Du bon usage des différences

Publié le 21 Nov 2022
difference

Le mot « différence », agité à tous les vents des idéologies à la mode, mérite qu’on s’y attarde. De quoi parle-t-on et quelles sont les conséquences de la différence humain-animal ou homme-femme ou végétal-minéral, par exemple ? Un éclairage bienvenu sur la hiérarchie des différences pour démêler le rationnel des slogans qui tordent le réel.

Aucune personne sensée ne tenterait plus aujourd’hui d’invoquer des différences raciales pour justifier le racisme. La notion de race est d’ailleurs controversée, même si celle d’ethnie qui souvent la remplace est elle-même mieux reconnue. D’un autre côté le féminisme, qui a bonne presse, montre que la différence homme-femme ne semble pas être remise en cause. Quant à notre différence avec les animaux, elle est au cœur de la lutte des antispécistes contre toute forme de discrimination à l’égard des autres espèces : s’abstenir de les consommer, de les exploiter, de les chasser, etc. On le voit, l’aptitude à reconnaître les différences ou la volonté de les effacer commande nombre de questions sociales, anthropologiques, idéologiques. Comment mettre de l’ordre dans cette idée d’« être différent » ? L’expérience humaine utile Il y a des différences… différentes ! Un homme n’est pas une femme et un peu d’expérience humaine montre qu’il n’y a pas qu’une « petite différence » ! Un chat n’est pas une mouette, un ballon n’est pas un camion, etc. et cette évidence saute aux yeux des enfants quand on les voit apprendre leur langue sur un livre d’images. Je puis aussi être différent de moi-même, dans la veille ou le sommeil, immature dans l’enfance ou adulte à la maturité, etc. Mais ces différences n’ont pas la même valeur. Très tôt, les logiciens (1) ont distingué des sortes de différences qui permettent d’ordonner nos concepts ; car si l’intelligence se réjouit de comparer et de trouver des ressemblances, elle se doit de distinguer ou de discriminer précisément, afin de ne pas tout confondre. Résumons les leçons de Porphyre sur les trois sortes de différences. Les premières sont les différences essentielles : c’est le cas par exemple des êtres qui n’ont pas la même définition en raison de leurs différences spécifiques, différences de nature : un homme (raisonnable) n’est pas un singe (non raisonnable) ; un animal (être vivant ayant la sensation) n’est pas un végétal (être vivant n’ayant pas la sensation), etc. Les secondes sont les différences propres qui, bien que marquant des caractères inséparables des sujets…

Pour continuer à lire cet article
et de nombreux autres

Abonnez-vous dès à présent

Bruno Couillaud

Ce contenu pourrait vous intéresser

À la uneSociété

L’homme transformé (2/3) | La métempsychose du totalitarisme

DOSSIER n° 1843 « L’homme transformé, l’illusion d’un salut sans Dieu » | Sous des formes nouvelles, le totalitarisme poursuit son œuvre de domination. Né du rejet de l’héritage chrétien et de la volonté de refonder l’homme, il s’est recomposé dans les sociétés libérales contemporaines. Sans violence apparente, mais par l’idéologie, le contrôle social et le déracinement, il impose désormais une version de lui-même d’allure douce.

+

homme transformé totalitarisme
À la uneSociété

L’homme transformé (1/3) | Du totalitarisme au transhumanisme, la tentation de l’homme transformé

DOSSIER n° 1843 « L’homme transformé, l’illusion d’un salut sans Dieu » | Dans son essai L’Homme transformé, Philippe Pichot Bravard analyse un fil rouge de l’histoire moderne : la volonté de créer un « homme nouveau ». Des régimes totalitaires du XXᵉ siècle aux projets transhumanistes, cette utopie revient sous des formes différentes mais garde la même logique. Entretien.

+

homme transformé homme nouveau
À la uneSociété

La messe n’est pas dite : Zemmour réclame une bouée trouée

L’Essentiel de Thibaud Collin | Dans son nouvel essai La messe n’est pas dite, Éric Zemmour en appelle à un « sursaut judéo-chrétien » pour sauver la France. Mais sous couvert d’un éloge du catholicisme, l’auteur ne réduit-il pas la foi chrétienne à un simple outil civilisationnel ? Une vision politique, historique et culturelle qui oublie l’essentiel : la source spirituelle de la France chrétienne.

+

la messe n’est pas dite zemmour
Société

« Mourir pour la vérité » de Corentin Dugast : reconstruire notre vie intérieure

Entretien | Dans son nouveau livre, Mourir pour la vérité, Corentin Dugast rend hommage à Charlie Kirk, figure chrétienne assassinée pour son engagement, et appelle les catholiques à renouer avec une vie intérieure authentique. Entre prière, combat doctrinal et exigence de vérité, il invite à sortir de l’indignation permanente pour retrouver un témoignage chrétien ferme, paisible et profondément incarné.

+

Charlie kirk Amérique Corentin Dugast
SociétéÉducation

Éduquer à l’heure de l’intelligence artificielle

Entretien | Alors que l’intelligence artificielle s’immisce dans tous les domaines de la vie quotidienne, Jean Pouly, expert du numérique et des transitions, alerte sur les dangers d’une génération livrée aux algorithmes sans accompagnement et invite à reprendre la main sur nos usages numériques. Entretien avec Jean Pouly, auteur de Transmettre et éduquer à l’heure de Chat-GPT (Artège).

+

intelligence artificielle
SociétéBioéthique

Filiation : quand le lien se dissocie du vivant

C’est logique ! | La reconnaissance par la France de deux enfants conçus par PMA après la mort de leur père rouvre un débat fondamental : qu’est-ce qu’engendrer ? Entre lien biologique et reconnaissance juridique, la filiation se voit détachée de son fondement naturel, au risque de transformer une relation d’être en simple fiction légale.

+

PMA post mortem filiation