Dans Politique Magazine (décembre 2020), Hilaire de Crémiers s’attarde sur un livre qui commence à faire parler de lui et dont nous pourrions faire les frais :
Depuis l’arrivée de la maladie qui a bouleversé le monde, certains ont acquis la certitude qu’elle avait été créée à dessein et répandue dans un but malveillant. Ce sont, nous préviennent les vérificateurs de la pensée, des complotistes, des conspirationnistes qu’il ne faut pas écouter, leurs propos étant nuisibles. Soit. Mais on a au moins le droit de dire que la crise qu’a provoquée cette maladie et sa gestion aux effets dévastateurs a offert une formidable opportunité aux partisans de quelques vieilles et inquiétantes idées, présentées immédiatement comme seul rempart possible contre les catastrophes sans nombre qui guettent l’humanité ?
Beaucoup de ces idées se retrouvent dans un projet dont le nom fait penser à un roman de science-fiction : The Great Reset (la grande réinitialisation ou la grande remise à zéro). Le monde et les humains seraient donc, pour les instigateurs de ce chambardement, semblables à un jeu vidéo bloqué : c’est ennuyeux, certes, mais il suffit d’appuyer sur la touche « reset » pour commencer une nouvelle partie.
Au cœur de ce prétendu recommencement se trouve le Nouvel ordre mondial, lubie qui, pendant des décennies, a agité conjointement les esprits soviétiques et américains – chose jamais bien définie, impliquant, sinon un gouvernement mondial, au moins la soumission des États à un centre de pouvoir auto-désigné qui les transcende. S’y ajoute la globalisation, si chère à Emmanuel Macron, consubstantielle au Nouvel ordre, et qui n’est que l’internationalisme des socialistes passé au tamis du faux libéralisme dont on observe partout les échecs et les méfaits. Un ersatz, donc, qui transformerait le monde en une vaste coopérative, où tout serait grand-ouvert et dont on ne sait pas qui le dirigerait. Et, bien entendu, la lutte contre le réchauffement climatique ne pouvait manquer à cette construction.
Les apologètes du Great Reset – le prince Charles et Klaus Schwab, ce dernier étant le père du Forum de Davos – sont enthousiastes. Pour l’un, la maladie a été « une occasion en or », pour l’autre elle « nous a donné une chance ». Les deux pensent à un changement radical du monde. « Il s’agit, selon M. Schwab, de [le] rendre moins clivant, moins polluant, moins destructeur, plus inclusif, plus équitable et plus juste que celui dans lequel nous vivions à l’ère pré-pandémique. » Un monde, en somme, comme un slogan bien-pensant. Le monde nouveau d’Emmanuel Macron qui, en l’annonçant dès 2017, a eu une fulgurante intuition, ou peut-être commençait-il à appliquer un plan. Dans ce cas, on peut imaginer que le programme de « réinitialisation » n’est pas la conséquence de la maladie, mais qu’il était préparé de longue date, et que le fléau est utilisé comme prétexte pour justifier son lancement. (…)
MM. Schwab, Soros, Gates et leurs amis savent comment nous éviter ce funeste destin. Ils ont aussi la certitude que d’autres maladies impitoyables vont nous frapper. Ils se proposent, donc, du haut de leur sagesse, de régenter le monde, de le transformer en un vaste sanatorium écologique. En somme, ils veulent s’assurer que, pour notre bien, la vie devienne véritablement invivable.