> DOSSIER | « Frassati, Acutis : Canoniser la jeunesse ? »
Les figures de sainteté juvénile semblent plus nombreuses depuis le XXe siècle, mais leur reconnaissance remonte à bien plus loin. Si l’appel universel à la sainteté s’adresse à tous les âges, l’Église exerce un discernement rigoureux avant de proposer de jeunes confesseurs ou vierges comme modèles.
La sainteté juvénile, proposée comme exemple, est-elle un phénomène récent ? Mentionnons de prime abord que l’histoire de la canonisation à travers les siècles présente deux phases bien distinctes. Depuis l’époque moderne, les règles de canonisation sont soigneusement établies. La fondation de la Sacrée Congrégation des Rites par Sixte V en 1588 visait en effet à faire appliquer dans l’univers catholique les réformes liturgiques du concile de Trente (1545-1563). Ce dicastère légiféra par conséquent sur le culte rendu aux saints : le calendrier sanctoral de nombreux diocèses et ordres religieux fut réduit et les conditions des enquêtes relatives à l’élévation sur les autels de nouveaux candidats furent précisées – rappelons que le culte des saints fut une des pierres d’achoppement de la réforme protestante, à laquelle le concile de Trente a voulu apporter une réponse adéquate.
Un ouvrage de référence
Les décrets sur la canonisation promulgués par Urbain VIII, qui gouverna l’Église de 1623 à 1644, puis ceux de Benoît XIV, pape de 1740 à 1758, définissent clairement et précisément la procédure des enquêtes touchant la vie, les écrits et les miracles d’un personnage mort en odeur de sainteté. Le traité De servorum Dei beatificatione et de beatorum canonizatione que ce dernier a rédigé entre 1734 et 1738, fort de son expérience de promoteur de justice (l’« avocat du diable ») à la Congrégation des Rites, constitue toujours un ouvrage de référence aujourd’hui. C’est donc à partir de l’époque moderne que le processus de canonisation devient centralisé et élaboré, au moins dans sa phase finale, par le Saint-Siège seul. Puisque ce n’est que depuis la fin du XVIe siècle que les enquêtes des procès sont imprimées et conservées, la question initiale prend cette nouvelle forme : la canonisation de jeunes saints est-elle, depuis que les règles de canonisation ont été uniformisées et précisément définies par le Siège apostolique, un phénomène récent ?
Seuls les martyrs

St José Luis Sánchez del Río (1913-1928).