Hymne du temps de la Passion

Publié le 07 Avr 2011

Hymnes du temps de la Passion

En complément de l’article paru p.26 du dernier numéro (n°1491), voici les trois Hymnes de ce temps, qui sont dues à Venance Fortunat, évêque de Poitiers, mort vers 600.

On trouvera ci-après le texte antérieur à la réforme d’Urbain VIII [1631], et qui est encore en usage dans certains Ordres religieux (traductions de l’AELF et des Moines du Barroux).

À MATINES (ou Vigiles)
(texte latin: PL 53, 785)

Pange, lingua, gloriosi / prœlium certaminis,
et super Crucis trophæum / dic triumphum nobilem :
qualiter Redemptor orbis / immolatus vícerit.

Chante, ma langue, le combat, la glorieuse lutte;
sur le trophée de la croix, proclame le noble triomphe:
le Rédempteur du monde fut vainqueur en s’immolant.

De parentis protoplasti / fraude factor condolens,
quando pomi noxialis / morsu in mortem corruit:
Ipse lignum tunc notavit, / damna ligni ut solveret.

Attristé de l’égarement de notre premier père,
qui tomba dans la mort en mordant le fruit néfaste,
le Créateur choisit lui-même un arbre pour réparer la malédiction de l’arbre.

Hoc opus nostræ salutis / ordo depopiscerat ;
multiformis proditoris / ars ut artem falleret,
et medelam ferret inde, / hostis unde læserat.

Cette œuvre de salut, l’ordre divin l’exigeait,
pour vaincre par la ruse la ruse multiforme du Malin,
et porter le remède d’où venait la blessure.

Quando venit ergo sacri / plenitudo temporis,
missus est ab arce Patris / Natus, orbis Conditor ;
atque ventre virginali / caro factus prodiit.

Quand vint donc la plénitude du temps,
le Fils, Créateur du monde, fut envoyé d’auprès du Père.
Il s’avança, devenu chair dans un sein virginal.

Vagit infans inter arcta / conditus præsepia :
membra pannis involuta / Virgo Mater alligat :
et manus pedesqu(e), et crura / stricta cingit fascia.

L’enfant pleure et vagit, couché dans une étroite mangeoire :
la Vierge, sa Mère, l’emmaillote en de pauvres langes,
et voici les mains et les pieds d’un Dieu enserrés dans des liens!

Gloria et honor Deo / usquequaqu(e) altissimo,
una Patri, Filioque, / inclito Paraclito:
cui laus est et potestas / per æterna sæcula.
Amen.

Gloire et honneur à jamais au Dieu très-haut,
ensemble Père, Fils, et illustre Consolateur;
louange et puissance pour les siècles éternels.
Amen.

À LAUDES
(texte latin: PL 53, 785)

Lustris sex qui jam peractis, / tempus implens corporis,
se volente natus ad hoc, / passioni deditus,
Agnus in Crucis levatur, / immolandus stipite.

Trente années achevées, au terme de sa vie corporelle,
Il se livre volontairement à la Passion pour laquelle Il était né.
L’Agneau est élevé en Croix pour être immolé sur le bois.

Hic acetum, fel, arundo, / sputa, clavi, lancea
mite corpus perforatur, / sanguis, unda profluit,
terra, pontus, astra, mundus / quo lavantur flumine.

Voici vinaigre, fiel, roseau, crachats, clous et lance!
Le doux corps est transpercé, le sang et l’eau ruissellent;
terre, mer, astres et monde, quel fleuve vous lave!

Crux fidelis, inter omnes / arbor una nobilis:
Nulla silva talem profert / fronde, flore, germine:
Dulce lignum, dulces clavos, / dulce pondus sustinet.

Croix fidèle, arbre unique, noble entre tous!
Nulle forêt n’en produit de tel avec ces feuilles, ces fleurs et ces fruits!
Douceur du bois, douceur du clou, qui porte un si doux fardeau!

Flecte ramos, arbor alta, / tensa laxa viscera,
et rigor lentescat ille, / quem dedit nativitas :
ut superni membra Regis / miti tendas stipite.

Fléchis tes branches, grand arbre, relâche le corps tendu;
assouplis la dureté reçue de la nature;
aux membres du Roi des cieux offre un appui plus doux.

Sola digna tu fuisti / ferre sæcli pretium,
atque portum præparare / nauta mundo naufrago,
quem sacer cruor perunxit, / fusus Agni corpore.

Toi seul as mérité de porter la rançon du monde
et de lui préparer un hâvre après son naufrage,
toi qui fus oint du sang sacré jailli du corps de l’Agneau.

Gloria et honor Deo / usquequaqu(e) altissimo,
una Patri, Filioque, / inclito Paraclito:
cui laus est et potestas / per æterna sæcula.
Amen.

Gloire et honneur à jamais au Dieu très-haut,
ensemble Père, Fils, et illustre Consolateur;
louange et puissance pour les siècles éternels.
Amen.

À VÊPRES
(texte latin: PL 88, 95)

Vexilla Regis prodeunt,
fulget Crucis mysterium :
quo carne carnis conditor,
suspensus est patibulo.

Les étendards du Roi s’avancent,
mystère éclatant de la Croix!
Au gibet fut pendue la chair
du Créateur de toute chair.

Quo, vulneratus insuper
mucrone diro lanceæ,
ut nos lavaret crimine,
manavit und(a) et sanguine.

C’est là qu’il reçut la blessure
d’un coup de lance très cruel,
et fit sourdre le sang et l’eau
pour nous laver de nos péchés.

Impleta sunt quæ concinit
David fideli carmine,
dicens: In nationibus
regnavit a ligno Deus.

Ils sont accomplis, les oracles
véridiques chantés par David
lorsqu’il a dit: «Sur les nations,
Dieu a régné par le bois.»

Arbor decor(a), et fulgida,
ornata Regis purpura,
electa digno stipite,
tam sancta membra tangere.

Arbre dont la beauté rayonne,
paré de la pourpre du Roi,
d’un bois si beau qu’il fut choisi
pour toucher ses membres très saints!

Beata, cujus brachiis
sæcli pependit pretium,
statera facta corporis,
prædamque tulit tartari.

Arbre bienheureux! À tes branches
la rançon du monde a pendu!
Tu devins balance d’un corps
et ravis leur proie aux enfers!

O Crux, ave, spes unica,
hoc Passionis tempore,
auge piis justitiam,
reisque dona veniam.

Ô Croix, salut, espoir unique!
En ces heures de la Passion,
augmente la justice des saints,
remets les fautes des pécheurs.

Te, summa, Deus Trinitas,
collaudet omnis spiritus:
quos per Crucis mysterium
salvas, rege per sæcula.
Amen.

Dieu, Trinité suprême,
que tout esprit vous célèbre;
gouvernez sans fin ceux que vous sauvez
par le mystère de la Croix.
Amen.

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