Au quotidien n°101 : le télétravail ou l’accélération du changement de société

Publié le 30 Nov 2020
Au quotidien n°101 : le télétravail ou l’accélération du changement de société L'Homme Nouveau

Mis en place à grande échelle en ce temps de Covid-19, mode de travail encouragé de manière persuasive par le pouvoir, le télétravail veut être imposé comme une nouvelle norme. Une décision d’autant plus facile à faire passer que ce mode de travail n’est pas, a priori, sans attraits. Mais à long terme il renforce la construction d’une société fondée sur l’individu et où le travail n’est plus qu’une affaire de production au-delà de tout renforcement du lien social, contrairement à ce que faisait ressortir Antoine de Saint-Exupéry dans Terre des hommes :

« La grandeur d’un métier est peut être avant tout d’unir les hommes, mais il n’y a qu’un luxe véritable et c’est celui des relations humaines. »

Mais nos gouvernants ont-ils lu Saint-Exupéry ? Pas sûr à découvrir cet article sur le télétravail paru dans La Croix (30 novembre) :

« Le télétravail restera la règle et devra être le plus massif possible », a rappelé jeudi Jean Castex. Le lundi précédent, le premier ministre avait demandé, à Matignon, aux partenaires sociaux de réfléchir à une deuxième phase « qui ne soit pas le 100 % télétravail comme aujourd’hui, mais ne soit pas non plus le retour au stade précédent ».(…)

Concrètement, l’accord national interprofessionnel (ANI) acquis jeudi dernier au terme de trois semaines d’intenses négociations pourrait apporter des pistes très utiles. Certes, et selon le vœu de départ des entreprises, ce texte accepté par toutes les organisations patronales et tous les syndicats (sauf la CGT) ne se veut « ni normatif ni prescriptif ». Mais volontairement très « opérationnel », il répète utilement la réglementation en vigueur que ce soit le code du travail ou le précédent accord de 2005 – le télétravail n’était encore qu’à ses balbutiements – qu’il vient compléter et préciser. Car, au-delà de la crise sanitaire qu’il n’aborde qu’incidemment, cet accord veut aboutir à une « mise en œuvre réussie du télétravail » – c’est son titre – dans des entreprises françaises dont la culture, relève un récent rapport de la fondation Terra Nova, reste marquée par le « présentéisme et les pesanteurs de pratiques managériales, encore fortement imprégnées ».

« Cette culture est encore aujourd’hui en France le frein principal à l’extension du télétravail », regrette la fondation pour qui « les chefs d’entreprise, nés et élevés dans le présentiel, doivent apprendre à apprivoiser le distanciel, pour eux-mêmes et pour leurs collaborateurs ».

Après le premier confinement, le télétravail a d’ailleurs fortement reculé au point que, selon The Economist, les salariés français sont ceux qui sont le plus retournés physiquement au bureau en Europe. D’après le ministère du travail, la France comptait en mars 5 millions de télétravailleurs contre seulement 1,8 million en octobre, sur un total d’au moins 8 millions de postes télétravaillables.

Pour réussir ce changement culturel, le récent accord national interprofessionnel incite donc très fortement à la discussion dans les entreprises. C’est d’ailleurs ce point qui a été le nœud le plus complexe des négociations.

Ce contenu pourrait vous intéresser

Société

La République du Panthéon

L’Essentiel de Joël Hautebert | En accueillant Robert Badinter, la République a poursuivi sa liturgie laïque au temple de ses héros. De l’église Sainte-Geneviève au sanctuaire des « grands hommes », le Panthéon incarne la substitution progressive du culte de Dieu par celui de la République.

+

robert Badinter panthéon
SociétéArt et Patrimoine

Transmettre le patrimoine vivant, un défi pour la France

Entretien | Malgré les difficultés et la disparition d’un tiers des événements en cinq ans, les Français restent profondément attachés à leurs traditions festives. Thomas Meslin, cofondateur de l’association « Les Plus Belles Fêtes de France », défend ce patrimoine culturel immatériel et veut lui redonner visibilité et dynamisme grâce à un label national et un soutien accru aux bénévoles. Entretien.

+

patrimoine
Société

Nos raisons d’espérer

L’Essentiel de Joël Hautebert | Malgré l’effondrement des repères et la crise des institutions, il demeure des raisons d’espérer. On les trouve dans ces hommes et ces femmes qui, par leurs vertus simples et leur fidélité au devoir d’état, sont capables d’assumer des responsabilités au service du bien commun.

+

espérer vertu
SociétéFin de vie

Euthanasie : « Pierre Simon voulait faire de la vie un matériau à gérer »

Entretien | Alors que le Sénat reporte une nouvelle fois l’examen du projet de loi sur la fin de vie, l’essayiste Charles Vaugirard publie La face cachée du lobby de l’euthanasie (Téqui). En s’appuyant sur les écrits oubliés de Pierre Simon, fondateur de l’ADMD et ancien grand maître de la Grande Loge de France, il dévoile les racines eugénistes et prométhéennes d’une idéologie qui, selon lui, continue d’inspirer les lois bioéthiques contemporaines.

+

euthanasie pierre Simon