Lors de la dernière catéchèse sur la passion pour l’évangélisation et le zèle apostolique du croyant, pendant l’audience du 11 octobre, le Pape a parlé d’une des saintes préférées de Benoît XVI, qui lui avait d’ailleurs consacré une longue partie de son encyclique Spe salvi.
Née vers 1869 dans le Darfour, au Sud Soudan, Bakhita fut enlevée à 9 ans par des trafiquants d’esclaves, battue jusqu’au sang et vendue cinq fois. Toujours esclave, elle fut au service de la mère et de la femme d’un général, et elle fut chaque jour battue jusqu’au sang. Elle en garda, toute sa vie, de nombreuses cicatrices.
En 1882, elle fut vendue au consul italien Callisto Legnani qui fut ensuite contraint à revenir en Italie. Là, Bakhita, la chanceuse, connut un Maître totalement différent qu’elle appelait Paron, le Dieu vivant et son Fils Jésus-Christ. Jusqu’alors, elle n’avait connu que des maîtres qui la méprisaient et qui la maltraitaient ou qui, dans le meilleur des cas, la considéraient comme une esclave utile. Désormais elle connut le « Seigneur des seigneurs », la bonté en personne.
Elle apprit que ce Seigneur la connaissait, elle aussi, qu’il l’avait créée, et, plus encore, qu’il l’aimait. Elle était aimée par le Paron suprême, face auquel tous les autres maîtres ne sont, eux-mêmes, que des serviteurs. De plus, ce Maître, Jésus, avait lui-même été flagellé et couronné d’épines et maintenant il l’attendait à la droite de son Père.
Elle possédait maintenant une véritable espérance, non plus la petite espérance de trouver des maîtres moins cruels, mais la grande espérance d’être définitivement aimée par l’Amour en personne. Sa vie en fut complètement transformée : elle ne se sentait plus une esclave ; elle était rachetée et une fille libre de Dieu.
Elle comprit ce que saint Paul disait aux Éphésiens : avant ils étaient sans espérance parce que sans Dieu. Aussi, quand on voulut la renvoyer au Soudan, Bakhita refusa ; elle n’était pas disposée à être de nouveau séparée de son Paron. Le 9 janvier 1890, elle fut baptisée et confirmée, et reçut sa première communion des mains du Patriarche de Venise.
Le 8 décembre 1896, à Vérone, elle prononça ses vœux dans la Congrégation des Sœurs canossiennes et, dès lors, en plus de ses travaux à la sacristie et à la porterie du couvent, elle chercha dans ses différents voyages en Italie à appeler à la mission, en évoquant la libération qu’elle obtint à travers sa rencontre avec Jésus. L’espérance qui était née pour elle et qui l’avait rachetée, elle ne pouvait pas la garder pour elle, mais se devait de la donner au plus grand nombre de personnes possible. Elle fut canonisée par Jean-Paul II.
Le Pape rappelle la profonde actualité de Bakhita, dont nous venons de retracer en grandes lignes la vie. Le Soudan de nos jours est déchiré par un conflit terrible, malheureusement caché par les médias. Mais Bakhita prie pour son pays et lui rappelle l’urgence et la nécessité du pardon chrétien.
Une personne blessée à mort désire trop souvent se venger, ou du moins blesse assez facilement à son tour. Mais Dieu libère l’homme de ces entraves diaboliques. Bakhita, au lieu de se venger, a non seulement pardonné, mais elle est devenue une âme compatissante, souffrant avec les victimes et priant pour les bourreaux, non pas en justifiant leurs crimes, mais en les aimant et ainsi en les humanisant.
Elle nous offre une grande caresse : humaniser pour déifier. Elle méditait tous les jours la parole de Jésus pardonnant sur la Croix ; et en regardant Marie, elle aussi modèle du pardon qui libère, elle sut, comme saint Jean, la prendre pour Mère.