Parcourir de l’intérieur le récit de la vie d’un écrivain comme Céline était un pari bien audacieux quand on sait à quel point le nom même de Céline déclenche les controverses. Ce pari est tenu et bien tenu par Stanislas de La Tousche qui interprète Céline avec une présence qui nous donne à entendre cette si singulière voix de l’humain. S’appuyant sur les derniers entretiens que Céline a donnés à la télévision à la fin de sa vie, il nous fait parcourir son itinéraire de vie : son enfance au passage Choiseul, ses années de formation, sa vocation médicale, ses débuts brillants en littérature, son rapport au monde des lettres, ses errements et son délire de persécution, son aversion pour la société consumériste dans laquelle nous baignons plus que jamais et jusqu’aux prédictions apocalyptiques avec l’invasion des Chinois. Un itinéraire, mais surtout un ton, une voix qui nous fait entrevoir ce que peuvent être les plongées nocturnes dans ces fonds de l’âme humaine où l’expression « il fait bon vivre » perd tout son sens. Céline, c’est une voix de détresse, mais une voix qui s’élève dans une célébration de la dérision pour ceux qui ne croient plus aux vertus de la guérison. Avec lui, les fulgurances côtoient le ridicule, le clochard et l’honnête homme se disputent la première place, la lucidité et l’aveuglement semblent faire bon ménage. Le tout, porté au théâtre avec une mise en scène bien ajustée pour la circonstance, offre au spectateur un résultat surprenant. Pris de bout en bout par cette voix qui ne vous quitte plus, le public est convié à écouter et à laisser les résonances de cette intimité partagée faire écho en lui. Une voix à entendre au plus vite !
Théâtre Les Déchargeurs, 3, rue des Déchargeurs, Paris Ier,
les mardis et mercredis à 21 h 15 jusqu’au 7 mars.
Tél. : 01 42 36 00 50.