> Enquête Quas Primas
Quas Primas, notre enquête rappelle combien la Royauté du Christ reste à comprendre, à expliquer et à faire reconnaître dans un monde qui s’y oppose.
À l’initiative de Maitena Urbistondoy, et sous sa direction, L’Homme Nouveau a publié pendant un an une enquête sur la réception et la compréhension de Quas Primas, l’encyclique de Pie XI sur le Christ-Roi. Cent ans après la publication de celle-ci, il est intéressant de noter que cette initiative provient d’éléments de la jeune génération qui cherchent à comprendre le décalage entre l’enseignement de Quas Primas et le discours dans lequel ils ont grandi. Leur avantage ? Ils entrent dans la discussion à frais nouveaux et sans amertume.
Des contributions libres
Cette enquête a donné la parole à des religieux, des prêtres et des laïcs. Ils se sont exprimés librement dans nos colonnes, expliquant leur approche d’un texte pontifical vieux d’une centaine d’années. Les lectures différentes et les tentatives de conciliation avec Vatican II ou au contraire d’insistance sur la rupture entre le Concile et Quas Primas démontrent, à elles seules, qu’il fallait revenir sur cette encyclique. Sur ce point, nous ne pouvons que constater que le problème reste entier.
À vrai dire, il ne pourra être résolu que par ce magistère pontifical quand le temps sera venu et quand il aura décidé de prendre à bras-le-corps le hiatus persistant. Sans nul doute, le travail des théologiens et les discussions qui se seront déroulées auparavant serviront à ce moment-là de matériaux. Mais ils ne sont pas la voix du magistère suprême.
La Royauté du Christ est une vérité de foi. Son implication sociale et politique ne tient pas seulement, si l’on peut dire, à des considérations théologiques, mais découle de ce qu’est l’homme par nature : un animal social et politique. L’homme ne peut pas vivre en dehors de la Cité, à moins, nous prévient déjà Aristote, d’être une bête ou un dieu. Par son incarnation, le Christ a revêtu la nature humaine et c’est (aussi) pourquoi il a vécu au sein d’une patrie et qu’il a pleuré sur Jérusalem.
Disons-le clairement, même si les mots choquent notre sensibilité moderne : le Christ a pris notre nature politique. De ce simple point de vue, sa Royauté ne peut qu’avoir une portée politique, même si celle-ci n’épuise pas (et de loin) et ne se réduit pas à celle-là. De ce fait, l’opposition que l’on dresse entre la nécessité de l’évangélisation et la proclamation de la Royauté politique du Christ est un non-sens. La grâce n’abolit pas la nature, elle la surélève. Les médiations naturelles ne disparaissent pas. Elles sont là au contraire pour créer les conditions extérieures d’une vie morale et spirituelle droite en vue de l’éternité.
Proclamer la Royauté du Christ ne consiste pas à brandir des bannières, à raviver les traditions de nos provinces et de nos pays ou à coudre sur un uniforme le drapeau français frappé du Sacré Cœur. Si nous admirons la geste vendéenne ou le courage des Cristeros, nous savons bien, aussi, que ces épisodes historiques appartiennent justement à l’Histoire. Il faut les connaître, les méditer mais aussi faire le bilan de leurs succès et de leurs échecs. Il faut également prendre la mesure de notre époque, qui n’est pas la même, en ce sens qu’elle a porté à maturité le projet moderne.
Aussi, réfléchir à la Royauté politique du Christ implique d’en rappeler les principes, par nature intangibles, tout en effectuant le rappel concomitant des impératifs modernes et de leur réalisation dans notre époque. Puis de trouver les modalités pratiques d’une incarnation à l’heure que Dieu voudra et s’il le veut, selon notre responsabilité de laïcs.
Ces livres pourraient vous intéresser :
- La Véritable Histoire des Cristeros, Hugues Kéraly, Éditions de L’Homme Nouveau, 20 €.
- Le Christ Roi. Théologie, philosophie et politique, Miguel Ayuso (dir.), Hora Decima, 22 €.
- Autorité, pouvoir & souveraineté, Guilhem Golfin, coll. Critères, Hora Decima, 10 €.
- L’Homme, animal politique, Guillaume Bergerot, coll. Critères, Hora Decima, 10 €.
Pas de nostalgie
Deux écueils nous semblent à éviter : l’enfermement dans une nostalgie inféconde et la reddition aux principes de la modernité que l’on cherche vainement à baptiser. À ce sujet, on aimerait que l’on cesse de nous dire que la Royauté politique du Christ était envisageable du temps de Pie XI mais que notre époque n’est plus la même.
Soulignons que, depuis la Révolution, la Royauté du Christ n’a jamais plus été de son temps, sauf exceptions à la marge du « sens de l’Histoire », et même si l’actuation de la chrétienté a toujours été marquée de péchés et faiblesses. Elle l’est d’autant moins aujourd’hui que l’ultra-modernité porte à leur paroxysme les principes de la modernité qui ont été façonnés comme une révolte contre la nature humaine et la Royauté du Christ. C’est notre souffrance, notre croix mais aussi notre grâce.
Une enquête et une année consacrée à Quas Primas s’achèvent. La Royauté du Christ, elle, demeure, même si les nations crient : « Nous ne voulons pas que cet homme règne sur nous » (Lc 19, 14). Mais même l’an prochain et dans les années à venir, il conviendra de l’expliquer, de la faire connaître et de trouver les moyens à mettre en place pour qu’elle soit reconnue. À ce titre, ce centenaire n’est qu’un rappel qui doit se transformer en rampe de lancement.
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