Au quotidien n°221 : le sens de la durée et des réalité

Publié le 04 Juin 2021
Au quotidien n°221 : le sens de la durée et des réalité L'Homme Nouveau

Annonçant la succession qui s’opère au sein de la Ligue vaudoise, mouvement politique vaudois (Suisse), Olivier Delacrétaz offre dans La Nation (4 juin 2021) une réflexion politique d’une plus importante portée et que l’on n’entend guère en France.

Les nations résistent indéfiniment. Détruites ou dispersées, elles peuvent renaître. La Pologne, tant de fois amputée et dépecée, s’obstine à vivre. Israël, privé de sa terre durant presque deux millénaires, s’est reconstitué en Etat. L’homme politique sait que sa patrie existera encore quand il sera mort depuis longtemps. Il doit donc s’efforcer d’inscrire son action dans ce temps qui le dépasse. Or, il arrive tant d’événements imprévus –guerres, débâcles économiques, catastrophes écologiques, pandémies – qu’il est incapable d’imaginer l’avenir à long terme, sinon sous la forme trompeuse d’une extrapolation du présent. Ce qu’il peut faire, en revanche, c’est identifier les mécanismes permanents qui meuvent la communauté politique dans la durée. La soumission à ces données stables et objectives lui permettra de conserver le cap avec quelque assurance de ne pas s’égarer. Dans ses débuts, la Ligue vaudoise a longuement recherché ces références fondamentales, à la fois dans la philosophie réaliste d’Aristote et dans l’histoire si mal connue, à l’époque, du Pays de Vaud. Les esprits «modernes» jugent ces références dépassées et sans pertinence, préférant réciter leur sempiternel catéchisme étatiste, centralisateur, internationaliste et moralisateur. Et puis, voici qu’aujourd’hui, nous nous trouvons en résonance avec les tendances du jour. Les exigences d’une politique sanitaire efficace ont réhabilité aussi bien les frontières fédérales que les souverainetés cantonales, deux réalités politiques auxquelles nous vouons tous nos soins. La pensée écologique accorde une importance vitale à la production et à la consommation locales, non seulement en matière de légumes et de petits fruits, mais aussi de vêtements, de jouets, de médicaments, d’énergie, ce qui contraint logiquement les écologistes à reconnaître que le biotope humain local et vital –c’est-à-dire territorial et communautaire– est le Canton. La volonté de protéger les acquis salariaux helvétiques a permis à la gauche de redécouvrir les avantages sociaux des frontières politiques. Ces convergences, qui restent fragmentaires, ne nous en réjouissent pas moins. Elles n’étonnent que ceux qui préfèrent les idées toutes faites à la réalité. La durée, mieux que tous nos raisonnements, décante les actions humaines, en élimine le superficiel, le déclamatoire, l’illusoire, le faux, le blet. Placer son action dans la perspective du temps long ne prend pleinement son sens que si l’on y inscrit aussi le souci de sa succession. Ce souci fait partie intégrante de la charge, et pas seulement lorsqu’on se sent en bout de course.

Ce contenu pourrait vous intéresser

À la uneSociété

L’homme transformé (1/3) | Du totalitarisme au transhumanisme, la tentation de l’homme transformé

DOSSIER n° 1843 « L’homme transformé, l’illusion d’un salut sans Dieu » | Dans son essai L’Homme transformé, Philippe Pichot Bravard analyse un fil rouge de l’histoire moderne : la volonté de créer un « homme nouveau ». Des régimes totalitaires du XXᵉ siècle aux projets transhumanistes, cette utopie revient sous des formes différentes mais garde la même logique. Entretien.

+

homme transformé homme nouveau
À la uneSociété

La messe n’est pas dite : Zemmour réclame une bouée trouée

L’Essentiel de Thibaud Collin | Dans son nouvel essai La messe n’est pas dite, Éric Zemmour en appelle à un « sursaut judéo-chrétien » pour sauver la France. Mais sous couvert d’un éloge du catholicisme, l’auteur ne réduit-il pas la foi chrétienne à un simple outil civilisationnel ? Une vision politique, historique et culturelle qui oublie l’essentiel : la source spirituelle de la France chrétienne.

+

la messe n’est pas dite zemmour
Société

« Mourir pour la vérité » de Corentin Dugast : reconstruire notre vie intérieure

Entretien | Dans son nouveau livre, Mourir pour la vérité, Corentin Dugast rend hommage à Charlie Kirk, figure chrétienne assassinée pour son engagement, et appelle les catholiques à renouer avec une vie intérieure authentique. Entre prière, combat doctrinal et exigence de vérité, il invite à sortir de l’indignation permanente pour retrouver un témoignage chrétien ferme, paisible et profondément incarné.

+

Charlie kirk Amérique Corentin Dugast
SociétéÉducation

Éduquer à l’heure de l’intelligence artificielle

Entretien | Alors que l’intelligence artificielle s’immisce dans tous les domaines de la vie quotidienne, Jean Pouly, expert du numérique et des transitions, alerte sur les dangers d’une génération livrée aux algorithmes sans accompagnement et invite à reprendre la main sur nos usages numériques. Entretien avec Jean Pouly, auteur de Transmettre et éduquer à l’heure de Chat-GPT (Artège).

+

intelligence artificielle
SociétéBioéthique

Filiation : quand le lien se dissocie du vivant

C’est logique ! | La reconnaissance par la France de deux enfants conçus par PMA après la mort de leur père rouvre un débat fondamental : qu’est-ce qu’engendrer ? Entre lien biologique et reconnaissance juridique, la filiation se voit détachée de son fondement naturel, au risque de transformer une relation d’être en simple fiction légale.

+

PMA post mortem filiation