans les paroles réconfortantes.

Elle ne se plaignait jamais, même au fond du lit sous 40 de fièvre, avec une occlusion ou des douleurs insoutenables, les autres passaient toujours avant elle, prétextant qu’il pouvait toujours y avoir pire que ce qu’elle vivait.

Elle discutait toujours avec les autres malades, et prenait soin de minimiser ses souffrances par rapport aux leurs; elle ne voulait jamais déranger les infirmières et aides soignants, et préférait souffrir en silence.

Nous sommes convaincus qu’elle tirait cette force, ce courage et ce moral indéfectibles de la prière et de la fidélité à sa vocation de servante.

La souffrance est une épreuve, elle est insoutenable, elle semble injuste, et malgré cela, elle a provoqué d’innombrables fruits ! Qui n’a pas été profondément marqué par maman ?

Elle nous a tous rendus meilleurs.

Nous pensons surtout à papa : elle a fait de lui un héros de la fidélité dans le quotidien, inquiet certes, dépité parfois, mais toujours présent à ses côtés jusqu’à son dernier souffle, qu’il a recueilli humblement dans l’intimité de leur amour. Quels parents extraordinaires, quel modèle d’amour et de fidélité, quel abandon à la volonté divine, quelle confiance dans l’épreuve. Merci pour votre exemple !!

À l’instar de maman, sachons nous tourner vers les autres, être aligné à notre cœur et cultiver notre fidélité à notre vocation profonde.

Maman ne souffre plus, elle repose dans le Seigneur, elle est partie retrouver beaucoup de ceux qu’elle aime : Pierre-Joseph et Marie ses enfants, son papa, son frère adoré Yann, son neveu Guillaume, et son beau-père Jean-José avec qui, en ce moment, elle doit être en train ricaner et fumer des grandes clopes. Elle vit enfin sa meilleure vie, et nous sommes sûrs qu’elle est déjà affairée là-haut en train de ranger le paradis, trier les dossiers d’admission, demander à chacun s’il a besoin de quelque chose; libérée de sa souffrance, elle doit courir partout pour rendre déjà d’innombrables services et nous envoyer des cadeaux personnalisés du ciel.

Nous aurions voulu la garder plus longtemps, nous avons prié pour, mais nous avons dû nous plier au « fiat » et accepter que Sa volonté soit faite et non la nôtre.

Maman aurait pu continuer à illuminer la vie de tellement de gens ici bas , mais elle devait sûrement être trop précieuse pour le Seigneur qui la voulait auprès d’elle ! Nous savons qu’elle continuera à nous donner sa force, son courage et son merveilleux sourire de là-haut!

Que Jésus accueille cette belle âme qui a tant servi le monde !

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