Le don d’organes (1/3) : Transplantation d’organes : les critères de la mort en question

Publié le 13 Nov 2024
mort don d'organes

Le don de sang, un acte de charité qui ne met pas en péril la santé du donneur vivant. © Pixabay/Big_Heart

> DOSSIER | Le don d’organes : Jusqu’où peut-on aller ?
Favorable aux dons d’organes, l’Église pose des limites morales pour le respect du corps, de la personne humaine et de la santé du donneur vivant. Mais se pose surtout la question de la mort réelle du donneur, dont les critères ne sont pas nécessairement bien posés ni bien respectés, la frontière de la vie restant parfois très difficile à déterminer.

  Tout en étant admiratifs devant les progrès des connaissances et techniques médicales qui permettent de sauver des vies autrefois condamnées – ainsi, les greffes et transplantations qui suppléent aux défaillances corporelles –, nous ne devons pas ignorer que certaines pratiques peuvent induire un obscurcissement du regard qui doit être porté sur notre corps. Celui-ci ne peut être réduit à une pure matière car «[la] nature [humaine] est en même temps corporelle et spirituelle. En raison de son union substantielle avec une âme spirituelle, le corps humain ne peut [donc] pas être considéré seulement comme un ensemble de tissus, d’organes et de fonctions ; […] il est partie constitutive de la personne qui se manifeste et s’exprime à travers lui» [1].

Un service envers la vie

Les transplantations ne vont pas, a priori, contre ce respect dû au corps humain. Car s’il est gravement immoral de « provoquer directement [une] mutilation invalidante ou la mort d’un être humain, fût-ce pour retarder le décès d’autres personnes» [2], les transplantations respectant ces interdits précis, avec un consentement éclairé, sont moralement bonnes, voire méritoires. Elles répondent à un service envers la vie. Ainsi, on ne doute pas du bien-fondé du don de sang, mais aussi de moelle osseuse ou d’un rein dans ces cas d’un donateur vivant (les risques encourus par le donneur doivent être proportionnés au bien recherché pour le destinataire). Cette capacité au don d’une part de soi continue au décès. C’est dans cette perspective que, dès Pie XII, l’Église a reconnu la légitimité des greffes justifiée « par le principe de solidarité […] et par la charité qui invite au don envers les frères souffrants » [3]. Mais les conditions du prélèvement peuvent interroger la réalité du respect dû à la personne humaine dans son corps. Tout d’abord, le nombre des besoins met la pression sur « l’offre », dans une logique de type marchand. Sans aller jusqu’aux trafics existants dans des pays pauvres où les organes…

Pour continuer à lire cet article
et de nombreux autres

Abonnez-vous dès à présent

Bénédicte Mathonat, Enseignant-chercheur à l’IPC

Ce contenu pourrait vous intéresser

À la uneSociété

La République du Panthéon

L’Essentiel de Joël Hautebert | En accueillant Robert Badinter, la République a poursuivi sa liturgie laïque au temple de ses héros. Du temple de sainte Geneviève au sanctuaire des « grands hommes », le Panthéon incarne la substitution progressive du culte de Dieu par celui de la République.

+

robert Badinter panthéon
SociétéArt et Patrimoine

Transmettre le patrimoine vivant, un défi pour la France

Entretien | Malgré les difficultés et la disparition d’un tiers des événements en cinq ans, les Français restent profondément attachés à leurs traditions festives. Thomas Meslin, cofondateur de l’association « Les Plus Belles Fêtes de France », défend ce patrimoine culturel immatériel et veut lui redonner visibilité et dynamisme grâce à un label national et un soutien accru aux bénévoles. Entretien.

+

patrimoine
InternationalBioéthique

Abolition de la GPA : une semaine historique à l’Onu

Dans un rapport du 1er octobre, Reem Alsalem, rapporteur spécial des Nations unies sur la violence contre les femmes et les filles, a qualifié la gestation pour autrui de « forme d’esclavage moderne », et appelé à l’adoption d’un instrument international juridiquement contraignant interdisant la GPA « sous toutes ses formes ». 

+

gpa
Société

Nos raisons d’espérer

L’Essentiel de Joël Hautebert | Malgré l’effondrement des repères et la crise des institutions, il demeure des raisons d’espérer. On les trouve dans ces hommes et ces femmes qui, par leurs vertus simples et leur fidélité au devoir d’état, sont capables d’assumer des responsabilités au service du bien commun.

+

espérer vertu
SociétéFin de vie

Euthanasie : « Pierre Simon voulait faire de la vie un matériau à gérer »

Entretien | Alors que le Sénat reporte une nouvelle fois l’examen du projet de loi sur la fin de vie, l’essayiste Charles Vaugirard publie La face cachée du lobby de l’euthanasie (Téqui). En s’appuyant sur les écrits oubliés de Pierre Simon, fondateur de l’ADMD et ancien grand maître de la Grande Loge de France, il dévoile les racines eugénistes et prométhéennes d’une idéologie qui, selon lui, continue d’inspirer les lois bioéthiques contemporaines.

+

euthanasie pierre Simon